
Pourquoi une émission sur la comédie musicale ?
Je suis journaliste pour Radio France depuis huit ans, j’ai produit des émissions pour France Inter et j’avoue que la comédie musicale est un peu mon péché mignon. La toute première émission que j’ai faite, sur une petite radio de la région parisienne, était consacrée aux comédies musicales et musiques de films. Vous m’aviez à l’époque aidé et nous avons pas mal pioché dans votre discothèque ! Je connaissais déjà l’univers du musical grâce à un voyage en 1986. J’y avais vu ma première comédie musicale à Broadway : A Chorus Line. Elle m’a donné envie d’en découvrir d’autres. Désormais, je ne passe plus par New York sans aller voir un spectacle. J’en ai vu à ce jour une trentaine. Le cinéma a également sa place, avec des films musicaux, tel Yentl, sans parler des films de Disney que l’on voit petit…
J’ai eu également la chance de rencontrer Marni Nixon, qui a doublé Natalie Wood dans West Side Story et Audrey Hepburn dans My Fair Lady. Ses propos étaient passionnants. L’interview a été diffusée en 2000 sur France Culture. Enfin, j’ai vécu une expérience passionnante l’an dernier en participant à l’émission de Benoît Duteurtre « Etonnez-moi Benoît » où je tenais une rubrique sur l’actualité de la comédie musicale en France. C’est sans doute ce qui a décidé France Musique à me proposer de produire une émission régulière sur ce genre. Et j’en suis ravi, car il existe tout un répertoire très riche, essentiellement anglo-saxon à faire découvrir, on ne l’entend quasiment jamais à la radio.
Comment se décompose une émission ?
42ème rue se veut une émission divertissante. Je ne me prive pas de diffuser des bons vieux standards pour le plaisir pour chanter et danser à l’heure du déjeuner le dimanche. Notez que même une chanson aussi célèbre que « Singin’in the rain », on ne l’entend pas à la radio. Toutes les stars de Broadway sont convoquées, les cuivres, les violons, les grands sentiments structurent l’émission avec une teinte particulière chaque semaine. En fait je souhaite transporter l’auditeur à Times Square, évoquer toutes les façades scintillantes des théâtres. Quand on allume son poste, j’allume les projecteurs et en avant ! Pour chaque émission, je choisis une grande affiche. Vingt-cinq minutes consacrées à un thème. Cela peut être une oeuvre, par exemple six titres de West Side Story, mais aussi une artiste connue comme Barbra Streisand ou moins connue comme Lena Horne. Enfin cela peut être un thème plus général, à l’instar des élections américaines pour l’émission du 2 novembre. Deux autres séquences plus courtes complètent le programme. La voix fantôme me tient à coeur. En l’occurrence il s’agit de faire découvrir les artistes qui doublaient les stars dans les films hollywoodiens, comme Marni Nixon que j’évoquais tout à l’heure. C’est tout un pan de la machine à rêve qui est ainsi évoqué : on faisait croire que les acteurs chantaient, les doublures n’avaient pas le droit d’être créditées au générique du film. Rediffuser ces morceaux me permet de rendre à César ce qui lui appartient ! Je termine par une séquence d’actualité sur Londres, Broadway ou Paris. Les spectacles à l’affiche ne manquent pas, comme c’est le cas à Paris actuellement.
Après plusieurs semaines, quels retours avez-vous ?
Je vous citerai le premier mail que j’ai reçu et qui m’a fait très plaisir. Une auditrice me dit avoir découvert l’émission par hasard et que rien ne la prédestinait à passer « une matinée aussi égayée, autant vous dire que je n’ai jamais fait le ménage avec autant d’entrain ! ». Je tiens, pendant une heure, à faire passer du bon temps aux auditeurs, sans prétention, en apprenant des choses…
Quelle est votre définition d’une bonne comédie musicale ?
Il faut que ça claque ! Que ce soit réglé comme de l’horlogerie. Et même si ce sont des évidences, j’attends d’un spectacle qu’il soit joué, mis en scène et chorégraphié avec rigueur et professionnalisme. Pour certains des spectacles à l’affiche à Paris depuis la rentrée, ce n’est pas toujours le cas, ce qui conduit logiquement à penser qu’en France, nous n’avons décidément pas la culture de cette exigence. Il faut qu’il y ait un envol, que l’on soit happé par le show. Toutefois, ce qu’il y a de très intéressant à Paris en ce moment, c’est la diversité des comédies musicales proposées : du grand spectacle dans des lieux immenses comme Rabbi Jacob à des oeuvres plus intimistes comme Epouse-moi que j’ai trouvé formidable. Je reste curieux de tout, on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise !
Quels thèmes aborderez-vous dans les émissions futures ?
J’ai plein d’idées. Je vais par exemple consacrer une grande affiche à Superman. Avant que le cinéma ne s’en empare, Broadway a adapté cette bande dessinée en un spectacle qui fut un flop mais qui me plaît beaucoup. En fait, le but est d’alterner les spectacles plus ou moins connus de Gentlemen Prefer Blondes à A Funny Thing Happened On The Way To The Forum, les interprètes, stars ou pas stars comme Lena Horne, Elaine Stritch, avec l’envie d’élargir aux producteurs ? j’ai concocté une grande affiche sur David Merrick ? les chorégraphes, les gens qui sont plus dans l’ombre. Vous trouverez des grandes affiches sur le tandem génial de scénaristes et paroliers Betty Comen et Adolph Green, une spéciale Noël consacrée à Disney, dont l’univers musical a influencé nombre d’amateur de musicals, en attendant une spéciale Barbra Streisand, Julie Andrews. Enfin… leurs parcours sont tellement imposants qu’il faudrait leur consacrer cinq émissions chacune ! Sans aller jusqu’à dire que le répertoire de la comédie musicale est inépuisable, force est de constater qu’une multitude d’oeuvres existent et méritent notre attention. Il existe tout un monde passionnant à faire découvrir au grand public.