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Vilaines filles, mauvais garçons

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VFMG - SmallUn spec­ta­cle musi­cal sur les chan­sons de Serge Gainsbourg
Avec Isabelle Lardin-Huynh
Dan Menasche
Cyril Romoli
Olivi­er Ruidavet
Julie Wingens
Con­cep­tion et mise en scène
Stéphane Ly-Cuong
Choré­gra­phies : Nel­ly Célérine
Arrange­ments et direc­tion musi­cale : Cyril Romoli
Cos­tumes : Sami Bedioui

Vilaines filles, mau­vais garçons, ce sont cinq inter­prètes qui font souf­fler un déli­cieux vent de fraîcheur sur les titres de Gains­bourg. Vilaines filles, mau­vais garçons pro­pose un voy­age sur la Carte du Ten­dre du plus célèbre fumeur de Gitanes.

En une ving­taine de titres, Vilaines filles, mau­vais garçons revis­ite un réper­toire à la fois sophis­tiqué et pop­u­laire dont cer­taines chan­sons sont pro­fondé­ment ancrées dans la mémoire col­lec­tive. Le spec­ta­cle se con­cen­tre prin­ci­pale­ment sur la pre­mière péri­ode de Serge Gains­bourg, celle des années pop et jazz où l’innocence côtoie l’impertinence et où l’amour cohab­ite tou­jours avec l’humour.

Les vilaines filles et mau­vais garçons vont fer­ont redé­cou­vrir M. Gains­bourg, tout en lui ren­dant un hom­mage vibrant de vie.

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Cri­tique :

Juke­box, juke­box… est issu de la chan­son de Gains­bourg « Le claque­ur de doigts » qui donne le la au spec­ta­cle Vilaines filles, mau­vais garçons de Stéphane Ly-Cuong [NDLR : rédac­teur en chef de Regard en Coulisse]. Juke­box, c’est aus­si l’épithète générale­ment employé pour les comédies musi­cales reprenant le réper­toire d’un seul artiste. Dans le genre, trois approches exis­tent. La pre­mière con­siste à illus­tr­er une his­toire par des titres plus ou moins à pro­pos comme Mam­ma Mia (Abba) ou All shook up (Elvis Pres­ley). La sec­onde ne s’embarrasse pas d’intégration dra­ma­tique, comme Jer­sey Boys (Four Sea­sons) où les pas­sages chan­tés sont des inter­ludes, des représen­ta­tions de con­certs. La troisième, qui est aus­si la plus intéres­sante, bâtit l’intrigue par les extraits musi­caux sans besoin de rac­cord par­lé, comme le mémorable Jacques Brel is alive and well and liv­ing in Paris de Mort Schu­man. Mau­vais­es filles, mau­vais garçons est de cette veine là.

Stéphane Ly-Cuong a dans la tête autant de chan­sons que dans son iPod de 80GB et il est passé maître dans la créa­tion de par­cours musi­caux thé­ma­tiques et de passerelles nar­ra­tives. Dans Les nou­veaux roman­tiques, il explore la var­iété des années 80 et dans C’est tou­jours ça de pris, la chan­son à texte des années 30. Inclu­ant les incon­tourn­ables, il fait aus­si tou­jours l’effort d’aller chercher quelques per­les oubliées. Pas ou peu de mots suff­isent à emporter le spec­ta­teur dans un tableau musi­cal de style impres­sion­niste où les per­son­nages évolu­ent au rythme de chan­sons savam­ment réper­toriées suiv­ant une logique plus ou moins explicite. Vilaines filles, mau­vais garçons utilise à plein l’ambigüité de Gains­bourg, canon de laideur sachant charmer les femmes, vice­lard sans tabou qui fut aus­si le plus aimant des maris et des pères. Ses textes, naturelle­ment, grouil­lent d’états d’âme à pro­pos de l’Amour avec un grand A et de l’acte amoureux, matière que Stéphane Ly-Cuong a su com­bin­er pour représen­ter les affres et les joies de la vie en cou­ple, de la quête amoureuse infinie, tou­jours avec beau­coup d’humour.

Cinq tal­entueux artistes com­plè­tent ce tableau. Cyril Romoli, directeur artis­tique en charge des arrange­ments, fait le chef d’orchestre au piano et chante des inter­mèdes chargés d’émotion. Isabelle Lardin-Huynh et Olivi­er Rui­dav­et for­ment un cou­ple extraver­ti et per­vers ; Julie Win­gens et Dan Menasche jouent les amoureux tran­sis pleins de naïveté, mais pas insen­si­bles à la ten­ta­tion char­nelle. Tous se mélan­gent dans des choré­gra­phies sim­ples et rich­es de sig­ni­fi­ca­tion, des med­leys aux sonorités famil­ières mais trou­vant ici un sens nouveau.

Après ce show­case démon­trant le niveau de matu­rité du spec­ta­cle, espérons retrou­ver prochaine­ment Vilaines filles, mau­vais garçons dans une pro­duc­tion lui four­nissant les moyens d’accéder au suc­cès pop­u­laire qu’il mérite.

(Thomas Schmidt)