
En entrant dans la salle récemment rénovée du Palais des Sports, nous découvrons face à nous l’immense scène qui s’étend sur toute la largeur. » Avec ses 38 mètres c’est la plus grande ouverture scénique que nous pouvons avoir dans une salle à Paris » nous précise Dove Attia, le co-producteur qui nous accueille et qui nous accompagnera tout au long de cet après-midi.
Un spectacle en cinémascope
Un original cadre de scène elliptique à bordure dorée et rideau rouge a été construit comme pour donner un cachet » classique » au lieu. Ce cadre est placé en retrait de l’avant-scène afin d’offrir une meilleure visibilité aux spectateurs assis sur les côtés. Sa forme renforce également le format cinémascope que les créateurs et producteurs ont voulu donner au spectacle. » Dans la mémoire collective, Autant en emporte le vent est surtout un grand film. Voilà pourquoi nous avons repris tous les codes du cinéma dans la forme » nous explique Dove Attia. Il n’est donc pas étonnant de voir en fond de scène trois gigantesques écrans mobiles d’une longueur totale de 27 mètres. Les deux écrans de part et d’autre de l’écran central sont divisés en trois parties qui pourront s’ouvrir et, en se retournant complètement, laisser place à des miroirs. Pour le moment, rien n’est encore projeté sur ces écrans mais ils permettront de créer les différents décors du spectacle. Comme le souligne Dove Attia, » il était impossible de construire en dur l’intégralité des décors et d’en assurer les changements instantanés sur scène. » Toutefois on aperçoit sur la scène quelques éléments de décor comme une colonnade de maison coloniale dont on teste le mécanisme de montée et de descente. Nous ne les voyons pas tous, certains sont encore dissimulés sous et au-dessus de la scène.
Kamel Ouali, un metteur en scène aux commandes
Kamel Ouali, metteur en scène La répétition va bon train. Sur le plateau, la troupe pratiquement au complet (55 personnes) travaille les premiers tableaux du spectacle. Il s’agit du pique-nique mondain organisé à Tara, la propriété des O’Hara, la famille de Scarlett. Si les artistes ne sont pas encore en costume, les filles portent néanmoins déjà des jupons blancs pour s’habituer à se déplacer et surtout à danser avec les robes (pour certaines à crinoline) qu’elles revêtiront. Les techniciens et assistants vont et viennent sur la scène au milieu des artistes. Ce ballet effervescent est dirigé avec calme et fermeté par Kamel Ouali, metteur en scène et chorégraphe de Autant en emporte le vent. C’est la première fois qu’il s’attelle seul à la mise en scène d’un tel spectacle. Depuis la salle, bandana AUTANT sur la tête, il a l’oeil à tout, n’hésite pas à faire reprendre encore et encore la même scène, à essayer de nouvelles idées. Il sait ce qu’il veut et quand il le faut, bouscule un peu sa troupe. Ainsi, lors de la scène de la déclaration de guerre où les hommes s’emparent un à un d’un fusil, Kamel, agacé, interrompt la scène en leur lançant » eh les garçons, arrêtez d’être tout mou, les fusils c’est pas des parapluies, vous partez à la guerre là, soyez un peu plus dynamiques ! » La troupe n’a pris possession du Palais des Sports que depuis trois jours, auparavant elle répétait dans le gymnase d’un lycée. Kamel doit donc remonter tous les tableaux en tenant compte de la dimension du plateau mais aussi de ses trois niveaux. Cela implique même parfois des changements dans la mise en scène qu’il avait prévue et déjà réglée.
Des scènes de comédie
Soudain la musique s’arrête et un dialogue entre Rhett Butler (Vincent Niclot) et Scarlett (Laura Presgurvic) s’engage. Il s’agit bien d’une scène de comédie. Il faut reconnaître que c’est plutôt inédit dans une comédie musicale » à la française « . Dove Attia s’en réjouit et nous explique » les scènes de comédie sont indispensables à la compréhension de l’histoire, la comédie sera même présente pendant les chansons « . Contrairement aux chansons, les textes parlés sont parfois retravaillés par Gérard Presgurvic au fur et à mesure des répétitions en fonction des besoins de la mise en scène et du rythme du spectacle. Bien consciente qu’à l’exception d’un ou deux, comme Vincent Niclot et Sophie Delmas, les interprètes choisis pour les rôles principaux sont avant tout des chanteurs et n’ont jamais réellement eu l’occasion de jouer la comédie, la production a engagé un coach d’acteurs. Toutefois les scènes parlées n’occuperont pas plus de 10 à 15% du spectacle essentiellement chanté et dansé (28 chansons plus les instrumentaux) qui devrait durer un peu plus de deux heures.
Un filage devant un public-test
Le rythme des répétitions va encore s’intensifier car si les représentations ne commencent officiellement que le 30 septembre, une dizaine de jours avant la première un filage du spectacle sera présenté devant un public-test de 500 personnes. » J’ai repris cette pratique qui se fait beaucoup à Londres » nous confie Dove Attia, » au cours de ce filage, les spectateurs auront un questionnaire à remplir pour donner leur avis sur plusieurs points. A l’issue de la représentation, les questionnaires seront compilés et en fonction des résultats, nous pourrons apporter les modifications nécessaires. »
Après avoir repris plusieurs fois » Etre noir « , la scène où les esclaves se demandent ce qu’ils vont devenir alors que la Guerre de Sécession vient d’être déclarée, Kamel Ouali annonce la pause dîner pour la plus grande satisfaction de la troupe visiblement fatiguée. Mais la pause sera de courte durée, il reste encore trois heures de travail jusqu’à 23 heures !