Kiki de Montparnasse (Critique)

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    kiki-de-montparnasseD’après Sou­venirs retrou­vés de Kiki de Montparnasse
    Mise en scène : Jean-Jacques Beineix
    Chan­sons : Frank Thomas
    Musique : Rein­hardt Wagner
    Avec : Héloïse Wagner
    Accom­pa­g­née par : Rémi Oswald ou Jean-Yves Duban­ton et Rodrigue Fernandes
    Assis­tante mise en scène : Manon Elezaar
    Choré­gra­phie : Corinne Devaux
    Vidéo : Chris­t­ian Archam­beau / Jean-Jacques Beineix

    Mont­par­nasse, années 20, l’atelier d’un pein­tre, une femme enfile ses bas… Elle se sou­vient : Kiki de Mont­par­nasse, « Mod­èle » d’une révo­lu­tion qui impose de nou­veaux critères à l’art et au monde. Kiki de Mont­par­nasse, effron­tée, libre, pose nue pour les pein­tres Fuji­ta, Modigliani, Sou­tine… Elle chante, peint, danse, ani­me des soirées de folie. Man Ray, l’œil exer­cé, « trou­ve son physique irréprochable de la tête aux pieds », il en fait son égérie, elle, son amant. En un cliché, il l’immortalise. Kiki croise les poètes, les écrivains du temps, Hem­ing­way devient son ami. De la Coupole à la Rotonde, du Jock­ey au Bar Din­go, muse amoureuse endi­a­blée, de New-York à Berlin, Kiki s’étourdit, brûle sa vie et trace en let­tres d’or le des­tin d’une légende du Mont­par­nasse. Por­trait kaléi­do­scopique de la Reine du Mont­par­nasse, joué, chan­té, dan­sé, de la bohème à la descente aux enfers !

    Notre avis (août 2015) :

    Depuis son enfance en Bour­gogne jusqu’à son dernier souf­fle à Paris, c’est un mono­logue qui nous est offert, celui d’une jeune femme aux pro­por­tions et au vis­age agréables, affamée, bouil­lon­nante, aimante, aimée, rejetée… qui aura côtoyé dans le Mont­par­nasse bohème de l’entre-deux-guerres des artistes et des intel­lectuels réputés ou qui le sont devenus. À cette jux­ta­po­si­tion chronologique de tranch­es de vie pour­tant pit­toresques, il nous aura man­qué plus de pro­fondeur dans la suc­ces­sion des numéros ain­si qu’une mise en relief capa­ble de nous faire com­pren­dre ce qu’avait d’extraordinaire, dans le con­texte his­torique et au milieu du cer­cle des célébrités qu’elle aura inspirées, cette grandeur et déca­dence d’une pau­vre fille par­v­enue à la gloire et à ses excès (sur­poids, alcoolisme, drogue). Peut-être les Sou­venirs retrou­vés signés Kiki et dont s’inspire la nar­ra­tion ne per­me­t­taient-ils que de dessin­er un por­trait morcelé, qui laisse de fait comme un goût d’inabouti à la trame.
    La musique signée Rein­hardt Wag­n­er, inter­prétée par un orig­i­nal duo accordéon/guitare, et les paroles de Frank Thomas, ponctuent le réc­it de « goualantes », com­plaintes pop­u­laires, très à pro­pos dans le reg­istre nos­tal­gique et mélan­col­ique, voire roman­tique (par exem­ple, le très joli hom­mage à Modigliani, « Amadéo »*) mais qu’on aimerait plus enflam­mées et exaltées à d’autres moments.
    De la scéno­gra­phie, on retient hélas de bien étranges voire ridicules pro­jec­tions sur écran blanc qui, non seule­ment sont inutile­ment redon­dantes avec le réc­it, mais surtout détour­nent le regard et l’attention de la per­for­mance d’Héloïse Wag­n­er. Se déplaçant avec félin­ité, aus­si naturelle dans ses sourires mutins que dans ses pos­es aguicheuses ou ses larmes de bon­heur, la comé­di­enne met toute sa sincérité et son énergie à faire étinceler les mul­ti­ples facettes de son per­son­nage. Indé­ni­able­ment le vrai atout de ce spectacle.
    *L’ensem­ble des chan­sons du spec­ta­cle peut être écouté ici.