
Avant le début de la répétition, nous retrouvons Grégori Baquet dans le foyer du théâtre Hébertot, l’un des plus beaux et des plus chargés d’histoire de Paris. On est bien loin du Palais des Congrès ! Après Roméo et Juliette, il semble heureux de revenir au théâtre avec cette pièce. » Je suis ravi ! » s’exclame-t-il, » je passe d’une énorme production où on était 120 à une pièce où on est une dizaine en tout et pour tout, techniciens inclus. C’est très agréable, on a des rapports très familiaux. La pièce est très bien écrite, c’est une création, et en plus je partage la scène avec Claire Borotra, une comédienne tout à fait ravissante et bourrée de talent et l’extraordinaire Geneviève Casile. » Autre motif de satisfaction pour Grégori : il interprète un pianiste et jouera de cet instrument. » La musique est très importante dans la pièce puisqu’on en parle tout le temps même si la musique jouée sert plutôt de lien entre les scènes. Il y a quelques airs classiques et des mélodies originales composées par Patrice Peyrieras qui a déjà travaillé entre autre sur La Cage aux Folles. C’est un compositeur épatant. Il m’a bien coaché pour me donner la prestance d’un pianiste. Je fais deux heures de piano par jour. En juin et juillet, j’en faisais même plus car je voyais que mon niveau était bien loin derrière ! » Grâce à cette pièce, Grégori espère bien montrer aux professionnels qu’il ne fait pas que du » zim boum boum » mais qu’il est aussi un comédien et un musicien. Toutefois il n’exclut pas de rejouer dans une grosse comédie musicale. » Ce qui est génial c’est de pouvoir passer d’un genre à l’autre, ça permet de relativiser beaucoup les choses ! »
Dans la salle nous rejoignons ses deux partenaires et le metteur en scène Alain Sachs. Celui-ci nous parle avec enthousiasme de La belle mémoire. » Cette pièce raconte une histoire, ça devient de plus en plus rare dans les pièces contemporaines. Il y a un début, un déroulement et une fin. Il est aussi très rare que dans une pièce, théâtre et musique racontent une histoire ensemble. Ici la musique a une fonction dramaturgique, elle est complètement liée à l’histoire. C’est passionnant, ça développe une émotion très forte, c’est une pièce très tendue qui va de choses très drôles et légères à des moments très graves « . Il semble comblé par sa distribution. » J’ai la chance d’avoir trois interprètes exceptionnels à commencer par Geneviève Casile. Elle est le résultat d’une école qui a totalement disparu, d’une maîtrise, d’une technique et d’une virtuosité incroyable. Claire Borotra, c’est une nature extraordinaire, tellement lumineuse, elle renvoie une énergie incroyable sur le plateau. Quant à Grégori Baquet, c’est la chance d’avoir trouvé cet équilibre si compliqué que je cherchais. Il faut que ce soit un excellent musicien sinon on ne croit pas à l’histoire. En plus, il se trouve que Geneviève et Claire jouent aussi du piano, du coup j’en ai profité pour adapter un peu l’histoire initiale et la mise en scène « . Quand on fait remarquer à Alain Sachs que son nom est souvent lié au théâtre musical, il sourit » ma base reste le théâtre mais c’est vrai que mon compagnonnage avec la musique est permanent, essentiellement à travers le Quatuor dont je suis le metteur en scène depuis 12 ans « . A ce propos, le Quatuor reste à l’affiche jusqu’à Noël.
L’ambiance est à la bonne humeur. Geneviève Casile et Claire Borotra titillent gentiment Grégori Baquet sur ses fans de Roméo et Juliette qui viendront nombreuses au théâtre, ce dont il se réjouit car » pour la plupart, ce sera la première fois, si je peux leur faire découvrir autre chose que du TF1, tant mieux ! » Petit conseil aux fans : choisissez vos places dans les premiers rangs côté droit en regardant la scène…
Avant de démarrer la répétition, Alain Sachs explique le programme de la journée » on va privilégier les scènes à trois, on va préciser ce qui a besoin de l’être « . C’est parti pour six heures de travail juste interrompues par une petite pause café. Dans un joli décor que nous ne pouvons pas dévoiler, les trois comédiens rentrent aussitôt dans la peau de leur personnage et les scènes s’enchaînent sous le regard attentif d’Alain Sachs. Debout derrière sa table au cinquième rang, le metteur en scène s’attache au moindre détail, il réalise un véritable travail de précision. Ainsi tout en écoutant ses comédiens, il déplace plusieurs fois un fauteuil l’air songeur jusqu’à trouver le bon emplacement au centimètre près. Il rappelle à chacun la psychologie du personnage, la situation et le sous texte pour aider les comédiens à ajuster l’intention et l’intonation. Il les laisse également suggérer. De nombreux échanges enrichissent le travail. Tout se passe en douceur. A en juger par le résultat, la méthode semble efficace. D’ailleurs les comédiens ne tarissent pas d’éloge sur leur metteur en scène, » Alain Sachs est quelqu’un de très facile, il ne travaille pas dans la douleur et dans l’affrontement, c’est très agréable » se félicite Grégori Baquet. Non content de mettre en scène La belle mémoire, il sera lui-même sur la scène du Petit Hébertot dans Un amour de théâtre, une pièce qu’il a écrite. Avec ce doublé Alain Sachs, voilà une bien belle programmation du côté des Batignolles…