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Moby Dick (Critique)

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De Jonathan Kerr.
Mise en scène de Erwan Daouphars.
Avec Amala Lan­dré, Lau­rent Mal­ot, Jonathan Kerr.

Résumé : Tel un mata­dor qui se pré­pare à entr­er dans l’arène, le cap­i­taine Achab attend dans sa cab­ine le moment d’affronter Moby Dick. Sur des airs de parade, harpe, accordéon et vio­lon­celle lui offrent sa dernière danse.

Bien­v­enue à bord du Péquod ! Le cap­i­taine vous embar­que dans sa plus belle épopée… mais aus­si la plus som­bre. Il va défi­er son passé, la mort et son équipage pour affron­ter dans un ultime corps à corps la baleine légendaire. C’est à une fête grandiose que vous êtes con­viés, mais que les chants soient guer­ri­ers, féériques ou hyp­no­tiques, sachez que per­son­ne ne sor­ti­ra indemne du voyage…

Notre avis : Jonathan Kerr aime les défis. Après Camille C, il s’at­taque au roman de Her­man Melville en choi­sis­sant de s’in­téress­er au hors champ d’une rela­tion pas­sion­nelle et fatale entre le cap­i­taine Achab et la célèbre baleine. Le romanci­er est per­son­nifié sous la forme d’un nar­ra­teur ain­si qu’une mys­térieuse « Andalouse », sym­bole du des­tin, sorte de psy­ché mortelle, qui dia­logue avec le cap­i­taine. D’emblée la for­ma­tion musi­cale, plutôt inat­ten­due, séduit. Le trio des comé­di­ens chanteurs ne démérite pas. L’ob­ses­sion d’Achab donne une dimen­sion trag­ique et som­bre à un spec­ta­cle pour le moins ambitieux, tourné vers l’in­téri­or­i­sa­tion (non : vous ne ver­rez pas une baleine sur la scène du XXème théâtre ! En revanche il est facile de devin­er sa présence). La con­fronta­tion entre Achab et Ismaël, le marin qui tente de main­tenir un cap face à cet homme déraisonnable, offre de belles scènes, tant chan­tées que jouées. La très charmeuse Amala Lan­dré donne une pro­fondeur à un per­son­nage qui paraît, par­fois, un peu sur­numéraire. En effet les rela­tions qu’elle nour­rit avec Achab sont vite com­pris­es, on en dit presque trop. La mise en scène de Erwan Daouphars plonge le spec­ta­teur dans une ambiance marine avant même que le spec­ta­cle n’ait débuté. Util­isant de manière intel­li­gente un décor sobre, com­posé entre autres de deux miroirs, il parvient sans peine à nous faire entr­er dans la folie du cap­i­taine, habité avec force par Jonathan Kerr. Enfin, même si nous l’avons déjà évo­qué, le trio musi­cal par­ticipe de la réus­site de cette lec­ture per­son­nelle du roman, du mythe, jusqu’à ce que Achab finisse dévoré par les cordes de la harpe, fig­u­rant la gueule immense de Moby Dick.