Récital-spectacle
Avec Flannan Obé (chant, textes), Yves Meierhans (piano)
Mise en scène : Jean-Marc Hoolbecq
Création lumière : Stéphane Balny
Il était Elliot Fall la saison dernière, il fut Gaston dans Lucienne et les Garçons, et est aussi un membre de la compagnie Les Brigands… Aujourd’hui, il nous propose, accompagné par Yves Meierhans au piano, un récital-spectacle entre mélodies françaises (Ravel, Poulenc, Hahn…), chansons (Damia, Brel, Francis Blanche…) et quelques mots de son cru. Sous le regard de Jean-Marc Hoolbecq, qui est aussi chorégraphe, Flannan Obé navigue des larmes au rire, du renoncement à la révolte, du théâtre au music-hall, et nous parle des choses de la vie.
Notre avis (Critique parue en 2011) :
Ce premier récital-spectacle seul à chanter en scène de Flannan Obé est une vraie réussite ! Des poèmes mis en musique aux textes de son cru qui ponctuent la soirée, il nous raconte des histoires où l’amour et la mort vont de conserve, des rencontres champêtres, des passions qui annoncent la maladie, des révoltes qui mènent à la guerre… On oscille, entre cynisme et dérision, d’une situation tragi-comique (Le mot de billet, de Francis Blanche) à des réflexions en demi-teintes (Le vase brisé, poème de Sully Prudhomme), ou à des anecdotes truculentes ou faussement naïves racontées à la première personne (l’enfant qui voulait apprivoiser une sauterelle, le déjeuner avec une amie qui parle de sujets sur lesquels on n’a rien à dire).
On admire avant tout un artiste aux multiples qualités : sa voix sonore et ductile lui permet de se glisser avec maestria aussi bien dans l’univers feutré de la mélodie classique (Hahn, Franck, Chausson…) que dans celui, plus véhément ou plus accentué, de la chanson réaliste ou de caractère (Damia, Brel, Piaf…). Grâce à son sens du théâtre et à un engagement physique soutenus, par des attitudes bien campées, en déambulant avec nonchalance, en esquissant quelques pas de danse, en se jetant à terre ou en se tortillant d’ironie, il se veut séducteur, suscite le rire ou convoque le drame. Chaque inflexion est maîtrisée et la galerie des personnages qu’il égrène tout au long de la soirée, ceux des saynètes comme ceux des chansons, prend incroyablement vie.
Son partenaire sur scène, le pianiste et compositeur Yves Meierhans, fait bien plus qu’accompagner : il déroule avec sensibilité un tapis rouge sonore qui s’impose comme un subtil écrin pour les textes. La Pavane pour une Infante défunte en duo avec Isabelle Sajot au violoncelle est un authentique moment de grâce. Sans accessoire ni décor, la mise en scène et les chorégraphies de Jean-Marc Hoolbecq, alliées aux lumières de Stéphane Balny, font ressortir la variété des univers et révèlent le sens des textes en leur insufflant un élan.
Question de goût sans doute : plutôt que par les moments démonstratifs très bien réglés, on a été plus ému par le Kaddish de Maurice Ravel qui ouvre le spectacle et le Bye bye de Tiarko Richepin qui le clôt, deux moments de véritable mise à nu et de sincère introspection. Et encore plus par le bis accompagné au violoncelle, Alfonsina y el mar, donné sans fard et qui révèle peut-être encore une autre facette d’un artiste talentueux.