Le père de Jean-Claude Brialy aimait emmener sa petite famille se baigner au Ruisseau des Singes, un endroit paradisiaque près de Blida en Algérie. Mais le voyage en voiture avait le don de rendre le futur artiste malade. Cet endroit est donc devenu la métaphore de sa carrière, un parcours long, parfois sinueux, pour accéder aux feux de la rampe (et y rester !)… d’autant que sa famille, conservatrice en diable, ne voulait pas le laisser aller « faire le singe » sur scène !
Jean-Claude Brialy est un excellent comédien qui a inspiré quelques-uns des plus grands metteurs en scène. On avait presque fini par l’oublier tant Brialy le conteur des anecdotes du tout Paris théâtral (monterait-on encore Sacha Guitry si l’ami Jean-Claude ne diffusait sa bonne parole sur tous les plateaux de télé ?) a fini par prendre le pas sur Brialy l’acteur. Ce n’est pas le moindre des mérites de cette autobiographie que de nous rappeler que son parcours professionnel a croisé ceux des tenants de la Nouvelle Vague. Entre autres.
D’où vient alors que l’image de l’auteur reste à ce point imprécise et que, une fois terminé le passage obligé aux années d’enfance (celles qui, dans ce genre d’ouvrage, sont sensées tout éclairer), il s’efface de manière trop prévisible devant tout ceux et celles qu’il a rencontrés, et souvent aimés : Delon et Romy, Cocteau et Jean Marais, Jeanne Moreau, Piaf, Brel et les autres. Autant de grands noms qu’on trouve ici croqués avec grand plaisir de même que les lieux chargés de souvenirs (la maison de ses grands parents, son château, son restaurant, son théâtre des Bouffes Parisiens) même si l’on regrette que Brialy n’écrive pas toujours aussi bien qu’il parle.
Au final, si l’on en a appris beaucoup sur tous ceux qui se sont baignés dans le Ruisseau des Singes, on reste un peu sur sa faim : le petit Jean-Claude, lui, est resté sur la rive…