Accueil Talent à suivre Patrick-Laurent Martel — Un parfum de Broadway en Vendée

Patrick-Laurent Martel — Un parfum de Broadway en Vendée

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Patrick-Laurent Martel ©DR
Patrick-Lau­rent Mar­tel ©DR

Com­ment est né le fes­ti­val de théâtre de La-Barre-de-Mont Fromentine ? 
Il y a dix ans, le maire de la ville m’a demandé si je pou­vais, en tant que comé­di­en, lui trou­ver quelque chose qui changeait du folk­lore et des trucs sopori­fiques de l’été. Dans la nuit, j’ai trou­vé La Révo­lu­tion Française [de Bou­blil et Schön­berg, 1973] avec l’idée de mélanger des jeunes de Fro­men­tine et des esti­vants. On était en avril, il fal­lait que ça soit prêt pour l’été ! L’idée a plu au maire car on était dans l’an­née du bicen­te­naire. Bien sûr, tout a été fait à la dernière minute… avec qua­tre pro­jecteurs médiocres et qua­tre micros à fils qui s’emmêlaient. On était le 17–18 juil­let 1989. J’avais trou­vé des copains, puis par le bouche à oreille, la troupe est vite mon­tée à 25. Ils ne con­nais­saient pas l’oeu­vre. Cette pre­mière année, je n’avais pas d’orchestre, ni de bande. Ils ont donc chan­té par dessus le disque ! Je ne voulais bien sûr pas de mime ou de play­back. Ils devaient coller leur voix à celles du disque. Ca a fonc­tion­né ! La troupe était con­tente et par­tante pour l’an­née d’après. En plus de cela, comme le spec­ta­cle était financé par la com­mune, il était gra­tu­it pour les esti­vants ! On jouait deux fois par semaine durant l’été, le mer­cre­di et le ven­dre­di. Et ces dates sont restées. Main­tenant, il y a dix micros HF, des tables de mix­age, des con­soles lumières, des pro­jecteurs qui appar­ti­en­nent à notre Asso­ci­a­tion culturelle.

Pour mon­ter un spec­ta­cle comme La Révo­lu­tion Française, com­ment gér­er les prob­lèmes de droits ? 
Tout est règle­men­té, on ne peut pas faire n’im­porte quoi. Je suis en règle avec la SACEM et com­pag­nie … C’est l’as­so­ci­a­tion cul­turelle que j’ai créée quelques années après les débuts qui s’oc­cupe de ça. Elle est aus­si chargée de recevoir la sub­ven­tion munic­i­pale. Pour les droits, même si les spec­ta­cles sont bien mon­tés, nous restons dans une struc­ture d’a­ma­teurs. J’ai donc moins de prob­lèmes que dans une struc­ture pro­fes­sion­nelle. Que je con­naisse ou non les auteurs, je fais une demande à la Société des Auteurs et Com­pos­i­teurs Dra­ma­tiques (la SACD). Comme la SACEM et la SACD sont longs à répon­dre, on a par­fois fini de jouer avant d’avoir la réponse. Pour La Révo­lu­tion Française, j’avais écrit à Alain Bou­blil, qui m’a répon­du « pas de prob­lème » et m’a dit de m’arranger avec la SACD.

Quelles sont les retombées du Fes­ti­val de Fromentine? 
Très pos­i­tives. J’ai eu des retours de Dave et Daniel Auteuil qui sont venus voir God­spell [Ils avaient joué dans une ver­sion française dans les années 70]. Guy Bon­tem­pel­li est venu voir Mayflower. Ces gens là restent sou­vent trois-qua­tre jours pour voir com­ment les choses se passent et faire la fête avec nous. Et dans le pub­lic, il y a sou­vent des con­nais­seurs. Quand nous avons mon­tés Cats, il y avait beau­coup d’é­trangers qui con­nais­saient le spec­ta­cle pour l’avoir déjà vu inter­prété par des pros. Ils nous ont dit avoir passé un excel­lent moment « avec les ama­teurs ». En décem­bre 1998, je suis allé à Leeds car Schön­berg m’avait fait venir pour voir les dernières répéti­tions et la pre­mière de Mar­tin Guerre. Il m’avait invité, après ma ren­con­tre avec Bou­blil juste avant La Révo­lu­tion Française du dix­ième anniver­saire de Fro­men­tine à l’été 98. Ils ne pou­vaient pas venir à Fro­men­tine car tout deux tra­vail­laient à leur nou­velle ver­sion de Mar­tin Guerre. Ils en étaient désolés. Quand j’ai vu Schön­berg, je lui demandé s’il n’avait pas un poste de 25e assis­tant, rien que pour rester en Angleterre. Ca se fera peut-être ! A l’époque de notre Cats (91–92), la mai­son de pro­duc­tion de Andrew Lloyd Web­ber en Angleterre avait égale­ment enten­du par­lé de nos pro­duc­tions. Elle nous a demandé une cas­sette. Il faut savoir que les grands com­pos­i­teurs comme lui sont atten­tifs à l’im­age qu’on donne de leurs spec­ta­cles. Il faut croire que Andrew Lloyd Web­ber était con­tent car depuis j’ai tou­jours eu l’au­tori­sa­tion de mon­ter Cats, même si ma mise en scène n’a rien à voir avec l’original !

Vous avez mon­té Les Mis­érables une pre­mière fois en 1990 en vous bas­ant sur la ver­sion orig­i­nale du spec­ta­cle, mon­té à Paris en 1980 et non pas sur la ver­sion, dev­enue « offi­cielle » de Lon­dres, en 1985 ? 
En effet, et pour moi, elle est supérieure à l’autre. Les per­son­nages sont mieux exploités. Dans la sec­onde ver­sion, le per­son­nage de Gavroche dis­parait pra­tique­ment, il n’in­téresse pas assez le pub­lic étranger. Donc en 1990, je monte la seule ver­sion qui existe à ce moment [En 1991, une nou­velle ver­sion française, traduite depuis l’anglais, a été présen­tée à Paris]. J’avais vu plusieurs fois à l’époque le spec­ta­cle et je l’avais trou­vé super. Je suis un admi­ra­teur de Bou­blil et Schön­berg depuis leurs débuts avec La Révo­lu­tion Française.

En dehors de Bou­blil et Schön­berg, qu’est ce qui vous a attiré à la comédie musicale ? 
Jeune, je m’es­sayais à une car­rière d’au­teur-com­pos­i­teur. Je fai­sais en par­al­lèle une licence de let­tres, le con­ser­va­toire de musique et le Cours Simon de comédie. J’ai tra­vail­lé avec des gens comme Jérome Savary ou René Dupuis [le directeur du Théâtre Fontaine]. Ils m’ont poussé vers le théâtre. J’ai donc arrété d’écrire et de com­pos­er pour m’y con­sacr­er pleine­ment. J’ai mon­té des spec­ta­cles avec des élèves de col­lège et de lycée et je suis vite passé au Théâtre Musi­cal. Je vis main­tenant du méti­er de met­teur en scène. Je ne donne pas de cours, je monte et je dirige des spec­ta­cles. J’ap­porte aux troupes une rigueur et le sens du tra­vail sans perte de temps. En par­al­lèle, j’ai mon activ­ité de comédien.

On con­nait le prob­lème de la comédie musi­cale en France: peu de suc­cès durables, un pub­lic moyen­nement récep­tif. De plus le réper­toire en français est réduit. Com­ment vis-tu tout ça après plusieurs années d’ac­tiv­ité dans ce domaine ? 
Effec­tive­ment, j’ai main­tenant un prob­lème de réper­toire en français. Je ne veux et ne peux pas faire de tra­duc­tion depuis l’anglais des spec­ta­cles que j’aimerais faire. Ca me lim­ite d’au­tant plus que je tiens à faire représen­ter des spec­ta­cles en français avec de bonnes his­toires, et il n’y a pas grand chose de neuf. Par­mi ceux qui exis­tent, je ne monte pas Cabaret par exem­ple parce que j’adore avoir beau­coup de monde sur scène. J’ex­clus aus­si Hair. Ce n’est plus de l’ac­tu­al­ité, ce n’est pas encore de l’His­toire, et je n’ai pas la troupe pour le faire ! Quant à Jesus Christ Super­star, il n’a pas beau­coup de rôles de femmes alors que les troupes ama­teurs sont majori­taire­ment féminines. J’ai aus­si des gens qui me con­tactent pour que je monte la comédie musi­cale qu’ils écrivent. Il y en a une qui m’in­téresse et que j’en­vis­age de faire. Autour de Paris, j’ob­serve que le nom­bre d’ini­tia­tives locales d’a­ma­teurs grandit. C’est une anci­enne de Fro­men­tine qui m’a fait venir en 1997 à Nois­iel (Seine-et-Marne). Il se mon­tait une sec­tion Théâtre Musi­cal dans une asso­ci­a­tion munic­i­pale. J’y ai dirigé Cats, De Lon­dres à Broad­way et dernière­ment God­spell. Aupar­a­vant, en 1995, la per­son­ne qui s’oc­cu­pait de la pro­gram­ma­tion des spec­ta­cles de Fro­men­tine a été nom­mé Directeur de la jeunesse dans la munic­i­pal­ité de Mai­son-Lafitte. Il m’a appelé pour me pro­pos­er de faire la même chose chez lui qu’à Fro­men­tine. Il voulait que je remonte Cats qu’il adore ! Pour finir, la troupe de théâtre ama­teur des Bal­adins de Joinville, dont je m’oc­cupe égale­ment, va mon­ter Mayflower (de Chard­en et Bon­tem­pel­li) en l’an 2000.Pour eux il s’ag­it d’un inter­mède car ils se con­sacrent nor­male­ment au théâtre non musical.

Quel est le pro­gramme de Fro­men­tine cet été? 
Cette année, nous représen­tons à Fro­men­tine Les Mis­érables avec un orchestre en direct. Je vois les musi­ciens toutes les semaines pour suiv­re leurs arrange­ments. Ils sont bien sûr rémunérés par l’As­so­ci­a­tion cul­turelle. Nous faisons nos pro­pres arrange­ments, y com­pris pour les textes que nous pren­drons à notre goût dans une ou l’autre des deux ver­sions. Les bal­lades seront accom­pa­g­nées aux instru­ments sim­ples, les instru­ments plus com­plex­es seront ‘sam­plés’. On jouera Les Mis­érables les mer­cre­di, ven­dre­di et same­di. Les autres jours, on jouera une autre comédie musi­cale inti­t­ulée Monop­o­lis, une pièce de théâtre, 5 min­utes et pas plus, un spec­ta­cle de danse par mon choré­graphe Franck Auvi­gnet sur le thème de Roméo et Juli­ette. Enfin, il y aura un réc­i­tal par les musi­ciens. Ce sont de vrais pros qui ont l’habi­tude d’ac­com­pa­g­n­er des artistes comme Maxime Le Foresti­er ou Maurane..