Accueil Critique L’Envers du décor (Critique)

L’Envers du décor (Critique)

0

Un spec­ta­cle de et mis en scène par Flo­rence Andrieu & Flan­nan Obé.
Col­lab­o­ra­tion artis­tique : Serge Gaborieau.
Choré­gra­phies : Estelle Danière & Philippe Fialho.
Avec : Flo­rence Andrieu, Flan­nan Obé & Yves Meierhans.

Elis­a­beth et Frédéric, chanteurs lyriques, se retrou­vent engagés dans un réc­i­tal, sept ans après leur sépa­ra­tion. Dans l’urgence d’une représen­ta­tion à assur­er coûte que coûte, une course folle s’engage entre les couliss­es et la scène, qui mêle duos d’amour et règle­ments de comptes.
Un diver­tisse­ment lyrique et atyp­ique qui joue à fond la carte de la dérision.

Notre avis : Qu’ils ten­tent (ou qu’ils évi­tent) de régler en couliss­es leur anci­enne his­toire d’amour à coup de fausse séduc­tion et de répliques cinglantes, ou qu’ils soient oblig­és de com­pos­er en scène le cou­ple idéal de l’opérette en forçant leurs sourires et leurs pos­es con­v­enues, on rit beau­coup des retrou­vailles entre Elis­a­beth (Flo­rence Andrieu) et Frédéric (Flan­nan Obé). Dans un décor et des lumières ingénieux qui per­me­t­tent de pass­er sans rup­ture de l’intimité des loges aux feux de la rampe, les dia­logues per­cu­tants, le chant épanoui et les dans­es endi­a­blées imposent leur énergie débor­dante à cette pétil­lante comédie en musique.

En répéti­tion avant d’entrer sur la fausse scène, les paroles des solos et des duos extraits des meilleures opérettes français­es (mais vien­nois­es aus­si) vien­nent insi­dieuse­ment s’insinuer dans la rela­tion entre les per­son­nages qui oscil­lent entre querelles, sar­casmes et désir ressus­cité : « Jalousie » de Mau­rice Yvain (Chan­son gitane), « C’est ça la vie, c’est ça l’amour » et le tor­ride « Sous les palé­tu­viers » de Moïse Simons (Toi, c’est moi), « J’ai deux amants » d’André Mes­sager (L’Amour masqué), le duo de la Mouche de Jacques Offen­bach (Orphée aux enfers)… et même un « Sem­pre lib­era » de La Travi­a­ta de Ver­di, martelé en forme de vocalis­es. Les sit­u­a­tions tru­cu­lentes sont portées par de nom­breux gags hénau­rmes et irré­sistibles de drô­lerie, d’où émer­gent aus­si quelques moments plus légers de ten­dresse et de nostalgie.

Après son réc­i­tal-spec­ta­cle de haute tenue au XXe Théâtre en décem­bre 2011, Flan­nan Obé excelle ici en ex obligé de sup­port­er les caprices de sa parte­naire et fait des étin­celles dans son numéro de clown, tan­tôt amoureux recon­quérant, tan­tôt roi de la mal­adresse encom­bré de grotesques cos­tumes ou d’impossibles acces­soires. Flo­rence Andrieu incar­ne avec tal­ent une diva des salles des fêtes mi-despote mi-bêcheuse mais qui, au fond, n’en mène pas large et en pince encore pour son parte­naire. Tous deux exé­cu­tent avec brio leurs par­ties vocales et s’en don­nent à cœur joie dans des choré­gra­phies par­ti­c­ulière­ment auda­cieuses. Yves Meier­hans, en plus d’accompagner avec panache depuis son piano, campe en quelques répliques son per­son­nage de souf­fre-douleur avec justesse.

Depuis qua­tre ans que ce spec­ta­cle existe et tourne dans l’Hexagone (voir l’in­ter­view que Flan­nan Obé nous a accordée et notre cri­tique au Off d’Avignon en 2010), on se réjouit que L’Envers du décor s’installe enfin à Paris dans un for­mat qui a encore gag­né en rythme et en pré­ci­sion. Voilà donc pour nos froides soirées d’hiver un spec­ta­cle musi­cal drôle et enlevé, porté par de tal­entueux artistes et dont on sort enjoué, avec l’irrésistible envie de chanter et de danser.

Bande-annonce.