Donald Chan, vous souvenez-vous de la première fois où vous avez vu West Side Story ?
Je l’ai vu au cinéma en 1963, je pense. C’était très enthousiasmant, c’était une des meilleures comédies musicales que j’avais jamais vues ! A l’époque, j’étais étudiant à Juilliard. J’y ai suivi une master class avec Bernstein et j’ai eu l’occasion de lui dire à quel point je trouvais son œuvre magnifique.
Qu’est-ce qui vous a plu dans la partition ?
Le fait qu’il y ait de tout dans la musique : du jazz, du ballet, de la musique latine, du classique. C’est très éclectique et tout est parfaitement connecté ensemble.
A l’époque, vous étiez plutôt intéressé par l’opéra ou le théâtre musical ?
Oh, j’étais intéressé par tout. Quand j’étais étudiant, je faisais tout ce qui se présentait à moi : un show off-Broadway, des opéras, du classique, j’étais aussi pianiste.
Quand avez-vous dirigé West Side Story pour la première fois ?
Je crois que c’était en 1968, pour un petit théâtre, mais j’étais impressionné, car j’avais un orchestre de taille décente et une très bonne distribution. C’était tellement excitant de le diriger pour la première fois !
Quel souvenir gardez-vous de vos rencontres avec Bernstein ?
J’ai participé à plusieurs master classes avec lui, j’ai eu l’occasion de discuter un peu avec lui. C’était une personne très sympathique, très extravertie. C’est d’ailleurs le souvenir le plus marquant que les gens gardent : cette expansivité.
Lui avez- vous demandé des conseils sur la façon de diriger cette œuvre ?
Non, car à l’époque, je ne savais pas encore que je le ferais mais j’ai appris tout ce que je pouvais, et j’ai également vu ses concerts avec le Philharmonique.
Comment expliquez-vous ce succès constant plus de cinquante ans après la création de l’œuvre ?
Je pense que c’est lié à son livret. La musique est superbe, mais l’histoire est excellente et les deux se combinent parfaitement ensemble. Ces deux clans qui s’affrontent à travers une histoire d’amour impossible, ça parle à tout le monde, encore aujourd’hui. C’est universel.
En tant que chef d’orchestre, quel est votre moment préféré de la partition ?
J’aime le ballet mais le grand moment de la soirée, c’est le quintet, avec ses cinq zones à diriger et ses cinq parties vocales complètement différentes qui explosent en même temps. C’est génial.
Est-ce que c’est toujours un défi de diriger ça ?
Ça l’était mais plus maintenant. En tant que chef d’orchestre, je suis un peu comme le vieux monsieur du spectacle qui essaie d’apprendre à chacun ce qu’il doit faire, et qui s’assure que tout soit comme Bernstein le souhaitait.
Y a‑t-il toujours des challenges pour vous aujourd’hui ?
Oui, bien sûr. Déjà, nous avons tout le temps des nouvelles distributions. Parfois, certains chanteurs ont du mal à faire des choses que j’aimerais qu’ils fassent. C’est aussi un challenge de trouver les bons interprètes. L’orchestre est un challenge moindre, mais parfois on a des musiciens qui ne jouent pas toujours très bien, alors, oui, il y a toujours des défis à relever !
Vous êtes le chef d’orchestre qui a dirigé West Side Story le plus grand nombre de fois. Comment faites-vous pour garder une certaine « fraîcheur » ?
Je le dirige environ six mois par an, donc, déjà, quand je reviens, il y a toujours une certaine fraîcheur. Et puis, on a des distributions et des orchestres différents, donc il y a toujours de la nouveauté.
Vous avez également dirigé d’autres musicals. Quels sont vos favoris en dehors de West Side Story ?
Les musicals de Sondheim, et ceux de Rodgers et Hammerstein. J’en ai dirigé un certain nombre avec des artistes qui ont créé des rôles comme John Raitt pour Carousel. Ca a été très enrichissant de travailler avec ces personnes qui m’ont montré comment ils jouaient leur personnage. Ca m’a beaucoup appris.
Y a‑t-il un musical que vous n’avez pas encore dirigé et que vous aimeriez faire ?
Sweeney Todd, probablement. Mais j’en ai fait tellement, j’ai même dirigé The Phantom of The Opera !
Mais après toutes ces années, vous êtes toujours amoureux de West Side Story…
Oh oui, c’est un amour de longue date et qui durera longtemps ! Et j’aime tellement ce spectacle que je suis heureux de voyager à travers le monde pour le défendre.
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