Oliver Twist : le journal de bord de Betty Lee — Dans les coulisses d’Oliver Twist

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Oliver Twist ©DR
Oliv­er Twist ©DR

21 juin 2002 
Après déjà 99 représen­ta­tions, nous voilà par­tis pour une nou­velle ver­sion 2002 ! Une nou­velle pro­duc­tion et heureuse­ment la même équipe. Par­mi les change­ments impor­tants : une ver­sion instru­men­tale dif­férente ; en fait nous pas­sons d’une ver­sion piano voix à une bande son avec instru­ments mul­ti­ples et arrange­ments nou­veaux. Cinq chan­sons ont été enreg­istrées le 21 juin 2002 ! Superbe fête de la musique !…Stu­dio et ren­con­tre avec Gilles Tinayre, l’arrangeur ! Bons moments de trac, d’é­mo­tions et de découvertes !

Sep­tem­bre
Nous nous retrou­vons tous pour une réu­nion où nous décou­vrons les cinq chan­sons et la nou­velle affiche : « ça déchire ! » … Nous apprenons égale­ment que le 23 octo­bre prochain nous allons par­ticiper à un show case — nous présen­terons trente min­utes d’ex­traits du spec­ta­cle — au Tri­anon , salle où nous jouerons à par­tir de novembre…

20 sep­tem­bre
Retour en stu­dio pour l’en­reg­istrement des autres chan­sons. Gilles Tinayre est déjà en écoute, la pro­duc­tion arrive, la ten­sion monte … Nous com­mençons par « le final ». Nous faisons nos voix ensem­ble, ce qui me ras­sure un peu parce que le trac est là lui aus­si ! Et puis, ça y est, c’est à Gaël et moi, pour notre duo ! Ça passe très vite ! Je regarde Thérèse, la com­positrice qui gen­ti­ment me rassure.

30 sep­tem­bre
Les répéti­tions avec le met­teur en scène, Ned Gru­jic et Frankie Game, la choré­graphe, débu­tent pour le show case…

4 octo­bre
Gaël et moi, sommes con­vo­qués à 11h30 pour tra­vailler la choré­gra­phie du duo de cla­que­ttes. Les pieds sont un peu rouil­lés, voilà plusieurs mois que nous n’avons pas fait cette choré ensem­ble mais peu à peu, tout revient. Le break cla­que­ttes a été adap­té spé­ciale­ment pour le show case et apprenons que nous allons danser celui-ci sans base musi­cale « a capel­la des pieds ! » On se regarde tous les deux : voilà un beau défi ! Et nous recom­mençons encore et encore avec les con­seils de Frankie. Ned, quant à lui nous donne de nou­velles direc­tions pour l’interprétation…

9 octo­bre
Je réé­coute les nou­veaux arrange­ments, demain 15h30 : répéti­tion de chant avec Thérèse. Pour tout dire, la danse, je pense gér­er un peu mieux, mais le chant, c’est un peu plus dif­fi­cile : j’ai un trac ! La peur de faire une fausse note.

19 octo­bre
Je me mets au tra­vail pour maîtris­er les choeurs des deux chan­sons de groupe du show case qui arrive à grands pas. Après une heure à zap­per sur ma chaîne, le doute survient et je décide d’ap­pel­er Thérèse : me voilà en train de lui chanter mes par­ties en direct au télé­phone, « ouf, c’est bien ça ! ». Me voilà repar­tie pour une heure de chant où mes pau­vres voisins, c’est cer­tain, vont con­naître les paroles par coeur !

21 octo­bre
RDV 9h00 pour une grande journée.
Après l’échauf­fe­ment, mise en place des « Nuits de Lon­dres ». Jusqu’à aujour­d’hui, nous avions sou­vent répété par petits groupes, nous voici main­tenant au com­plet ! La pre­mière ten­ta­tive n’est pas très con­clu­ante, je me suis bous­culée dans trois per­son­nes dif­férentes et je ne suis pas la seule…il faut donc retrou­ver nos mar­ques, les place­ments de cha­cun. Nous refaisons encore et encore la choré­gra­phie, en essayant de nous met­tre rapi­de­ment au chant et danse en même temps !
J’ai un petit souci au genou droit qui se bloque par moments : pourvu que tout aille bien. Je me badi­geonne avec de la crème.

22 octo­bre
Nous com­mençons dès 9h00 pour met­tre en place le final, les ques­tions se mul­ti­plient : « est-ce que j’au­rais le temps de me chang­er », « et si j’ou­blie de pass­er à ce moment pré­cis, je ne pour­rais pas retrou­ver ma place pour la choré » « et si, et si… »
13h30 : reprise avec cette fois les deux filages en cos­tumes. Mais avant toute chose, nous revoyons avec Thérèse les voix de toutes les chan­sons du show, nous écou­tons ses derniers con­seils. La ten­sion monte d’heure en heure…ma nou­velle jupe est vrai­ment dif­férente de la pre­mière, plus lourde, plus longue. Frankie et Ned me dis­ent com­ment la tenir et m’aident à trou­ver mes repères.
Il est déjà 16h00 et je dois fil­er pour don­ner mes cours de cla­que­ttes. J’ai des enfants de 7–12 ans et des ados…je suis fatiguée mais l’én­ergie est dif­férente et cela me change l’esprit.
22h30 : me voilà enfin arrivée à la mai­son, mes jambes sont lour­des, ma tête est pleine et je ne peux pas aller dormir : trop nerveuse.

23 octo­bre : le show case 
Ca y est ! Je décou­vre avec plaisir les loges où nous nous instal­lons rapi­de­ment. Le plateau est vrai­ment sym­pa même s’il est un peu en pente, les décors sont fab­uleux : tout est là pour que nous soyons vrai­ment chez nous pen­dant toutes ces représen­ta­tions qui nous atten­dent ! Christophe, l’ingénieur son nous présente son assis­tant qui nous pré­pare nos micros gouttes.
La pro­duc­tion arrive et mal­gré la ten­sion nous plaisan­tons… Il est temps d’avaler un petit quelque chose et de nous pré­par­er : cos­tumes, maquil­lages, micros.
16h00 : c’est l’heure : la ten­sion est au max­i­mum, nous nous embras­sons pour nous souhaiter le meilleur et… musique !
16h30 : c’est déjà fini, nous avons tous cette sen­sa­tion étrange d’avoir été sur scène cinq min­utes : le temps s’est accéléré ! Les applaud­isse­ments nous réchauf­fent le coeur …nous devons main­tenant aller à la ren­con­tre des nom­breux enfants venus aujour­d’hui. Je suis accueil­lie par de nom­breux sourires qui me deman­dent bien gen­ti­ment de sign­er l’af­fiche ou leur petit carnet.
« Tu as vrai­ment cette voix dans la vie ?! »
« Moi, j’aime bien quand tu fais les cla­que­ttes mais c’est trop court »
« Tu es vrai­ment méchante en vrai ? »
J’ai été très touchée par tous ces enfants, nous tous d’ailleurs !

24 octo­bre
Nous com­mençons les répéti­tions pour le spec­ta­cle dans son inté­gral­ité cette fois ! Le texte défini­tif est distribué.

28 octo­bre
Nous essayons les cos­tumes, ceux que nous n’avions pas encore vus !
Nous sommes instal­lés dans une grande salle à Courbevoie, où d’ailleurs nous jouerons le spec­ta­cle en avant-pre­mière le 16 novembre.
Aujour­d’hui, tous les décors arrivent aus­si. Nous pour­rons donc répéter dans les con­di­tions de scène, enfin presque puisque mal­heureuse­ment il n’y a pas de par­quet pour répéter les claquettes !
Toute la semaine, tout s’en­chaîne très vite… Sur le chemin dans la voiture, j’é­coute les chan­sons et j’es­saie de bien repér­er les dif­férentes voix…
Les choré­gra­phies sont main­tenant ter­minées, reste à les assim­i­l­er et à chanter en même temps sans se tromper de voix ! Je par­le pour moi, évidemment…

1er novem­bre
Il est évi­dent que cha­cun de nos per­son­nages a pris un peu plus d’é­pais­seur au fil des répéti­tions. Ma Char­lotte est, je pense, plus piquante, voire plus méchante. Je n’ai pas encore trou­vé ce petit change­ment vocal oblig­a­toire pour les micros (aupar­a­vant, nous chan­tions sans micros) et pour les oreilles du public…mais je ne dés­espère pas ! Cela fait qua­tre ans que je fai­sais cette voix très aiguë et main­tenant je peux faire des nuances. Je dois donc chercher quelque chose de différent.

4 novem­bre
Le tra­vail choré­graphique lui, aus­si s’intensifie…Frankie ren­tre dans le détail de chaque pas, des jeux de tête, des accents et aus­si des intentions.
Nous déb­u­tons la mat­inée par le chant, nous repas­sons dans toutes les chan­sons sans les faire en mou­ve­ment ou dans l’e­space mais juste pour les tra­vailler en justesse, en rythme, avec les accents, les nuances et comme dirait Nathalie [Lher­mitte, qui joue Oliv­er Twist] « les con­sonnes, les con­sonnes !» Elle prend tou­jours le temps de me ras­sur­er ou de me don­ner un con­seil, elle le fait aus­si pour la troupe au com­plet et cela nous aide beaucoup…

5 novem­bre
Les musiques de scène ne sont pas toutes ter­minées mais elles arrivent de façon régulière et sont vrai­ment éclatantes.
Le filage com­mence, il dur­era qua­tre heures, mais nous voilà ras­surés par rap­port aux élé­ments de décors, aux acces­soires. Il nous reste encore beau­coup de tra­vail de rythme, d’ai­sance à avoir. Au fait, ça y est , j’ai réus­si à trou­ver mes petites nuances de voix : un peu moins aiguë, un peu moins hor­rip­i­lante il faut bien le dire…

14 novem­bre
La journée com­mence par des inter­views de jour­nal­istes venus faire un reportage pour un CD Rom « com­ment faire ta comédie musi­cale ? » des­tiné à un pub­lic d’en­fants. Demain, les caméra­men seront là pour filmer la dernière journée de répéti­tions avant l’a­vant-pre­mière Nous écou­tons tous ensem­ble les musiques cor­rigées et donc défini­tives avec grand plaisir.

15 novem­bre
L’équipe tech­nique est là depuis très tôt ce matin. Nous arrivons à 14 h pour les pre­miers essais son en salle. Les décors sont en train d’être mon­tés sous nos yeux ébahis. La scène est superbe, la salle aus­si à part que le plateau est une vraie pati­noire. Nous glis­sons à souhait, je ne par­le même pas des moments de cla­que­ttes où nous avons plus l’im­pres­sion d’être au Trophée Lalique ! Il faut vrai­ment trou­ver une solu­tion pour demain et la seule c’est le fameux mélange coca eau que l’on étalera sur la scène !

16 novem­bre : l’a­vant-pre­mière à Courbevoie 
Nous voilà donc à quelques heures de l’a­vant-pre­mière. Il est temps de se maquiller, de met­tre les micros, les cos­tumes, de s’échauf­fer et se pré­par­er, un petit encas pour éviter de tomber dans les pommes à cause du stress… Le mélange coca eau a été fait, c’est moins glis­sant mais il fau­dra être prudent…
15h50 : Je n’en peux plus, je trépigne… le trac est à son comble pour tout le monde.
16h00 : Nous sommes dans le noir, on vient de nous prévenir que le rideau se lève dans cinq min­utes ! Mes jambes sont lour­des, mes doigts de pieds sont comme anesthésiés, Peg­gy croit défail­lir, Stéphanie a un sourire crispé, Nathalie n’en peut plus, Alain tourne en rond, Gaël ne tient plus en place, Mag­a­li sem­ble calme mais en apparence seule­ment, Patrice remet pour la cinquième fois son cha­peau et sa cape, Fred fait l’id­iot et …ça y est c’est parti.

Entracte : les applaud­isse­ments fusent, nous rangeons ce qui ne nous sert plus dans la sec­onde par­tie, aval­ons un gâteau, un fruit, on s’embrasse et c’est repar­ti ! Le rideau s’ouvre…
Les gens hurlent « Bra­vo » dans la salle, applaud­is­sent à tout rompre et nous portent.
On s’embrasse tous très fort, on se dit « bra­vo » nous aus­si ! Beau­coup d’é­mo­tions dans cette journée déjà finie.
Déjà, l’équipe tech­nique démonte le décor pour le trans­fér­er au Trianon !
Je ren­tre sous une pluie bat­tante , com­plète­ment « trans­portée » et heureuse. Nous sommes tous dans un drôle d’é­tat : heureux et vidés !
2 jours off nous atten­dent et c’est cer­tain nous allons tous beau­coup dormir !

19 novem­bre
Arrivée au Tri­anon à 14 heures ! Ned com­mence par un brief­ing puis instal­la­tion et surtout remise en espace sur le plateau qui est plus petit, beau­coup moins glis­sant mais un peu en pente ! Il faut donc met­tre des « petites butes » pour éviter que les élé­ments de décor sur roulettes ne glis­sent sur le devant de la scène !
Essais son pour cha­cun d’en­tre nous avec un planch­er pas évi­dent pour les cla­que­ttes ! Il faut donc met­tre aus­si des micros scène pour les claquettes !

20 novem­bre : pre­mière au Trianon ! 
Un filage tech­nique est prévu mais avant tout les essais sons com­men­cent, pour les voix mais aus­si les claquettes
Les dégage­ments sont plus réduits, il faut donc s’or­gan­is­er. Le temps passe si vite, il est déjà l’heure de se pré­par­er pour l’heure H : 20h15 !
Et voilà les petits cadeaux de pre­mière, comme le veut la tra­di­tion. Un petit mot , juste quand je suis en train de finir mon maquil­lage, me pro­cure beau­coup d’é­mo­tion. Ce n’est pas le moment de pleur­er, sinon je vais devoir tout refaire ! Je stresse et comme à mon habi­tude le « tu es vrai­ment folle de faire ce méti­er » passe et repasse dans ma tête !
Le pub­lic com­mence à entr­er, nous enten­dons les chu­chote­ments, les rires et l’attente…
La son­ner­ie reten­tit , nous sommes sur le plateau. Nous nous embras­sons, cha­cun fait son petit rit­uel et c’est parti !
Le pub­lic applau­dit et nous rap­pelle. Nous sommes heureux, émus, et quelques larmes coulent sur mes joues…et le « évidem­ment , je sais pourquoi j’aime tant ce méti­er » passe et repasse dans ma tête.
Main­tenant, place à la fête ! Je ne reste pas longtemps, je suis comme vidée. Une petite enveloppe nous attend avec un pro­gramme mag­nifique et LE CD !
C’est incroy­able de jouer dans une comédie musi­cale que l’on aime et avec une telle équipe. Je ne pou­vais pas rêver mieux, c’est cer­tain. Voilà, c’est par­ti pour quelques mois de bonheur…