Accueil Critique Vent du Soir ou le Festin des Papous

Vent du Soir ou le Festin des Papous

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Mise en scène : Philippe Ermelier.
Assis­tant et Choré­graphe : David Gurwicz.
Avec : Philippe Erme­li­er, Pierre Reg­giani, Franck T’Hézan, Julie Vic­tor, Cather­ine Mer­le, David Gur­wicz, le trio Samaya.
Pianiste : Mis­sa­ki Baba.

Dom­inée par l’in­vraisem­blance out­ran­cière des per­son­nages, cette opérette peu con­nue d’Of­fen­bach est un diver­tisse­ment dont on peut imag­in­er le suc­cès dans les années 1850, auprès d’un pub­lic parisien notoire­ment irrévéren­cieux. Véri­ta­ble par­o­die du drame bour­geois, l’oeu­vre dis­simule ironie et imper­ti­nence sous un exo­tisme de façade.

Fidèle à l’e­sprit de l’opérette clas­sique dans le refus total de se pren­dre au sérieux, Philippe Erme­li­er nous offre une adap­ta­tion joyeuse et loufoque. Soucieux de ral­li­er à sa cause un pub­lic aus­si large que pos­si­ble, il ne craint cepen­dant pas d’user de toutes les recettes pour nous faire rire. Pitreries et gau­dri­oles en tout genre inau­gurent donc le spec­ta­cle, ce qui ne man­quera pas de plaire aux plus petits, ou de décourager les plus grands. Il serait cepen­dant dom­mage de s’of­fus­quer de quelques plaisan­ter­ies mal assor­ties, car l’essen­tiel n’est pas là.

Mal­gré un début improb­a­ble, la pièce sem­ble pren­dre corps dès lors que nous ren­trons dans le vif du sujet. Aux pre­mières notes, la pianiste Mis­a­ki Baba nous éblouit par la clarté et l’am­pli­tude de son jeu. Capa­ble d’en­volées inat­ten­dues, son inter­pré­ta­tion exploite toutes les richess­es d’une musique vrai­ment fine et spir­ituelle. Avec bon­heur, les chanteurs captent et prof­i­tent de la dynamique engen­drée par un phrasé par­ti­c­ulière­ment vivant. Ain­si Philippe Erme­li­er réus­sit à nous trans­porter avec sa voix de bary­ton à la fois puis­sante et lyrique. Ses vibra­tions nous atteignent par­faite­ment dans l’en­ceinte idéale­ment dimen­sion­née de ce théâtre. Autre tré­sor de la dis­tri­b­u­tion, Julie Vic­tor : d’une tes­si­ture à la lim­ite du mez­zo-sopra­no, sa voix sub­tile et légère illu­mine lit­térale­ment les mélodies d’Of­fen­bach. On l’au­ra com­pris, le trio représente la clef de voûte du spec­ta­cle. Non seule­ment la mise en scène tire judi­cieuse­ment par­ti de la qual­ité de la musique, mais en plus l’in­ser­tion de chan­sons extraites d’autres oeu­vres du com­pos­i­teur étoffe har­monieuse­ment la par­ti­tion. Préser­vant le rythme néces­saire à l’e­sprit bouffe, la comédie fonc­tionne à merveille.

Point fort de la pièce, l’in­ter­pré­ta­tion magis­trale de par­ti­tions tirées de La belle Hélène, La vie parisi­enne, ou encore La créole, devrait attir­er de nom­breux mélo­manes avertis.