Accueil Rencontre Michel Lerousseau — Il croque la chouquette à pleines dents !

Michel Lerousseau — Il croque la chouquette à pleines dents !

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Michel Lerousseau ©DR
Michel Ler­ousseau ©DR

Quel est votre par­cours vers la comédie musicale ?
Je chante depuis tou­jours. J’ai roulé ma bosse dans les piano-bars et les cabarets, au départ sur un reg­istre de var­iété à texte comme Jacques Brel, Serge Lama, puis au sein d’un quar­tet de jazz, comme chanteur et pianiste, où j’ai décou­vert Cole Porter notam­ment. Par la suite, j’ai pris des cours d’art dra­ma­tique au Théâtre « Les Enfants Ter­ri­bles » dirigé par Jean-Bernard Fei­tus­si (que je tiens par­ti­c­ulière­ment à remerci­er ici). C’est en m’en­ten­dant chanter dans les couliss­es qu’un de mes pro­fesseurs m’a pro­posé de tenir un rôle dans un spec­ta­cle musi­cal, Smack de Chan­tal Alves. On n’a fait qu’une date au Théâtre du Splen­did pour intéress­er des pro­duc­teurs poten­tiels, mais cette expéri­ence a été ma pre­mière expo­si­tion à la pro­fes­sion. Plus tard, Ned Gru­jic m’a fait con­fi­ance pour le rôle titre dans Mer­lin aux côtés de Nathalie Lher­mitte. Ce spec­ta­cle a tourné près de trois ans dans toute la France. Après, il y a eu la ren­con­tre avec Stéphane Laporte et le rôle de Mor­drach dans Le Vio­lon sur le Toit au Casi­no de Paris et 40 dates en province. Je ne suis jamais allé ni à New York, ni à Lon­dres : c’est Ned Gru­jic qui m’a ouvert la voie de la comédie musi­cale telle qu’elle se pra­tique à Broad­way ou dans le West End. Et bien sûr la lec­ture de Regard en Coulisse… non je ne fay­ote pas, c’est vrai ! (rires)

Et donc, désor­mais, vous êtes dans Panique à Bord
Effec­tive­ment, j’avais la chance de con­naître Agnès Boury qui m’a recruté pour rem­plac­er Gilles Vajou, quelques dates l’an dernier au Vingtième Théâtre et de façon per­ma­nente jusqu’au mois d’août au Théâtre Tris­tan Bernard. Ce n’est jamais une posi­tion très con­fort­able d’être le rem­plaçant dans un rôle tail­lé sur mesure pour l’artiste orig­i­nal. Mais le trio Laporte-Laviosa-Boury est une telle réu­nion de tal­ents que je ne pou­vais man­quer cette occa­sion. Pour moi, la reprise du rôle est loin d’être inin­téres­sante : j’en prof­ite pour faire évoluer le rôle comme je le sens et avec la béné­dic­tion d’Ag­nès. « Fais ton truc », m’a-t-elle con­seil­lé. Il était impens­able de n’être qu’une pâle copie de Gilles, dans ses pro­pres habits et jouant avec sa pro­pre femme ! [NDLR : Angélique Rivoux] De fait, je suis très dif­férent de lui, autant par mon physique que par ma façon d’être. Il est plutôt rond, moi plutôt car­ré, je fais moins clown. Heureuse­ment, le per­son­nage de Pierre Chou­quette est le moins déjan­té de toute la bande, ce qui me con­vient bien. Je suis con­tent du résul­tat obtenu : ceux qui ont vu Gilles Vajou, s’ils revi­en­nent assis­ter au spec­ta­cle, ver­ront un per­son­nage assez dif­férent. Et je suis sûr que Fabi­an Richard, après moi, en inter­prétera encore un autre !

Qu’est-ce qui vous plaît dans la comédie musicale ?
J’aime chanter mais je me con­sid­ère réelle­ment comme un comé­di­en, donc je com­bine mes deux pas­sions. La chan­son sans l’in­ter­pré­ta­tion m’in­téresse moins car je veux faire pass­er un mes­sage, une émo­tion. C’est aus­si la rai­son pour laque­lle le jazz m’a attiré, son côté un peu intel­lo, sa lib­erté de ton, son espace de créa­tiv­ité. Les grandes comédies musi­cales « à la française » ne m’in­téressent pas ; pour moi c’est plus de la var­iété. Le Roi Lion, c’est du grand spec­ta­cle, mais c’est trop léger en thème. J’aime les créa­tions plus théâ­trales : Le Cabaret des Hommes Per­dus et La Valse des Pin­gouins par exem­ple. Féru de reli­gion et de philoso­phie, je suis fasciné par les thèmes graves : la mort, l’hor­reur, l’in­tolérance, la trahi­son, les drames soci­aux… Je ressens le besoin d’ex­primer des idées, pour me libér­er de quelques démons per­son­nels sans doute. Mon rêve absolu serait de jouer Sweeney Todd, vous voyez le genre ?

Avec Panique à Bord et Rab­bi Jacob, n’êtes-vous pas plutôt dans le bur­lesque absolu ?
Rire n’empêche pas de réfléchir ! Au deux­ième degré, les per­son­nages de Panique à Bord sont très pro­fonds. Leurs désirs exac­er­bés, le moteur comique de la pièce, nais­sent de drames intérieurs jamais réso­lus. Con­cer­nant Rab­bi Jacob, saviez-vous que Gérard Oury a fait ce film en pleine Guerre de Kip­pour, en 1973, dans le seul but de mon­tr­er la poignée de main entre Salomon et Sli­mane ? Tout le reste du film dénonce racisme, intolérance et vio­lence, bien enten­du. Il n’y a pas de con­tra­dic­tion entre comédie et émo­tion. Ce qui compte, c’est d’être bien vivant sur scène et d’ex­primer son human­ité et de l’humanisme.

Quels sont vos projets ?
En par­al­lèle de mes rôles dans Panique à Bord et Rab­bi Jacob, je tra­vaille sur mon pro­pre spec­ta­cle que j’en­trevois comme un one-man-show mêlant saynètes et inter­mèdes musi­caux un peu jazzy. Le for­mat adop­té par Denis D’Ar­can­ge­lo pour Madame Ray­monde me con­viendrait. J’ai côtoyé Denis dans Révo­lu­tion l’été dernier aux Musi­cals de Paris, et j’adore ! Comme vous vous en doutez, côté réper­toire musi­cal et ambiance, ce sera très dif­férent ! A suivre…