
Comment avez-vous commencé votre carrière dans la comédie musicale ?
J’ai démarré dans Mayflower il y a 30 ans. J’y ai appris à jouer, chanter, danser… Ce baptême du feu m’a beaucoup marqué. Puis j’ai vu des comédies musicales à Londres, comme Chorus Line ou Cats, et ce genre m’a beaucoup impressionné. Par la suite, j’ai fait partie du Big Bazar mais je me suis aussi aguerri au métier de comédien en travaillant avec Voutsinas. En fait, depuis 30 ans, je navigue entre des choses populaires et du théâtre plus exigeant. Une même année, j’ai joué Les Paravents de Genet aux Amandiers de Nanterre, et L’ombre d’un géant à Mogador.
Comment vous est venue l’idée d’écrire un spectacle sur Camille Claudel ?
Camille Claudel est l’archétype de l’artiste maudit qui n’arrive pas à faire connaître son talent de son vivant Elle veut être reconnue en tant que femme et en tant qu’artiste mais elle n’y arrive pas, car à la fin du XIXe siècle, être sculptrice équivaut à être pute. C’est un parcours fascinant.
Nous-mêmes, en tant qu’artistes, sommes toujours confrontés à certains de ces problèmes. Par exemple, pour faire aboutir nos projets, comment rencontrer les gens quand on n’a pas pignon sur rue ? A travers Camille Claudel, j’ai donc voulu aussi évoquer nos problèmes d’artistes.
Comment voyez-vous Camille Claudel ?
C’est une femme avec une volonté terrible mais qui va se casser les dents sur la montagne Rodin. C’est une héroïne romanesque, on pourrait presque faire un parallèle avec Mme Bovary. C’est une femme qui essaye de s’affranchir de la tutelle du pouvoir masculin.
Comment vous êtes-vous documenté pour écrire Camille C. ?
J’ai lu tous les livres sur le sujet. Puis, je les ai posés dans un coin et j’ai commencé à rêver à Camille Claudel… D’autre part, j’ai fait un cursus d’art thérapie et j’ai eu la possibilité de passer deux à trois mois à Sainte-Anne. J’ai pu ainsi observer des patients qui avaient des troubles du comportement, des gens que l’on aurait qualifiés de « fous » il y a cent ans. Je leur faisais écrire leur histoire et cette pièce leur servait de catharsis pour surmonter leurs problèmes.
Comment a démarré le projet ?
Jean-Luc Moreau [le metteur en scène] est venu me voir après un spectacle et je lui ai parlé de ce projet. Il a tout de suite été intéressé. Nous sommes partis sur la base d’une version acoustique et avons réuni quelques directeurs de salle pour leur présenter le projet. Gérard Maro, du Théâtre de l’Oeuvre, a été emballé et nous a proposé de commencer 2005 chez lui.
Quelles sont vos références en matière de comédie musicale ?
J’ai un grand faible pour Sondheim. Sunday In The Park With George est une merveille. Mais j’aime aussi des oeuvres comme Sunset Boulevard, Rent ou Jerry Springer The Opera. Avant tout, il faut que ce soit écrit, qu’il y ait un scénario, une vraie théâtralité, une confrontation entre les personnages. Il faut que la chanson soit vécue comme une délivrance…
Avez-vous déjà d’autres projets ?
J’ai monté récemment un récital et j’aimerais aujourd’hui sortir le CD. J’ai également le projet d’adapter Le portrait de Dorian Gray en comédie musicale. J’aime ce côté gothique, troublant, qui va dans le même sens que Camille C. Pour Camille, musicalement, on navigue entre des aspects debussyens et les prémices du jazz, et j’aimerais faire la même chose avec Dorian Gray.
Que peut-on vous souhaiter ?
Qu’il y ait beaucoup de public et que le bouche à oreille se fasse ! J’aimerais surtout que le théâtre musical devienne un genre en soi et non pas un désir sporadique des programmateurs et des directeurs de salle. On a l’impression qu’ils prennent un énorme risque en programmant du théâtre musical alors que ça devrait être complètement naturel !