Livret : Arthur Laurents
Musique : Jule Styne
Lyrics : Stephen Sondheim
Mise en scène : Jonathan Kent
Gypsy raconte l’enfance et les débuts de carrière de Gypsy Rose Lee, une célèbre actrice avant-guerre de « Burlesque » ou strip-tease comme on dirait aujourd’hui. Mais en fait, le personnage central est sa mère, Rose, qui veut faire de ses deux filles des stars du Vaudeville – en plein déclin – avec un acharnement maladif qui finit par désespérer son père, ses maris et surtout sa progéniture chérie. Le show dépeint une personnalité complexe mêlant dévotion maternelle et égocentrisme inavoué. Il part d’une situation burlesque, au sens commun cette fois, où Rose persiste année après année à faire jouer un spectacle parfaitement niais à une troupe d’enfants devenus de jeunes adultes. L’atmosphère devient plus grave à mesure que Rose perd le contrôle des événements jusqu’à laisser éclater son vrai visage, de façon fort pathétique, au numéro final. Le succès de Gypsy repose sur cette histoire forte, aussi passionnante qu’intelligente, contée avec humour et précision sur des musiques aux mélodies inoubliables et des textes affinés au cordeau par Sondheim qui signait là son deuxième succès après West Side Story, deux ans plus tôt.
Le rôle principal étant tellement important et exigent, le show repose traditionnellement sur de très grandes actrices : Ethel Merman à la création en 1959, Angela Lansbury aux revivals de 1973 à Londres et 74 à New York, puis Bernadette Peters en 2003 et enfin Patti LuPone en 2008. Pour cette production du West End, transfert du Chichester Festival où elle a fait l’unanimité l’an dernier, la star est Imelda Staunton, qui enchaîne succès au théâtre et au cinéma. Dans les numéros attendus, elle met la salle en ébullition. Outre son interprétation admirable dans le jeu et la voix, elle laisse aussi la place au reste de la troupe, alors que Patti LuPone « écrasait » un peu ses partenaires à New York. Le spectacle y gagne en profondeur, mettant en valeur l’évolution d’autres personnages. Lara Pulver (Louise), Dan Burton (Tulsa, le danseur) et tous les enfants méritent une mention spéciale. En revanche, la voix de Peter Davison (Herbie) est en-dessous du lot, peut-être à cause d’une gorge endolorie ?
La mise en scène de Jonathan Kent est dynamique. Elle utilise des décors entiers montés sur roulettes qui avancent dans la lumière, pivotent sur eux-mêmes et se retirent dans l’ombre en parfait accord avec l’action. Parfois les acteurs sortent de scène par des trappes mobiles sur le sol. Le passage stroboscopique des enfants à l’âge adulte, évoquant les jours qui passent et se ressemblent, est exécuté de façon brillante. L’autre signature visuelle du show, le final de Rose, est un feu d’artifice, comme il se doit.
Cette production de Gypsy est certainement un événement majeur de la saison.
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