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Pierre Notte propose deux nouveaux cabarets

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Com­ment vous sen­tez-vous au lende­main de cette pre­mière (Lire notre cri­tique de Sor­tir de sa mère / La chair des tristes culs) ?
On est assez sec­oués tous les qua­tre, car c’est un moment volatil que l’on pré­pare depuis très longtemps. Bien qu’il s’agisse de deux objets foutraques et légers en apparence, ils néces­si­tent une pré­ci­sion et une rigueur que l’on essaie de respecter tout en restant libres. Le jour de la pre­mière représen­ta­tion, tout se libère. Et ça passe si vite ! Nous sommes claqués, dans tous les sens du terme. On tra­vaille tou­jours pour « la » représen­ta­tion idéale. Nous en avons trente devant nous, le rap­port au temps se mod­i­fie. Aujourd’hui nous accep­tons qu’hier ce ne fut pas la dernière…

Vous avez déjà joué quelques représentations ?
Si nous avons don­né trois représen­ta­tions à Saint-Quentin avant celles du Rond-Point, le dip­tyque présen­té me sem­ble très dif­férent de celui d’hier. Le pub­lic est d’ailleurs fort dif­férent. A Paris, nous sen­tons les gens très atten­tifs au texte sans être démon­stratif, ce qui nous a sur­pris. Lors des pre­mières représen­ta­tions, les spec­ta­teurs de Saint-Quentin se lais­saient davan­tage porter par le spectacle.

Le spec­ta­cle évolue-t-il ?
Il y a des mod­i­fi­ca­tions tous les jours à tous les niveaux. Ce matin par exem­ple je me suis réveil­lé très tôt avec le souhait de chang­er cer­taines tonal­ités dans les airs musi­caux, de manière à ce que les chanteurs soient plus à l’aise. Les rythmes vont bouger ce soir. Je vais aus­si revoir plusieurs lumières. Tout évolue, mis à part le texte. Le dia­logue qui s’établit avec le pub­lic mod­i­fie en tout, dès le début, la représen­ta­tion. C’est très trou­blant et passionnant.

Quelle est l’origine des pièces ?
J’écris unique­ment, sans vouloir paraître pré­ten­tieux, lorsqu’il m’est impos­si­ble de faire autrement… J’aime beau­coup me repos­er, mais quand je suis préoc­cupé ou occupé par un sujet, j’écris. Le por­trait de la mère, la réc­on­cil­i­a­tion de la frère et de la sœur, les liens famil­i­aux avec le père : cela me tra­vaille au corps depuis très longtemps. On retrou­ve ces thèmes dans beau­coup de mes pièces. J’existe (foutez moi la paix) était assez emblé­ma­tique puisque je jouais avec ma sœur Marie avec laque­lle je partage un lien mer­veilleux mais pas­sion­né, com­pliqué et par­fois douloureux. J’essaie de faire preuve d’invention quant à la forme. La chair des tristes culs a été écrite  plus récem­ment, la famille y est plus sec­ondaire. Il s’agit davan­tage de, au final, la réc­on­cil­i­a­tion avec l’amour. Cette pièce est née d’un cha­grin terrible.

Les pièces sont donc personnelles ?
Tout est d’une très grande sincérité. C’est ma mère que vous enten­dez en ouver­ture de Sor­tir de sa mère. Elle répond hon­nête­ment, sim­ple­ment, en une seule prise, aux ques­tions que je lui posées. Poussé par Philippe Minyana, qui ne sup­porte plus que le noir se fasse dans la salle pour un spec­ta­cle, j’ai ten­té d’explorer de nou­velles formes pour cass­er les con­ven­tions sécu­laires de « la représen­ta­tion », surtout dans le cadre d’un cabaret. J’ai choisi le dévoile­ment d’une intim­ité absolue puisque, pour le reste, on ment du début à la fin. Par exem­ple, on joue à être mort alors qu’on ne l’est pas… En revanche quand ma mère dit qu’elle nous a tou­jours inter­dit, à mes sœurs et à moi, d’acheter des dis­ques de Sheila, c’est la pure vérité ! J’étais éton­né qu’elle me réponde cela, à la ques­tion sur ses regrets dans sa vie, au vu de tous les drames que nous avons tra­ver­sés dans la famille. C’est une réponse mer­veilleuse. C’est peut-être pour cela que j’aimerais que mes pièces se ter­mi­nent désor­mais de manières joyeuses, apaisées.

Quel regard portez vous sur le théâtre musical ?
Il me sem­blait que la comédie musi­cale en 2006, lorsque nous nous étions ren­con­trés, n’avait pas encore véri­ta­ble­ment trou­vé son pub­lic (Lire notre inter­view avec Pierre Notte en 2006). Il m’a tou­jours sem­blé voir des chan­sons partout, en tout cas cela va de soi pour moi. Je suis dans la lignée des gens qui ont quelques années de plus que moi : Olivi­er Py, David Lescot, pour ne citer qu’eux. Nous avons voulu exis­ter sur les plateaux de théâtre avec la volon­té d’inventer notre lan­gage, en abor­dant tous les gen­res, en investis­sant le plateau sans dépen­dre de la généra­tion précé­dente, celle des met­teurs en scène tous puis­sants. Olivi­er Py a vrai­ment voulu s’engager et s’impliquer en tant qu’auteur, acteur, chanteur, met­teur en scène, d’une manière nou­velle. Cela m’inspire.

Auteur, met­teur en scène, com­pos­i­teur, acteur : vous aimez vous exposer ?
Je dois dire que cette sit­u­a­tion est liée à une con­trainte finan­cière. Je suis auto­di­dacte au piano, je suis auteur asso­cié au Rond Point, donc par la même je suis très pro­tégé, mais économique­ment je ne peux faire appel à d’autres gens. Je suis donc con­traint de m’exposer. Toute­fois, à y bien réfléchir, cela ne me déplait pas !