
Maury Yeston, pouvez-vous nous parler de votre rencontre avec Isabelle Georges ?
J’ai rencontré Isabelle et Frederik (Steenbrink) à Liège lorsqu’elle jouait un des rôles principaux dans Titanic. Elle était merveilleuse et lui aussi et j’espérais travailler avec eux un jour. Plus tard, quand ils sont allés à New York, on s’est revus et j’ai réalisé que j’avais écrit une commande pour Carnegie Hall qui était parfaite pour elle, que ce soit en français ou en anglais.
Qu’est-ce qui vous a incité à écrire une nouvelle chanson pour elle ?
Quand Isabelle m’a parlé d’en faire un one-woman-show à Paris, j’ai adoré l’idée. C’est là que j’ai écrit une chanson supplémentaire pour elle, « Strange », qui me semblait parfaite pour sa version de December Songs. Quand j’ai vu le spectacle à Paris, j’ai tout de suite su que nous allions l’enregistrer. Son CD inclut donc l’œuvre entière en français ainsi qu’en anglais. Nous avons ajouté des instruments à l’accompagnement piano solo de départ, ce qui rend sa version de ces chansons vraiment unique.
Quelle est la genèse de December Songs ?
Quand pour leur centenaire, Carnegie Hall m’a commandé une œuvre, j’ai été très flatté. Ils avaient déjà commandé une symphonie, un concerto, un quartet de cordes… et moi, j’étais la seule commande « non-classique ». Ils m’ont simplement demandé des chansons pour une soirée de spectacle, un ensemble de chansons qui reflèterait l’univers de Broadway et du cabaret pour lequel j’ai tant écrit.
Très vite, j’ai senti que ma contribution devait apporter quelque chose de plus et devait refléter l’identité particulière de Carnegie Hall — une institution qui a offert sa scène a une grande variété d’univers musicaux — mais aussi ma propre perspective en tant que professeur de théorie musicale, musicologue professionnel, et éternel étudiant des grandes figures qui nous ont légué leur héritage musical. Et en même temps, il fallait que cela vienne de l’univers de la musique populaire de divertissement. Après tout, j’étais un Broadway baby ! Je me disais que si tous ces mondes pouvaient co-exister en moi, ils pouvaient très bien co-exister dans une de mes œuvres musicales.
A l’époque, j’enseignais à Yale et généralement, je proposais une étude des grands song cycles de Schumann et Schubert et en particulier, Die Winterreise. Pour moi, rien n’égale ce chef d’œuvre de paroles et de musique — de la brillante et délicate imagerie naturaliste de Mueller à l’extraordinaire portrait que brosse Schubert de la nature (les ruisseaux gelés, le bruissement des feuilles, le battement des ailes d’un corbeau…). Où trouver une situation où le piano est un personnage autant que le chanteur ? Et enfin, quelle leçon brillante nous donnent ces deux hommes — comment donner du relief des chansons de désespoir émotionnel en les contrastant avec des chansons qui rappellent des temps meilleurs ou qui imaginent des visions heureuses mais momentanées.
Quels sont vos projets actuels ?
J’écris actuellement un nouveau musical basé sur le film des années 40, The Lady Eve (Un coeur pris au piège). C’est une comédie romantique très drôle. Je l’écris avec Thomas Meehan (Annie, The Producers, Hairprasy, Death Takes a Holiday).
Isabelle Georges chante Maury Yeston / Broadway au Carré — Jeudi 11 février 2016 à la Comédie Nation (Paris 11)
Relire nos interviews de Maury Yeston en 2000, 2003 et 2009 et 2011.