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Opéra de Massy : Saison 2000–2001

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L'Opéra de Massy ©DR
L’Opéra de Massy ©DR
Quand vous deman­dez à un habi­tant du quarti­er, un ensem­ble HLM de la ban­lieue sud de Paris, où se trou­ve l’Opéra de Massy, il n’est pas tou­jours en mesure de vous répon­dre exacte­ment. A moins que vous ne dis­posiez de l’ar­gu­ment qui tue : « Je sais que c’est situé près de la tour où a habité Tabatha Cash ! » (sic). On peut alors vous l’indi­quer du doigt…

La cul­ture au bout du RER 
Même si à l’heure de la mon­di­al­i­sa­tion, faire sor­tir les Parisiens de leur cité pour les faire aller dans les cités relève tou­jours de la gageure, un voy­age à Massy com­pense large­ment une desserte un peu erra­tique, ques­tion trans­ports com­muns ! Si vous hésitez encore en pen­sant qu’il n’est point de salut au-delà du périph’, tant pis pour vous ! Avec une salle rem­plie à 80% par le pub­lic de la ville et du départe­ment, l’Opéra de Massy prou­ve qu’on peut porter haut les couleurs du lyrique auprès de spec­ta­teurs qui n’au­raient peut-être pas fait non plus le voy­age inverse vers le trip­tyque Bastille-Garnier-Châtelet.

L’Opéra-Théâtre de Massy (puisque tel est son nom com­plet) est un ensem­ble archi­tec­tur­al agréable et sans pré­ten­tion entouré, ban­lieue oblige, d’un petit cen­tre com­mer­cial. C’est surtout une struc­ture qui ne se révèle qu’une fois passée sa façade de verre. L’ensem­ble est beau et con­fort­able et offre un rap­port idéal entre la petite salle (800 places) et l’ensem­ble plateau (500 m²)-fosse (prévue pour 80 musiciens !).

Du point de vue financier en revanche, le rap­port est évidem­ment moins favor­able, d’au­tant que les prix sont main­tenus bas pour tous, et en par­ti­c­uliers pour les Esson­niens ou les abon­nés. « Quant à l’E­tat », rap­pelle Jack-Hen­ri Soumère, le directeur, « il four­nit ‘généreuse­ment’ une sub­ven­tion de… 500 000 francs » sur un bud­get général supérieur à 10 mil­lions de francs… Vin­cent Dela­haye, le maire, devra donc (et tout le départe­ment avec lui) encore longtemps met­tre la main à la poche. Mais, après tout, un opéra dans sa ville, ça change de l’habituel stade de foot pour hooli­gans fas­cisants. D’au­tant que la poli­tique d’ou­ver­ture vers de nou­veaux publics (maisons de quarti­er, cen­tres soci­aux etc.) est par­ti­c­ulière­ment dynamique.

Une sai­son lyrique var­iée mais plus sage 
Mon­sieur le Maire a donc toutes les raisons de se réjouir de la notoriété gran­dis­sante de son vais­seau-ami­ral, notoriété qu’il doit depuis ses débuts il y a sept ans à la pro­gram­ma­tion de son directeur et directeur artis­tique. Comme il le con­cède avec humour : « A Massy, il y a le maire, et il y a le Sou… mère ». Dans la salle en effet, tout en échangeant des potins sur sa con­fir­ma­tion à venir à la tête de Mogador, cha­cun est venu écouter « JHS » (faisons court) présen­ter la sai­son 2000–2001. Elle devrait être « un peu plus sage » que les précé­dentes. Man­i­feste­ment, cer­tains avant-gardismes (la scène finale du Lac d’ar­gent par exem­ple ?) ont eu du mal à pass­er auprès des abon­nés. « Il n’y aura pas de nudité sur la scène cette année », con­firme Jack-Hen­ri Soumère. De la dif­fi­culté de devoir plaire à tous…

Heureuse­ment, cela n’empêche pas la pro­gram­ma­tion annon­cée d’être plus alléchante que jamais. Après un réc­i­tal excep­tion­nel de la grande sopra­no col­orature améri­caine June Ander­son en guise de lever de rideau, les deux temps forts de la sai­son opéra­tique seront les pro­duc­tions mai­son, Le vais­seau fan­tôme de Wag­n­er mis en scène par le jeune Didi­er Karsten et Madame But­ter­fly de Puc­ci­ni par Claire Ser­vais. Mozart (Cosi Fan Tutte), Richard Strauss (Ari­ane à Nax­os) et Tchaïkovs­ki (La dame de pique) seront égale­ment à l’honneur.

Bal­lets clas­siques et tendance 
La musique, grâce à la présence de l’Orchestre de Massy (sous la direc­tion de Dominique Rouits) et de l’Orchestre Nation­al d’Ile de France, ain­si que la danse seront bien évidem­ment présentes.
Au delà des choré­gra­phies clas­siques et néo­clas­siques oblig­ées, on notera avec intérêt la pro­gram­ma­tion de troupes plus con­tem­po­raines, telles celle de l’ibérique Blan­ca Li (que tout le monde s’ar­rache en ce moment !) qui amène la cul­ture de la rue sur la scène des plus grands théâtres avec son Stress (pète pas les plombs). Encore qu’en l’oc­curence, les tags et aures traces de la cul­ture urbaine, il y en a déjà un peu partout autour de l’Opéra ! Quant au Bal­let Rhe­da, inclass­able puisque enchaî­nant choré­gra­phies avant-gardistes et émis­sions de var­iétés télévisées (et même les dans­es du futur Roméo et Juli­ette, de la Haine à l’Amour !), il prend rési­dence à Massy pour trois ans. Rhe­da, dans une ver­sion crâne rasé qui con­traste avec ses récentes appari­tions dread­lock­ées, en a prof­ité pour annon­cer la créa­tion de Noor, deux­ième par­tie d’une série com­mencée l’an dernier avec Seem-City. L’ex­trait qui en a été don­né lors de la présen­ta­tion mon­tre que Massy n’a­ban­donne pas tout à fait — heureuse­ment — le désir de désarçon­ner un peu ses habitués.

Enfin, la pro­gram­ma­tion théâ­trale sera axée autour de quelques gross­es têtes d’af­fiche moliérisées (A torts et à raisons, Un sujet de roman, Paroles [de Jacques Prévert]…) ou de var­iétés (Enri­co Macias, Hélène Ségara…) et un musi­cal, Star­ma­nia.

En 2000–2001, les bonnes raisons ne man­queront pas d’aller à l’Opéra de Massy… que vous con­naissiez ou pas la tour érigée qu’habite Tabatha Cash ! Comme quoi, dans « cul­ture », ce sont les qua­tre dernières let­tres qui font toute la différence !