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La visite de la vieille dame (Critique)

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lavisitedelavieilledamede Friedrich Dür­ren­matt, adap­ta­tion et mise en scène d’Omar Porras

Pour la troisième fois, Omar Por­ras crée ce bijou vit­ri­olé, cam­pant lui-même une vieille dame exubérante, « emper­ruquée » et en den­telles. Suc­cès pub­lic et cri­tique dès sa pre­mière mise en scène, sa Vis­ite de la vieille dame lui vaut une recon­nais­sance mon­di­ale. En trois actes d’une tra­gi-comédie féroce et réjouis­sante, Friedrich Dür­ren­matt démasque la ver­sa­til­ité des valeurs et pour­suit une réflex­ion rad­i­cale sur la jus­tice. Amour, vengeance, cupid­ité et morale mènent une danse macabre où le grotesque du monde se joue de la vérité. Par­tie sous les insultes, la richissime rom­bière Clara Zahanass­ian revient au pays, sept maris plus tard. Les habi­tants lui réser­vent un accueil aus­si somptueux que le per­met leur mis­ère. C’est qu’ils comptent bien lui soutir­er quelques mil­lions pour relancer leurs affaires. Elle leur offre cent mil­liards con­tre la tête d’Alfred ll, un ancien amant qui l’avait aban­don­née. Un spec­ta­cle musi­cal et fes­tif, où le baroque du Malan­dro épouse celui de l’auteur dans un pas de deux grinçant jusqu’à l’apocalypse.

Notre avis : Cette vis­ite séduit immé­di­ate­ment par ses par­tis pris de mise en scène rad­i­caux et inspirés. La troupe évolue masquée, la scéno­gra­phie rivalise de trou­vailles, d’une scène à l’autre. Des couleurs très recher­chées, tant dans les décors que les cos­tumes et les lumières, plon­gent le spec­ta­teur dans un univers par­al­lèle, tran­quille­ment inquié­tant. Cette farce où le grotesque le dis­pute au trag­ique tient véri­ta­ble­ment grâce à cette troupe épatante — comé­di­ennes et comé­di­ens don­nent une force par­ti­c­ulière à cha­cun de leur per­son­nage avec ce tra­vail autour du masque — à l’ambiance sonore et à cette mise en scène riche d’inventivité. En effet force est de recon­naître que ce texte, qui date de 1956, a un rien vieil­li et que la démon­stra­tion paraît lourde. Nous pour­rons penser que les sen­ti­ments exac­er­bés qui y sont explorés tra­versent les épo­ques : jusqu’à quel point un engage­ment poli­tique, moral, résiste face au pou­voir de l’argent ? Et ce dans un con­texte où un accusé, qui doit être mis à mort en échange de mil­liards si ses conci­toyens en déci­dent ain­si, a com­mis un crime (un viol, même s’il partageait des sen­ti­ments avec l’être aimé) aux con­séquences ter­ri­bles ? Le vit­ri­ol s’est un peu dilué au fil des ans, mais l’énergie et la force de con­vic­tion de cette troupe méri­tent cette visite.

N’hésitez pas à vis­iter la page du spec­ta­cle.