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Sandrine Seubille

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Sandrine Seubille ©DR
San­drine Seu­bille ©DR

Pou­vez-vous nous par­ler de votre décou­verte de la scène ?
Lorsque j’é­tais petite fille, j’é­tais fascinée par le théâtre tel qu’il était mon­tré à la télévi­sion. Aus­si bien par « Au théâtre ce soir » que par les grandes pièces du réper­toire de la Comédie-Française ! Mon approche a d’ailleurs été presque plus lit­téraire que véri­ta­ble­ment scénique et, du reste, j’ai suivi une fil­ière lit­téraire, aus­si bien à l’é­cole qu’à l’u­ni­ver­sité. Mon père, mil­i­taire de car­rière, ne voy­ait pas d’un très bon oeil les métiers du spec­ta­cle et il me des­ti­nait plutôt à une car­rière libérale ou uni­ver­si­taire qui lui sem­blait plus pres­tigieuse. Mais j’ai quand même pu faire de la danse clas­sique et du piano ! J’ai finale­ment abor­dé le théâtre lorsque mon lycée, que je venais de quit­ter en obtenant mon bac, a ouvert un cours de théâtre. J’ai quand même été autorisée à y aller, et le virus a pris place ! J’ai pu ensuite inté­gr­er, pen­dant mes études de let­tres mod­ernes, le cours d’art dra­ma­tique du Con­ser­va­toire Nation­al de Brest, avec une inten­tion nais­sante de faire car­rière. J’ai même fait mon mémoire de maîtrise, dont le sujet por­tait sur le pas­sage du texte à la scène, sur la mise en scène de Faust par Dominique Pitoiset. Ce mémoire fut ma plongée dans le monde du théâtre !

Et c’est comme ça que vous avez débuté ?
Non pas vrai­ment. Quand j’ai raté l’o­ral du CAPES après avoir eu l’écrit, j’ai décidé de tout arrêter et je suis « mon­tée » à Paris. J’ai passé une audi­tion au cours Flo­rent et suis directe­ment entrée en dernière année. Mais je ne m’y suis pas épanouie car je trou­vais que ça man­quait de for­ma­tion physique et musi­cale. Je me suis alors présen­tée au con­cours d’en­trée à l’é­cole de Jérôme Savary à Chail­lot et y suis restée deux ans. J’y ai ren­con­tré Chris­tiane Legrand et Patrice Peyri­eras qui ont été de véri­ta­bles pyg­malions pour moi. Dès la pre­mière année, j’ai eu un petit rôle dans Nina Strom­boli qui a été mon pre­mier con­trat d’in­ter­mit­tente du spec­ta­cle. Ensuite, j’ai eu la chance de tra­vailler avec Michel Legrand en incar­nant Mist­inguett dans un spec­ta­cle mon­té dans le cadre du cen­te­naire de l’au­to­mo­bile ; j’ai ensuite par­ticipé vocale­ment à la bande orig­i­nale du film La Bûche (de Danièle Thomp­son) ain­si qu’au disque de Ben­jamin Legrand (fils de Michel). Je fus égale­ment retenue pour une fig­u­ra­tion dans Rigo­let­to à l’Opéra-Bastille, et j’en­chaî­nais sur place avec le rôle de la femme de cham­bre de Manon de Massenet inter­prétée par Renée Flem­ming, ce qui m’a lais­sé un très beau souvenir !

Mais alors, plus vrai­ment de théâtre, plutôt du chant…
Oui. J’ai par­ticipé à quelques aven­tures unique­ment théâ­trales, mais c’est plutôt une car­rière de chant que je menais. Comme vous pou­vez le con­stater, je me suis tou­jours épanouie dans l’é­clec­tisme et j’ai vrai­ment mis en pra­tique le chant dans toutes ses formes : chanter avec des orchestres divers, chanter du Piaf pour les Japon­ais (rires), avec l’orchestre du Splen­did, du rétro au Bal du Moulin-Rouge, des textes de Guy Lux sur des musiques de Patrice Peyri­eras, et même du jazz au Petit Jour­nal Mont­par­nasse, etc. J’ai un peu délais­sé le théâtre jusqu’au jour où j’ai réal­isé que je n’é­tais pas vrai­ment sat­is­faite. Je souhaitais trou­ver un com­pro­mis entre théâtre et musique, et je voulais faire par­tie d’une troupe, jouer dans des beaux théâtres, incar­n­er des per­son­nages, etc. J’ai décidé alors de pren­dre des cours avec Pierre-Yves Duch­esne et j’ai bien tra­vail­lé avec lui le réper­toire de comédie musi­cale. Par­al­lèle­ment, je jouais au Théâtre de la Porte Saint-Mar­tin dans les Fables de La Fontaine, puis le Bour­geois Gen­til­homme où je tenais le rôle d’une mar­quise, Dorimène.

Et le Vio­lon arriva…
Oui ! Je n’avais pas été prise pour Non­nesens alors évidem­ment j’é­tais très heureuse d’être retenue. Ma pre­mière comédie musi­cale ! Curieuse­ment, mon rôle est peu chan­tant, mais quel per­son­nage ! C’est un vrai cadeau, un com­pro­mis entre mes pas­sions d’o­rig­ine, je veux dire un texte, un per­son­nage et une inter­pré­ta­tion, et la musique et le chant qui sont inter­venus plus tar­di­ve­ment dans mon parcours.

Il me sem­ble com­pren­dre que le per­son­nage que vous incar­nez, Tzei­t­el, la fille aînée, ne vous est pas totale­ment étranger…
C’est vrai… Le fait qu’elle bous­cule les tra­di­tions me rap­pelle un peu ma pro­pre atti­tude vis-à-vis de mes par­ents, lorsqu’ils étaient facile­ment scan­dal­isés par mes envies. Mais pour moi, avant tout, Tzei­t­el est une grande amoureuse, et c’est son amour qui va véri­ta­ble­ment la motiv­er pour sur­mon­ter le poids des tra­di­tions et surtout du pou­voir pater­nel ; il est fon­da­men­tal pour elle de con­serv­er cet amour qui est d’ailleurs né dès l’en­fance et qui se réalise dans l’âge adulte. Le para­doxe, c’est qu’elle va même insuf­fler à un homme, celui qu’elle aime, le courage d’af­fron­ter ses pro­pres préjugés. Cette his­toire trou­ve vrai­ment un écho dans ma pro­pre vie car je me suis tou­jours battue pour arriv­er à faire ce que j’aime, et cela n’a pas tou­jours été facile.

Avez-vous trou­vé dans l’équipe du Vio­lon cet esprit de troupe qui vous attirait ?
Oh oui ! D’ailleurs mes soeurs dans la pièce (jouées par Amala Lan­dré et Chris­tine Bon­nard) sont un peu dev­enues de vraies soeurs dans la vie… Et j’ai telle­ment d’ad­mi­ra­tion pour Franck (Vin­cent) et Isabelle (Fer­ron) qu’ils incar­nent aisé­ment pour moi une image de par­ents, et je sens un vrai lien qui s’est tis­sé entre nous tous.

Quel regard portez-vous main­tenant sur votre par­cours théâtral ?
Eh bien, chaque soir, quand j’ar­rive sur scène, je me dis que j’ai vrai­ment une chance inouïe ; j’ai une con­science aiguë du chemin par­cou­ru, de la valeur de tout ce que j’ai réal­isé et de ce qui me reste encore à faire. J’ai en par­ti­c­uli­er un faible pour les rôles à forte capac­ité émotionnelle…