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Le Bizarre Incident du chien pendant la nuit (Critique)

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bizarre-incidentd’après le roman de Mark Haddon
adap­ta­tion Simon Stephens
mise en scène Philippe Adrien
texte français Dominique Hollier

avec
Pierre Lefeb­vre — Christopher
Juli­ette Pois­son­nier — Siobhan
Sébastien Bravard — Ed (le père de Christopher)
Nathalie Vairac — Judy (la mère de Christopher)
Bernadette Le Saché — Mme Alexander *
Mireille Rous­sel — Mme Shears *
Lau­rent Mon­tel — Roger (M. Shears) *
Lau­rent Ménoret — Policier *
Tadié Tuéné — Révérend Peters *
* Ces artistes interprètent
égale­ment les per­son­nages du chœur.

décor Jean Haas
lumières Pas­cal Sautelet
assisté de Maëlle Payonne
vidéo Olivi­er Roset
assisté de Michaël Bennoun
musique et son Stéphanie Gibert
assistée de Farid Laroussi
cos­tumes Cidalia Da Costa
assistée de Anne Yarmola
maquil­lages Pauline Bry
choré­gra­phie Sophie Mayer
direc­tion tech­nique Mar­tine Belloc
et Erwan Creff
col­lab­o­ra­tion artis­tique Clé­ment Poirée
habil­lage Emi­lie Lecheval­li­er et Françoise Ody

Résumé : Christo­pher Boone, quinze ans, pos­sède une intel­li­gence et une logique impa­ra­bles ; il aime les listes, les plans et la vérité, et c’est un fan de Sher­lock Holmes ; mais tout seul il n’est jamais allé plus loin que le bout de sa rue. Il réus­sit des exer­ci­ces de math­é­ma­tiques très dif­fi­ciles et com­prend la théorie de la rel­a­tiv­ité. Ce qu’il ne com­prend pas, ce sont les autres êtres humains. À part Siob­han — qui suit sa sco­lar­ité et l’aide à écrire ce réc­it, et son père — qui con­naît ses trou­bles com­porte­men­taux, les autres sont pour lui comme des étrangers… Lorsqu’il décou­vre le chien de sa voi­sine transper­cé d’une fourche, Christo­pher décide de retrou­ver le meur­tri­er et son enquête l’entraîne dans un véri­ta­ble par­cours ini­ti­a­tique… Son sens de l’observation, la rigueur de sa pen­sée, l’absence totale de duplic­ité sont pro­pres à débus­quer men­songes et lâchetés. Les adultes n’ont qu’à bien se tenir… Ce petit chef‑d’oeuvre d’imagination et de sus­pense nous intro­duit aux émo­tions et aux ver­tiges d’un jeune garçon autiste pour qui « le monde est plein de choses évi­dentes que per­son­ne ne remar­que. » Un autre regard sur notre réalité…

Notre avis : Inso­lite et cap­ti­vant, Le Bizarre Inci­dent du chien pen­dant la nuit, le best sell­er de Mark Had­don, con­naît actuelle­ment un beau suc­cès sur les scènes inter­na­tionales, dans une adap­ta­tion de Simon Stephens. A Lon­dres et à New York, la pièce tri­om­phe (sept Lau­rence Olivi­er Awards, cinq Tony Awards) dans une mise en scène ver­tig­ineuse de Mar­i­anne Elliott. A Paris, c’est Philippe Adrien, directeur du Théâtre de la Tem­pête, qui nous pro­pose sa vision de l’œuvre, épurée, élé­gante, gorgée de poésie, d’é­mo­tion et d’humour.
L’ac­tion se situe en Angleterre et démarre lorsque Christo­pher, un jeune ado­les­cent de quinze ans, décou­vre que le chien de sa voi­sine a été tué avec une fourche. Accusé à tort dans un pre­mier temps, il se fixe l’ob­jec­tif de trou­ver le coupable. Mais Christo­pher n’est pas un ado­les­cent comme les autres ; en effet, il est autiste et ses trou­bles com­porte­men­taux cohab­itent avec son génie math­é­ma­tique. L’o­rig­i­nal­ité de l’œuvre (le roman comme la pièce) est de se plac­er de son point de vue. Philippe Adrien cite Kaf­ka : « C’est quand le théâtre rend réelles des choses irréelles qu’il atteint ses plus grands effets. La scène devient alors un périscope de l’âme qui éclaire la réal­ité de l’intérieur. » Avec moins d’ef­fets tech­nologiques qu’à Broad­way mais avec une grande portée émo­tion­nelle, le met­teur en scène nous immerge avec bon­heur et ten­dresse dans l’u­nivers de l’ado­les­cent : ses rêves, ses doutes, ses peurs, ses joies. Le plateau devient effec­tive­ment un périscope, ren­dant tan­gi­ble la com­plex­ité du jeune homme.
La pièce est servie par une troupe tal­entueuse menée par Pierre Lefeb­vre dans le rôle de Christo­pher. Tour à tour drôle, touchant, attachant, il parvient à exprimer la richesse de son per­son­nage sans tomber dans l’ex­agéra­tion et le pathos. On notera aus­si l’in­ter­pré­ta­tion de Juli­ette Pois­son­nier dans le rôle de Siob­han, édu­ca­trice com­plice, et Sébastien Bravard en père bour­ru mais aimant. La troupe évolue dans un décor sobre à l’in­térieur duquel le met­teur en scène a com­posé des images d’une grande poésie, créant une atmo­sphère tan­tôt douce (la nuit étoilée), tan­tôt amère (l’en­vi­ron­nement urbain).
Le Bizarre Inci­dent du chien pen­dant la nuit se joue encore jusqu’au 23 octo­bre (quelques représen­ta­tions ont été ajoutées en rai­son du suc­cès de la pièce). Espérons que la pro­duc­tion repren­dra rapi­de­ment afin de touch­er le large pub­lic qu’elle mérite.