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Les Français de Londres — Le French, c’est chic !

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Sacha Distel dans Chicago à Londres ©DR
Sacha Dis­tel dans Chica­go à Lon­dres ©DR
L’ar­rivée de Sacha Dis­tel dans la pro­duc­tion anglaise de Chica­go fait grand bruit. Partout, des affich­es procla­ment sobre­ment : «Le Chic… Sacha Dis­tel joins Chica­go». Le French est défini­tive­ment chic dans le West End même si ce n’est pas tou­jours évi­dent. «Je crois que les Anglais ont un prob­lème de rival­ité avec les Français», racon­te Sacha Dis­tel. «Il y a eu le coup de Notre Dame de Paris et de Lautrec. Comme ça été lancé en grande fan­fare, il y a eu un retour de bâton et ils ont mas­sacré les spec­ta­cles unique­ment parce qu’on en a fait une trop grosse cam­pagne, alors que la qual­ité est là. Pour moi, c’est dif­férent. Les Anglais me con­nais­sent depuis longtemps et m’ai­ment bien. Je n’ai jamais fait de guerre ! Je tra­vaille ici parce qu’ils ont des publics mag­nifiques. Je reçois des let­tres de félic­i­ta­tions de spec­ta­teurs».

Jérôme Pradon : un French lead­ing man
Si Sacha Dis­tel jouis­sait déjà d’une cer­taine célébrité avant d’in­té­gr­er le West End, d’autres artistes moins con­nus ont tra­ver­sé la Manche pour mon­tr­er aux Bri­tan­niques que la France pou­vait exporter autre chose que du cham­pagne et des car­rés Her­mès. Jérôme Pradon par exem­ple. En 92, à peine sor­ti de la pro­duc­tion parisi­enne des Mis­érables, Jérôme rejoint la troupe anglaise de Miss Saigon, où il inter­prète Chris, un GI améri­cain. «Les gens m’ont assez gen­ti­ment accueil­li, il y avait peut-être une espèce d’amer­tume mais je ne m’y arrê­tais pas. De plus, ça été suff­isam­ment dur pour moi parce que ça a été un choc cul­turel énorme, il a fal­lu s’adapter… Et puis, le rôle était très dép­ri­mant» se sou­vient Jérôme. Quant au tra­vail en soi, «tant que tu fais ton boulot, ça va, mais tu as intérêt à le faire bien. C’est un milieu très dur où il n’y a pas de place pour la médi­ocrité» ajoute-t-il.

En 96, il frappe un grand coup en inter­pré­tant Guil­laume dans la dis­tri­b­u­tion orig­i­nale de Mar­tin Guerre, inau­gu­rant ain­si le club très fer­mé des artistes ayant joué des rôles majeurs dans les trois comédies musi­cales de Bou­blil et Schön­berg. Aujour­d’hui, Jérôme a intè­gré une nou­velle famille, celle d’An­drew Lloyd Web­ber. A l’af­fiche de Whis­tle Down the Wind et de la vidéo de Jesus Christ Super­star, il est le lead­ing man le plus cou­ru du moment. «Ca a pris du temps, il a fal­lu faire des preuves qui ont été Mar­tin Guerre, Killing Rasputin, deux ou trois télés… C’est main­tenant que je suis con­sid­éré comme un lead­ing man dans le West End. J’en arrive à un point où je suis con­nu ici mais j’aimerais bien tra­vailler en France aus­si !».

La lumière au bout de (l’Euro)tunnel
Olivi­er Rey et Mar­tin Matthias, eux, ont quit­té la France il y a trois ans pour venir s’in­staller à Lon­dres. «A l’époque, on en avait un peu marre de Paris, il n’y a des comédies musi­cales que tous les six mois et tu galères pour être payé, alors on s’est dits, pourquoi ne pas essay­er d’aller tra­vailler à Lon­dres» explique Mar­tin. A Paris, on avait pu les voir tous les deux dans Cats, Peter Pan ou Bar­num, ain­si que dans Hello,Dolly ! (aux côtés de Lil­iane Mon­tevec­chi) pour Olivi­er et Mayflower pour Mar­tin. Aujour­d’hui, Mar­tin joue dans Starlight Express d’An­drew Lloyd Web­ber et donne des cours de danse au pres­tigieux Pineap­ple Dance Stu­dios et au Lon­don Stu­dio Cen­ter tan­dis qu’O­livi­er a fini La Belle et la Bête cette année.

Très vite, ils décrochent un con­trat dans un spec­ta­cle inti­t­ulé What a Feel­ing et déci­dent de s’in­staller pour de bon. L’in­té­gra­tion se fait donc douce­ment mal­gré d’oc­ca­sion­nels com­men­taires désagréables. «Ils n’ai­ment pas trop les étrangers», souligne Mar­tin. «On a par­fois des réflex­ions de la part de cer­tains artistes comme quoi on pique le boulot de quelqu’un mais à par­tir du moment où on est meilleur qu’un autre…».

Ces rares réflex­ions ne les empêchent pour­tant pas d’ap­préci­er Lon­dres. «Ici, les con­di­tions sont bien meilleures. C’est quand même for­mi­da­ble de chanter en direct, même quand on est dans le cho­rus, et d’avoir un vrai orchestre chaque soir. Par con­tre, les artistes sont plus blasés. Ils enchaî­nent spec­ta­cle sur spec­ta­cle. Ils ne se bat­tent pas comme en France. Là bas, il y a une énergie par­ti­c­ulière. On défend son spec­ta­cle jusqu’au bout» ajoute Olivier.
Et même si Paris, les copains et la bonne bouffe leur man­quent par­fois, leur vie anglaise sem­ble par­faite­ment les combler. «On ne regrette pas d’être venus à Lon­dres, ça reste tou­jours exci­tant. Il y a quelques années, on venait y voir des spec­ta­cles et ça nous fai­sait rêver. On n’au­rait jamais cru qu’on se retrou­verait sur scène aux côtés de Bernadette Peters, Anto­nio Ban­deras [dans Hey Mr Pro­duc­er et Andrew Lloyd Web­ber Cel­e­bra­tion pour Mar­tin] ou John Bar­row­man [dans La Belle et la Bête pour Olivi­er]» expliquent-ils.
Le rêve est par­fois à l’autre bout du tun­nel (sous la Manche). Après tout, n’est-ce-pas le mes­sage que chante Mar­tin tous les soirs dans Starlight Express ? «There’s a light at the end of the tunnel…».