Accueil Portraits Une virée à New York pour le trio du « Prince et le Pauvre »

Une virée à New York pour le trio du « Prince et le Pauvre »

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Émi­lie Allard © Maxime Tremblay

Par­lez-nous de vous en quelques mots…
Émi­lie Allard
: Dès mon plus jeune âge, je me suis intéressée à la comédie musi­cale : au début, dans le cadre du théâtre con­ven­tion­nel puis le théâtre musi­cal grâce aux spec­ta­cles de fin d’année. Ce fut une révéla­tion : j’ai su que je voulais faire de la comédie musi­cale ! Ensuite, j’ai pour­suivi ma for­ma­tion dans ce sens. À ma sor­tie du Col­lège Lionel-Groulx, j’ai créé, avec des amis, ma pro­pre troupe de théâtre.
Alexan­dre Léveil­lé : Étant timide de nature, je ne voulais vrai­ment pas me retrou­ver dans le domaine artis­tique mais, à 17 ans, une amie m’a invité à par­ticiper à un con­cours de chant que j’ai gag­né. A ce moment-là, je me suis dit qu’il y avait peut-être quelque chose pour moi dans ce domaine ! Au même moment, j’avais été accep­té au Col­lège Lionel-Groulx, en Arts, let­tres et inter­pré­ta­tion ; j’ai pour­suivi ma for­ma­tion dans le même pro­gramme qu’Émilie et cela s’est très bien passé. Depuis, je joue deux à trois pièces par année et j’en suis bien heureux car cela me per­met de m’améliorer et d’en appren­dre davan­tage à chaque fois !
Richard-Nico­las Vil­leneuve : Pour ma part, j’ai débuté sur le tard. En effet, c’est à 22 ans que j’ai entamé des cours de chant pour ensuite aller vers l’évène­men­tiel pen­dant près de dix ans. J’ai ensuite décou­vert le chant clas­sique, l’opéra et les opérettes. Je n’ai pas vrai­ment de for­ma­tion en théâtre en tant que telle mais grâce aux évène­men­tiels et aux comédies musi­cales que j’ai inter­prétées au CEGEP, j’ai me suis vite sen­ti à l’aise sur scène. Depuis deux ans, je tra­vaille ma tech­nique clas­sique et ma ren­con­tre avec Isabelle Cyrenne (NDLR : l’a­gent de Richard-Nico­las Vil­leneuve), qui se spé­cialise dans la comédie musi­cale, m’a amenée à dévelop­per ce côté-là.

Vous faisiez par­tie de la dis­tri­b­u­tion du Prince et le Pau­vre à New York en juil­let dernier. Quelles sont vos impres­sions sur cette expérience ?
E.A.
: Lors du numéro d’‘ouverture, j’’étais là à chanter et tout roulait comme il se doit. Mais dans ma tête, je me dis­ais : « Oh my God ! Je suis seule­ment à quelques min­utes de Broad­way ». C’’était pour moi comme un rêve qui se réal­i­sait. Évidem­ment, ce n’é­tait pas un spec­ta­cle de l’’envergure de ceux qu’on retrou­ve sur la 42nd Street, mais j’’y étais !
R‑N.V. : De mon côté, c’’est presque la même chose qu’’Émilie mais moi, j’’ai eu cette pen­sée une sec­onde avant de faire mon entrée sur la scène. C’’est fou car, lorsque j’’ai entamé mes cours de chant, je me suis dit que j’’aimerais telle­ment un jour jouer à Broad­way ! Certes, nous n’’étions que sur la 36e rue, mais c’’est tout même mieux que rien. À mon avis, quand on fait de la comédie musi­cale, on rêve tous de jouer un jour à Broad­way, il ne peut en être autrement.… C’‘est la même chose du côté de l’’opéra : tu rêves de faire le Met à New York ou la Scala à Milan !
A.L. : Une dou­ble exci­ta­tion pour moi car c’’était ma pre­mière fois à New York et de sur­croît la pre­mière fois que je péné­trais dans un théâtre new-yorkais. Nous sommes d’’accord pour dire que c’’était une belle petite salle et que la fébril­ité de toute l’’équipe était à son max­i­mum. Nous ressen­tions une cer­taine fierté aus­si de mon­tr­er ce que nous pou­vions faire et nous avons obtenu de très bonnes cri­tiques. On espère forte­ment que ce ne sera pas la dernière fois.

Aviez-vous déjà vos fans à la sor­tie du théâtre ?
E.A.
: Non (rires), mais moi je suis très chanceuse car ma famille a fait le voy­age pour me voir sur scène, comme la famille de plusieurs des inter­prètes d’ailleurs.
R‑N.V. : Il faut dire que la famille d’’Émilie assiste à toutes les représen­ta­tions (rires) ! Ce sont nos fans numéro un. Nous devons avoir des gens qui nous sou­ti­en­nent car c’‘est un milieu où il y a beau­coup d’e con­cur­rence et générale­ment, ’un con­frère vient plutôt nous dire les choses néga­tives que pos­i­tives, à moins d’être entre amis.

Alexan­dre Léveil­lé © Maxime Tremblay

Com­ment était la réac­tion du public ?
A.L. : Sur­prenante ! Même si c’était majori­taire­ment un pub­lic anglo­phone — il faut rap­pel­er que le spec­ta­cle était présen­té en français avec des sur-titres anglais – les gens me dis­aient com­bi­en ils étaient embal­lés par Le Prince et le Pau­vre et qu’ils ne regar­daient presque pas la tra­duc­tion telle­ment la pièce était claire­ment écrite et bien imagée.
E.A. : Tout à fait ! L’histoire, les per­son­nages et la musique : tout va dans le même sens. C’est bien struc­turé et facile à com­pren­dre. Dans le pub­lic, il y avait quand même quelques fran­coph­o­nes alors nous avons eu des com­men­taires un peu plus détaillés.
R‑N.V. : En même temps, nous avons réal­isé com­bi­en nous étions prêts. En effet, nous avions présen­té ce spec­ta­cle en 2011 et avions répété durant un mois, avant New York. Et Le Prince et le Pau­vre était présen­té lors d’un fes­ti­val, ce qui veut dire que nous avions quinze min­utes pour nous chang­er, nous pré­par­er, nous maquiller et entr­er dans nos per­son­nages et, mal­gré ceci, nous avons été en mesure de livr­er chaque soir une per­for­mance digne de ce qui se fait à New York.

Avez-vous prof­ité de votre séjour pour assis­ter à quelques pro­duc­tions sur Broadway ?
E.A. : Oh oui ! Pour ma part, j’ai vu Ghost et je pour­rais en par­ler pen­dant des heures. On pour­rait penser que cela est « kétaine », ringard si vous préférez. Mais non, c’est telle­ment bien fait qu’à la fin du spec­ta­cle, j’étais inca­pable de bouger et je me suis dit : « Voilà la rai­son pour laque­lle je fais ce méti­er : pour faire vivre ces émo­tions aux gens ». C’était magnifique !
A.L. : Oui, mag­nifique ! J’ai un peu moins aimé les deux inter­prètes prin­ci­paux mais les effets spé­ci­aux étaient hal­lu­ci­nants. C’est très fidèle au film, avec une touche Broadway.
R‑N.V. : Je n’avais jamais assisté à un spec­ta­cle sur Broad­way et, étant un fan de Julie Andrews, j’ai décidé de voir Mary Pop­pins. De mon siège, j’avais une vue impren­able sur les artistes avant même leur entrée en scène. Donc, j’avais le priv­ilège de les voir « entr­er » dans leur per­son­nage et c’était mer­veilleux ! Et le spec­ta­cle est par­fait : les choré­gra­phies, les chants, tout roule au quart de tour. Rien n’est lais­sé au hasard.

Émi­lie, jouer un rôle mas­culin, on abor­de cela com­ment ? Y a‑t-il des com­pli­ca­tions par rap­port à un autre rôle ?
Oui ! Surtout la toute pre­mière fois où j’ai inter­prété ce rôle. Au niveau de ma gestuelle, je suis très fémi­nine et Julien (NDLR : Julien Salvia, l’un des créa­teurs et le met­teur en scène), me dis­ait « Atten­tion, les poignets ! ». Ou encore, lorsque je m’asseyais, je croi­sais immé­di­ate­ment mes jambes : il fal­lait vrai­ment que je sois atten­tive à ces petits gestes féminins. Côté voix, il faut aller chercher une voix plus claire, avec moins de rondeur.

Alexan­dre, jouer un « comique » comme Gus­tave, ne doit pas être de tout repos ?
A.L.
: Le plus drôle dans tout ça, c’est qu’à l’é­cole on me don­nait tou­jours des rôles de jeunes pre­miers ou de jeunes amoureux. Lorsque j’ai audi­tion­né pour ce rôle, la descrip­tion du per­son­nage était : petit, laid et gros (rires).
R‑N. V. : Ce rôle était pour moi (rires).
A.L. : Je me dis­ais : « Je n’ai jamais joué ce genre de rôle, je n’en serai pas capa­ble », mais, finale­ment, je me suis prêté au jeu et Julien qui, soit dit en pas­sant, est un excel­lent met­teur en scène, m’a mon­tré les ficelles comiques sans toute­fois tomber dans le « trop » comique. Jouer un tel rôle demande beau­coup d’én­ergie et ce per­son­nage m’a per­mis de dévelop­per d’autres facettes, au niveau théâtral.

Richard-Nico­las Vil­leneuve © DR

Alexan­dre, com­ment vit-on le fait qu’une comédie musi­cale comme La Vie des Anges n’ait pas obtenu de très bonnes critiques ?
A.L
. : Mal­gré la bonne volon­té du met­teur en scène, Jean-Jacques Guinot, je ne suis pas sur­pris de la cri­tique des médias québé­cois. On voulait telle­ment que ce soit bon, je pense que nous avons don­né le meilleur de ce qu’on pou­vait, mal­gré les cir­con­stances. Encore aujourd’hui, je crois que ce spec­ta­cle a un poten­tiel pour devenir bon. Ce n’est pas évi­dent quand tu sais très bien, tout le long des répéti­tions, que le spec­ta­cle ne décollera pas. Mais nous étions tout de même une bonne équipe. Et, pour ma part, je suis une per­son­ne qui, une fois engagée dans un pro­jet, y reste jusqu’à la fin. Alors oui, le fait de lire ces mau­vais­es cri­tiques n’a fait que con­firmer ce que j’en ai pen­sé et, effec­tive­ment, il faut vivre avec… et ce n’est pas facile.
R‑N. V. : Mais la cri­tique a été dure envers le spec­ta­cle lui-même, pas envers les interprètes.
A.L. : Peut-être que l’auteur aurait dû un peu plus écouter les com­men­taires et se retir­er de la mise en scène ? Vous savez, Jean-Jacques Guinot est telle­ment une bonne per­son­ne qu’on ne lui souhaite pas du tout que cela se ter­mine de cette façon.

Richard-Nico­las, vous êtes un ténor de for­ma­tion, avez-vous une préférence entre l’oeu­vre lyrique et la comédie musicale ?
Avant New York, je vous aurais dit l’oeu­vre lyrique (rires). Lorsque j’ai vu Mary Pop­pins, j’ai été par­ti­c­ulière­ment impres­sion­né car j’avais presque oublié ce côté lyrique qu’on retrou­ve dans cer­taines comédies musi­cales. Et, con­traire­ment à Alexan­dre, pour Le Prince et le Pau­vre, on m’a don­né un rôle de cheva­lier, très sérieux, très intérieur… et je ne mesure qu’1.67 m (rires) et, à part Dame Édith qui a ma taille, tous sont plus grands que moi. J’avais pour­tant audi­tion­né pour le rôle de Gus­tave. En fait, quand je fai­sais de l’opéra, on m’a tou­jours offert les rôles « comiques » ou de « bouf­fons » car ma voix est plus légère. Il faut ajouter qu’en clas­sique je n’aurai jamais un pre­mier rôle dans un Ver­di ou un Puc­ci­ni et ce, à cause du style de ma voix. Aus­si, je dirais que j’aime mieux l’opérette que l’opéra car nous avons la chance de par­ler et de jouer même si main­tenant du côté de l’opéra, il y aus­si une révolution.