
Tout d’abord emprunter le passage Pommeraye ou tout du moins sa réplique qui vous accueille avec ces grandes photos illustrant les différents films du cinéaste. Le ton est donné : l’univers magique de Jacques Demy s’ouvre à vous dans cette exposition qui retrace sa carrière. Présentée de manière chronologico-thématique, cette présentation organisée par Matthieu Orléan avec la grande complicité de toute la famille Varda-Demy donne rapidement envie de chanter. La première salle évoque la jeunesse, les premiers dessins, la lettre enflammée à Christian Jacque qui, impressionné à juste titre par les premiers courts métrages de l’adolescent (que l’on peut voir, joliment présentés dans la micro salle de cinéma située dans la cuisine du garage Demy, telle que l’avait imaginée le cinéaste) pèsera pour qu’il puisse entamer des études de cinéma. Et heureusement pour nous !
La scénographie reproduit une rue de Rochefort, les papiers peints des Parapluies titillent l’œil. De nombreux souvenirs de tournage : scripts annotés, photographies, disques, partitions, costumes, donnent du relief à la déambulation de chacun, destiné à faire revivre de manière intime et délicieuse les rapports si particuliers que tous les spectateurs entretiennent avec les films du cinéaste. Et une excellente source de curiosité pour les jeunes générations qui auront le plaisir de découvrir une œuvre qui devient intemporelle. Quelques éléments attirent forcément l’attention, comme les actrices et acteurs pressentis pour différents films. Surprises garanties !

L’un des points forts de cette exposition est de mettre en relation les films avec des oeuvres qui les ont inspirées, à l’instar de la toile de Dufy « La baie des anges » qui inspira le film du même nom. Présente tout au long du parcours du cinéaste, sa femme Agnès Varda n’a pas manqué de photographier ou filmer les vedettes, les moments de doute, de joie : des témoignages précieux.
La découverte de Harrison Ford, premier choix pour figurer dans Model shop, mais qui fut refusé par les producteurs de la Columbia qui lui ont conseillé de renoncer à devenir comédien, constitue un étonnement pour nombre de visiteurs. Car Demy a passé du temps à Los Angeles, ce qui influença notablement son oeuvre : flower power et liberté sont, entre autres, au centre de Peau d’Ane. Les innombrables fans de ce film pourront s’imaginer dans les robes de princesse dont les répliques figurent en bonne place, ou protégés par la véritable peau qui servit au film. Dans ce petit décor reconstitué ne manquez pas la baguette magique, le perroquet, le téléphone et surtout la rose au clin d’oeil… Pour les plus gourmands, un cake d’amour (heureusement réalisé en s’affranchissant de la recette du film) a été confectionné pour l’occasion, avec la bague de la princesse à l’intérieur. Tentez donc votre chance…

Il est aussi question de découvrir d’autres aspects de l’homme, touche à tout à l’instar de Cocteau qu’il admirait tant. Ainsi plusieurs de ses toiles sont présentées dans le « demy monde », ainsi qu’une série de photos. Un regret toutefois : que l’exposition n’ait pas présenté les œuvres non abouties, les projets sur lesquels le cinéaste a travaillé. Imaginer les films que l’on ne verra jamais aurait sans nul doute ajouté une rêverie supplémentaire pour tous celles et ceux qui apprécient cet univers si particulier.
Toutefois cette exposition, promise à un bel avenir, permet de se replonger avec tendresse, émotion et plaisir dans un pays coloré où les fées discutent avec les demoiselles, où le drame n’est jamais loin mais se colore toujours de teintes qui le subliment.
Pour plus d’informations, consultez le site de la Cinémathèque.