Musique et lyrics : Stephen Sondheim
Livret : Hugh Wheeler
Orchestration : Jonathan Tunick
Direction musicale : David Charles Abell
Mise en scène : Lee Blakeley
Décors et costumes : Tanya McCallin
Chorégraphie : Lorena Randi
Sweeney Todd : Rod Gilfry , Franco Pomponi
Mrs. Lovett : Caroline O’Connor
Johanna : Rebecca Bottone
Anthony Hope : Nicholas Garrett
Le Juge Turpin : Jonathan Best
Le Bailli Bamford : John Graham-Hall
La mendiante : Rebecca de Pont Davies
Pirelli : David Curry
Tobias Ragg, dit Toby : Pascal Charbonneau
Livret basé sur la pièce de Christopher Bond.
Ensemble Orchestral de Paris du 22 avril au 7 mai
puis Orchestre Pasdeloup
Créé à Broadway en 1979 avec Len Cariou et Angela Lansbury, repris récemment (en 2005) avec Michael Cerveris et Patti LuPone, Sweeney Todd, de Stephen Sondheim est une oeuvre qui navigue entre théâtre musical et opéra, voire « dark operetta » ou « movie for the stage » (un film pour la scène) comme le dit parfois son auteur lui-même. Sweeney Todd a d’ailleurs fait l’objet d’une adaptation cinématrographique, réalisée par Tim Burton en 2006, avec Johnny Depp et Helena Bonham-Carter. Sans doute la plus lyrique des œuvres de Sondheim, Sweeney Todd trouve aisément sa place dans une maison telle que le Châtelet, qui prend le risque (et nous offre le privilège) de proposer du Sondheim deux saisons de suite (après A Little Night Music la saison dernière).
Thriller tragique, fable sanglante, comédie grinçante, Sweeney Todd conte le destin d’un barbier assoiffé de vengeance dans le Londres populaire du 19e siècle. Son association avec une piètre cuisinière provoquera une série de disparitions étranges dans le quartier de Fleet Street tout en relançant le commerce de tourtes à la viande de la dame. Sur cette farce cynique, Sondheim a composé une partition riche et dense, inspirée de certaines musiques de films de Bernard Herrmann.
Pour cette production de Sweeney Todd, Lee Blakeley, metteur en scène de A Little Night Music la saison passée, reprend ses fonctions et dirige une distribution composée principalement de noms déjà habitués de la maison : Rodney Gilfry (The Sound of Music) en Todd, Caroline O’Connor et Jonathan Best (On The Town) en Mrs Lovett et Juge Turpin, Rebecca Bottone, Nicholas Garrett et David Curry (A Little Night Music) en Johanna, Anthony et Pirelli, et enfin Pascal Charbonneau (My Fair Lady) en Toby.
Dès l’ouverture, avec ses orgues majestueux et glaçants à la fois, il est impossible de ne pas être pris aux tripes tant par les chœurs que par les solistes. La distribution est particulièrement brillante vocalement. Gilfry, dont on avait peu entendu la voix chantée lorsqu’il incarnait le rôle du Capitaine Von Trapp donne ici toute la mesure de son talent avec un timbre troublant. O’Connor (seule artiste venue du théâtre musical et non du lyrique) allie un abattage et une gouaille jubilatoires. Enfin, les deux jeunes rôles masculins (Garrett et Charbonneau) ne peuvent que séduire avec leurs impressionnantes voix. Seul bémol dans une troupe homogène, la Mendiante (de Pont Davies) qui a du mal à être crédible tant vocalement que physiquement.
Dans cet ensemble tout à fait impressionnant, on peut regretter que la mise en scène et l’utilisation de l’espace soient un brin conventionnelles. La somptueuse partition de Sondheim reste cependant la grande star de la soirée. Elle est ici magnifiquement interprétée par l’Ensemble Orchestral de Paris sous la direction de David Charles Abell. Rares sont les occasions d’entendre des musicals de ce calibre interprétés avec une tel effectif et une telle ampleur. Les morceaux de bravoure avec chœurs triomphants sont tout aussi bien exécutés que les subtils underscores, lancinants.
Reste à souhaiter que ce Barbier de Fleet Street trouve son public à Paris et que le Théâtre du Châtelet continue à nous proposer régulièrement des musicals (et particulièrement du Sondheim) de ce calibre.
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