Livret original de Eric Idle.
Compositeur de la musique originale : John Du Prez.
Adaptation et mise en scène : P.-F. Martin- Laval.
Direction musicale : Matthieu Gonet.
Chorégraphie : Stéphane Jarny.
Coach vocal : Jasmine Roy.
Lumière : Régis Vigneron.
Avec : Pierre-François Martin-Laval (Arthur), Gaëlle Pinheiro (La Dame Du Lac), Olivier Denizet (Robin), Philippe Vieux (Lancelot), Grégoire Bonnet (Bedevere), Arnaud Ducret (Galahad), Andy Cocq (Patsy), Laurent Paolini (Prince Herbert), Edouard Thiebaut , Tiffanie Jamesse, Arnaud Denissel, Sophie Gemin.
Spamalot, c’est pas de la camelote !
Si vous aimez l’humour anglais décalé et absurde des Monty Python ou celui bien de chez nous de Kaamelott, la série de M6, vous adorerez Spamalot. Il s’agit de l’adaptation musicale du film Sacré Graal (1975) par Eric Idle, membre des Monthy Python lui-même, parodiant la légende du roi Arthur et des Chevaliers de la Table ronde. Le show a reçu le Tony du meilleur spectacle musical en 2005 et il est resté à l’affiche sur Broadway pendant quatre ans. La version française revendique clairement sa filiation avec ce succès new-yorkais en raison des décors et des costumes somptueux, d’un orchestre live d’une dizaine de musiciens, d’une troupe nombreuse et de sa star issue de la troupe des Robins des Bois, Pierre-François Martin-Laval, dit Pef. Ce dernier est aussi l’auteur de l’adaptation française en plein dans son registre de prédilection, la cape et l’épée.
Certes, Spamalot est loin d’être un chef‑d’œuvre : l’intrigue autour de la quête du Graal est un prétexte à des épisodes « excaliburlesques » à la pelle et, sans doute, aucune de ses chansons ne marquera l’histoire de la comédie musicale. Sans prétention artistique, Spamalot est avant tout un divertissement au sens premier du terme et, de fait, on rit beaucoup des gags à grosse ficelle, des situations absurdes et des personnages caricaturaux à l’extrême. Il faut ajouter à cela la magie de la scène, l’univers médiéval cartoonesque fort bien restitué et dynamisé par des effets spéciaux surprenants et drôles. Les nombreux tableaux d’ensemble font leur effet, ne déclenchant pas tous les frissons de Broadway, mais restent fort impressionnants. La troupe est brillante en tout point, sans faute de casting – c’est suffisamment rare pour être mentionné. Il faut citer Gaëlle Pinheiro qui révèle tout son potentiel comme Dame du Lac mi-bienveillante, mi-révoltée, aussi crédible que son équivalent dans le show original (Sara Ramirez, Tony du meilleur second rôle), ainsi qu’Arnaud Ducret et Andy Cocq, excellents comiques et chanteurs. Enfin, il y a Pef, pour qui le roi Arthur est un rôle sur mesure. Chanteur amateur, il tient sa partition plus qu’honorablement et rattrape ses lacunes vocales par la tête de l’emploi. On le sent parfois réservé, voire intimidé. Aurait-il le trac ou un complexe vocal ? Ou bien est-ce un parti pris de mise en scène, le roi Arthur se laissant souvent déborder par les événements ? Quoi qu’il en soit, Pef n’a aucun complexe à avoir car son projet et sa prestation sont admirables. Il ne manque pas grand-chose pour que, comme le dit la publicité, le Spamalot français soit un spectacle digne de Broadway.
Alors que manque-t-il exactement ? La quête de la perfection, le graal de Broadway. Si l’adaptation du livret est bien réalisée, les chansons, elles, manquent de charme et de surprise, tant dans le fond que dans la prosodie. On rit beaucoup durant les parties jouées mais finalement trop peu durant les parties musicales. En fait, on ne perçoit pas toujours distinctement les paroles, signe que l’adaptation est difficile à chanter. D’autre part, certains moments forts de la pièce originale perdent de leur pertinence. À titre d’exemple, la version américaine débute par un joyeux tableau en Finlande, complètement hors sujet puisque les artistes sont supposés avoir confondu England et Finland, aux sonorités très proches. La transposition en Bretagne au lieu de Grande-Bretagne provoque un décalage moins flagrant du fait des origines celtes communes aux deux régions, à tel point que l’on peut même se demander si un public non averti peut comprendre l’ironie de cette scène. De même, au deuxième acte, le Sir Robin de la version originale déclare qu’un show ne peut réussir sur Broadway sans un juif, trait d’humour éminemment culturel new-yorkais, hilarant sur Broadway mais intraduisible de façon littérale à Paris. Le juif a donc été remplacé par un tube, ce qui n’est pas une mauvaise idée en soi, mais alors, pourquoi avoir conservé le tableau de danses traditionnelles que l’on croirait sorti tout droit du Violon sur le toit et qui perd ici tout son sens ?
Comme le dit la chanson, il faut regarder le bon côté des choses [NDLR : « Always Look at the Bright Side of Life », une chanson phare de Spamalot tirée de La Vie de Brian où elle est reprise en cœur par les brigands condamnés à mourir sur la croix]. Au fond, ce Spamalot français remplit son contrat, celui de nous divertir sans plus de prétention. Nous lui souhaitons le succès populaire qu’il mérite.
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