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Le phénomène Chance

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Chance ©DR
Chance ©DR

Alors qu’Hervé Devold­er ter­mi­nait son one-man show, Un homme à l’amour, au Lucer­naire, l’op­por­tu­nité de repren­dre Chance dans la foulée est apparue. « Les artistes de la troupe en avaient vrai­ment envie » nous explique l’au­teur-com­pos­i­teur, « alors là on s’est dit oui mais au Lucer­naire, on ne peut pas faire de bruit car il y a une deux­ième salle, très bien on enlève les micros, ah oui mais on ne peut pas met­tre le décor, très bien on allège le décor. C’est comme ça qu’est venue la ver­sion acous­tique, pour le plaisir de con­tin­uer ». Une ver­sion qui le sat­is­fait pleine­ment, « on est plus près du théâtre, les spec­ta­teurs voient les artistes à quelques mètres d’eux. Sans micro, donc la vibra­tion de la voix arrive directe­ment dans l’or­eille sans pass­er par l’élec­tron­ique. »
Cette impres­sion est d’ailleurs partagée par les artistes que nous avons ren­con­trés. Ain­si, Lau­rent Ban appré­cie d’être suivi par deux musi­ciens et de ne pas avoir une bande son figée une bonne fois pour toute. Pour Jérôme Pradon, « le fait qu’il n’y ait pas cette bar­rière de la sonori­sa­tion entre nous rend les choses très sym­pa­thiques, très immé­di­ates, très proches ». Et comme le souligne avec humour Chris­tine Kan­del, « si nous n’é­tions que des chanteurs de stu­dio, on pleur­nicherait de ne pas avoir de micro sous le nez, mais nous sommes aus­si des comé­di­ens ! »

Comme la déci­sion de repren­dre Chance s’est prise pra­tique­ment à la dernière minute, il s’est avéré que des inter­prètes de la troupe orig­i­nale, qui avaient déjà des engage­ments par ailleurs, ne seraient pas disponibles tous les soirs. Il a donc fal­lu trou­ver des alter­nants. « Ca s’est fait vrai­ment par con­nais­sance et affinité, et sou­vent par l’en­vie des gens de faire par­tie de l’aven­ture » racon­te Hervé Devold­er. Et tous les artistes approchés ont accep­té immé­di­ate­ment et avec ent­hou­si­asme ! Face à cet engoue­ment, il avance mod­este­ment une expli­ca­tion. « On dis­tingue le théâtre d’ac­teur et le théâtre d’au­teur. Chance c’est du théâtre d’ac­teur musi­cal. Etant acteur moi-même, je pense que mon écri­t­ure cor­re­spond à l’en­vie et au besoin qu’a un inter­prète sur scène. Les comé­di­ens s’a­musent à jouer Chance parce que c’est écrit pour eux, c’est un canevas, une porte ouverte à s’ex­primer, à faire son numéro. »
Si les artistes récem­ment engagés soulig­nent à l’u­na­nim­ité la qual­ité de l’écri­t­ure du livret et de la musique, l’hu­mour décalé au « énième » degré, ils voient bien d’autres raisons au pou­voir attrac­t­if de Chance et à leur moti­va­tion de rejoin­dre la troupe. Ils appré­cient par­ti­c­ulière­ment de retrou­ver le sim­ple plaisir de jouer en s’a­mu­sant avec des copains, l’oc­ca­sion de côtoy­er des artistes qui vien­nent d’autres hori­zons, l’én­ergie et la générosité qui éma­nent de ce spec­ta­cle. Ain­si Edouard Thiébaut par­le de « bonne humeur com­mu­nica­tive qui donne réelle­ment envie de faire par­tie de l’équipe ». Jérôme Pradon, arrivé de Lon­dres, s’ex­clame « Chance, c’est un ‘feel­go­od’ spec­ta­cle ! Enfin quelqu’un qui s’in­spire de toutes ces tra­di­tions qu’on a en France et qui ne sont plus du tout exploitées » avant de soulign­er, tout comme Lau­rent Ban, « on en a tous marre d’un cer­tain type de spec­ta­cle musi­cal français, des gross­es pro­duc­tions qui man­quent sou­vent de qual­ités artis­tiques. » En réac­tion à ce ras le bol, Chris­tine Kan­del et Alyssa Landry se félici­tent que Chance soit « une vraie comédie musi­cale avec une his­toire et des per­son­nages aux­quels on s’at­tache, qui allie vrai­ment théâtre et musique » et man­i­fes­tent leur envie de soutenir ce genre de spec­ta­cle orig­i­nal et créatif. « C’est presque un retour aux racines, à ce pourquoi on fait et on aime ce méti­er » renchérit Lau­rent Ban dans un élan lyrique !

Deux ou trois artistes alter­nants par rôle, cela représente un grand nom­bre de com­bi­naisons à gér­er. Mais, pour Hervé Devold­er, ce n’est pas une dif­fi­culté. « La mise en scène est très pré­cise, depuis le temps qu’on le joue, tout est réglé au quart de poil » explique-t-il, « quand un nou­v­el inter­prète arrive, je lui mon­tre pré­cisé­ment tous ses déplace­ments. Mais ensuite, à l’in­térieur de ce cadre, il peut libre­ment s’ex­primer et apporter sa pat­te. Cha­cun amène sa per­son­nal­ité. » Il ne voit que du posi­tif dans ce principe de l’al­ter­nance. « C’est un vrai bon­heur. C’est tou­jours nou­veau, tou­jours réin­ven­té » se réjouit-il, et de s’en­t­hou­si­as­mer « là, on vit une chose excep­tion­nelle, on a une ambiance de troupe où on se fait vrai­ment plaisir, où tous les soirs il arrive un petit imprévu. On est en train de se fab­ri­quer des futurs vieux sou­venirs ! »
Un ent­hou­si­asme que parta­gent ses inter­prètes. « C’est très enrichissant de partager la scène avec des parte­naires dif­férents selon les jours, je déteste la rou­tine » nous dit Lau­rent Ban et de rajouter en riant « avec tous ces alter­nants et la com­plic­ité qu’il y a entre nous dans nos impro­vi­sa­tions, ça me fait penser un peu dans l’e­sprit à la mythique troupe du Splen­did ver­sion chan­tée ». Opin­ion partagée par Chris­tine Kan­del qui rajoute « Hervé a créé une chaîne mag­ique ». « Le principe de l’al­ter­nance per­met de con­serv­er une cer­taine fraîcheur au spec­ta­cle » pré­cise Jérôme Pradon. « C’est le moyen de con­tin­uer à faire vivre le spec­ta­cle » se félicite Alyssa Landry, « Hervé aura tou­jours un réseau d’artistes pour repren­dre le spec­ta­cle au pied levé ! »

Si Chance a un pou­voir attrac­t­if sur les artistes du théâtre musi­cal, le spec­ta­cle sem­ble avoir égale­ment un effet eupho­risant sur le pub­lic qui l’ac­clame tous les soirs. On note déjà un cer­tain nom­bre d’in­con­di­tion­nels qui revi­en­nent régulière­ment voir le spec­ta­cle, ne serait-ce que pour décou­vrir les dif­férents alter­nants sur chaque rôle ! Ravi, Hervé Devold­er a le sen­ti­ment de rem­plir sa mis­sion « de dis­traire le pub­lic au sens éty­mologique du terme, le sous­traire de ses préoc­cu­pa­tions du moment ». Et comme le fait remar­quer Lau­rent Ban, « Chance a toutes les capac­ités pour devenir un spec­ta­cle culte. La longévité est là, les spec­ta­teurs sont ent­hou­si­astes à chaque fois, il y a des scènes qui sont de vraies per­les et qui pour­raient effec­tive­ment devenir cultissimes ! »

Face à cet ent­hou­si­asme général, Chance n’est pas prêt de s’ar­rêter. Pour l’in­stant, le spec­ta­cle pro­longe au Lucer­naire pour au moins tout l’été. « On a envie de con­tin­uer, on ne s’est pas fixé de date lim­ite » sourit l’heureux maître d’oeu­vre de ce phénomène avant de nous con­fi­er un scoop « on est en pour­par­lers pour l’adapter en télé­film, ça devrait se faire l’an­née prochaine, mais aucun con­trat n’est encore signé ». Autre scoop, il nous annonce sa nou­velle comédie musi­cale pour la ren­trée 2006 et accepte volon­tiers de nous en dire plus « ce sera une beau­coup plus grosse machine, il y aura vingt rôles ! Tout ne sera pas chan­té, il y aura aus­si des dia­logues par­lés. L’his­toire sera beau­coup plus con­sis­tante que dans Chance mais ce ne sera pas très sérieux non plus ! »