Installé en France depuis de nombreuses années, Matthew est tombé amoureux de notre pays. Pour l’anecdote, Matthew et Madonna ont été choisis pour accompagner le chanteur Patrick Hernandez (« Born To Be Alive ») à la fin des années 70. Matthew travaille alors en studio, à New York, avec le producteur d’Hernandez, tandis que Madonna est envoyée en Europe. Au bout d’un an, Madonna revient aux Etats-Unis et Matthew arrive en France. Il enchaîne les enregistrements et son single « Der Komissar », version anglaise du titre de l’allemand Falco, est numéro un en France pendant de nombreuses semaines. Il travaille aussi dans des spectacles musicaux, notamment dans Envoyez la musique avec Annie Cordy.
Quand on est Américain et qu’on aime le théâtre musical, n’est-ce pas paradoxal de s’installer en France ?
J’ai été invité à venir en France en 1979 pour travailler sur le disque de Patrick Hernandez et c’était juste la qualité de vie qui m’a plu. J’avais joué, j’avais travaillé, je gagnais très bien ma vie à New York, j’étais très heureux. Mais la qualité de vie en Europe, ça m’a changé d’air. J’étais tellement heureux, je me suis dit que je verrais ce que je pouvais faire. Ca s’est fait de fil en aiguille : ainsi, j’ai travaillé à la télévision sur France 3, j’ai fait du doublage, j’ai joué des petits rôles dans des films, j’ai fait des voix pour des CD-Roms, j’ai fait plein plein de choses comme tous les Américains. C’est la polyvalence qui fait qu’on gagne notre vie ici. Je suis juste heureux d’être un Américain qui vit à Paris. La qualité de vie ici me correspond tout à fait.
Quel genre de théâtre musical préférez-vous ?
J’aime bien le théâtre musical qui raconte une vraie histoire parce que ça nous laisse le temps de nous identifier aux protagonistes. Je sais qu’il y en a beaucoup qui l’ont critiqué, mais moi, j’ai beaucoup aimé Sunset Boulevard.
J’ai vu Chicago que je trouve charmant. Il y a une histoire mais c’est beaucoup plus une revue pour moi. J’aime bien aussi des choses comme Stomp ou Rent. Mais dans Rent, il y a tellement de personnages qu’on n’a pas le temps de rester avec l’un d’entre eux et le suivre. Par exemple, j’ai vu Marlène, avec Siân Phillips, à Paris. Ca, c’était vraiment poignant parce que c’était la vie de cette femme, Marlene Dietrich, avant de rentrer en scène. On était vraiment avec elle de A à Z. Il y a un éventail d’émotions qu’on peut ressentir à travers un personnage qui est vraiment développé. Je préfère ça.
Vous êtes actuellement à l’affiche de Dali Folies. Pouvez-vous nous en parler ?
Dali Folies , c’est une collection de tableaux sur la vie et la folie de Dali, sa rencontre avec Gala, sa femme. On effleure un peu la relation qu’il a eue avec le poète Lorca, sa rencontre avec Picasso, son arrivée aux Etats-Unis dans le milieu des femmes riches qui l’ont aidée à s’épanouir artistiquement. Il y a de très beaux ballets, aussi bien classiques que modernes. Je fais une petite apparition dans la partie américaine où je chante « Stranger In Paradise » qui est en fait un extrait de Kismet. C’est un petit clin d’oeil à Dali qui arrive comme un étranger au paradis : il est enfin reconnu, avec l’argent et le succès qui accompagnent ce moment-là de sa vie. Mais le spectacle est beaucoup plus basé sur sa façon de voir la vie et sur sa façon très originale de se voir lui-même.
Vous préparez également un récital de comédies musicales ?
Oui. En fait, après Le manège de glace à l’Espace Cardin, Mr Cardin m’a demandé de préparer un one-man show sur la comédie musicale en choisissant vingt chansons. Je suis actuellement en studio avec Thierry Boulanger qui avait fait les arrangements de Souingue. Il est en train de me faire des arrangements superbes, je suis vraiment très content. Ce spectacle est prévu pour l’Espace Cardin et aussi pour une tournée cet année. Les dates ne sont pas encore fixées parce qu’on attend la fin de l’enregistrement pour presser les disques, ensuite pour travailler avec le chorégraphe et le metteur en scène, Dominique Boitel.
Parlez-nous des chansons que vous avez choisies ?
Il y aura des chansons adaptées en français. Puisque je suis en France, je vais quand même chanter en français même si j’ai un accent épouvantable ! Il y a quelques adaptations qui ont été faites pour moi et d’autres qui avaient déjà été faites et qu’on utilisera. Il y aura donc « Mr Cellophane » (Chicago), « Luck Be A Lady » (Guys and Dolls), « Stranger In Paradise » (Kismet), « Kiss Of The Spider Woman » du spectacle du même titre, « I Can See It » et « Try To Remember » (The Fantasticks), trois chansons de The Roar of the Greasepaint — The Smell of the Crowd, « Soliloquy » (Carousel), « Something’s coming » (West Side Story), « Where I wanna be » (Chess), « If I Sing » (Closer Than Ever), « Ma vie j’y crois pas » (Le manège de glace), « Pinball Wizzard » (Tommy) ainsi que la chanson-titre de Sunset Boulevard.
Et il y a d’autres chansons en attente… On va mettre des orchestrations inhabituelles sur certaines chansons. Je préfère garder quelques surprises mais je peux carrément dire que je vais faire un peu de rap… On va leur donner une nouvelle vie. Tout est possible dans la musique.
Quels sont vos projets à l’étranger ?
Nous partons à Los Angeles en février 2000 pour y présenter Le manège de glace pendant un mois dans un petit théâtre de 350 places. Ensuite on est en pourparlers pour partir à Tokyo et en Corée. A priori, les dialogues seront en anglais et les chansons en français. Mais ça, c’est encore à développer.
Pensez-vous que la perception de la comédie musicale soit en train de changer en France ?
On me dit beaucoup ça autour de moi, on me dit qu’il y a des choses qui se passent mais je ne sais pas trop. Moi, je prends tout au jour le jour. Pour l’instant, je suis très bien ici. Je fais plein de choses et je me sens très bien comme ça.