Pouvez-vous décrire le personnage que vous interprétez dans L’Hôtel des Roches Noires et le principal défi du rôle ?
Jules est complètement attaché à sa femme qu’il a perdue cinq ans auparavant. Il est devenu promoteur immobilier par pur dépit amoureux mais, dans sa tête, il n’a jamais lâché le lien. En quelque sorte, il continue à faire du trapèze avec elle. C’est une histoire très sentimentale entourée d’autres histoires d’amour passionnées qui se sont toutes terminées par des suicides et des blessures sentimentales profondes. La difficulté principale pour jouer ce personnage est de préserver une charge émotionnelle forte sans devenir larmoyant, de raconter une jolie histoire en évitant le mélo.
Est-ce compliqué d’être sur scène avec les auteurs de l’oeuvre ?
Dans ce cas, c’est plutôt un avantage car les auteurs, Françoise Cadol et Stéphane Corbin, étaient ouverts aux évolutions. La preuve en est qu’ils avaient écrit près de 80 chansons au départ dont il ne reste qu’une vingtaine dans la mouture finale. C’est toujours un crève-coeur d’abandonner des chansons en cours de route, mais ils ont eu le courage de le faire pour l’efficacité du spectacle. Il y a aussi quelques scènes qui ont changé de place.
Comment avez-vous été impliqué dans le projet ?
Je suis arrivé tard… Je dois même avouer n’avoir pas assisté aux lectures. Mais j’ai eu la chance que l’on soit venu me chercher, ce qui est plutôt rare et appréciable ! Je suppose que mes rôles dans Elliot Fall et Le Roi Lion avaient montré que je pouvais apporter quelque chose au projet.
Depuis Le Roi Lion, êtes-vous définitivement catalogué au registre de la comédie musicale ?
Avant, je faisais du théâtre dit normal. Hors scène, j’ai toujours chanté comme baryton et joué de la musique mais j’ai une technique vocale de comédien et non de chanteur. Je n’ai jamais cherché à faire de la comédie musicale à tout prix. Je me suis présenté au casting du Roi Lion — sans vraiment y croire d’ailleurs — parce que Scar est un personnage de théâtre complètement shakespearien, tel que je les aime. Je suis un comédien qui chante et ma voie est de jouer de vrais personnages, pas de jouer de ma voix !
Les fantômes ont-ils assez de consistance pour être de vrais personnages de théâtre ?
Ceux des Roches Noires certainement ! On parle certes de fantômes et d’êtres chers disparus, mais l’histoire, si onirique soit-elle, reste ancrée dans la vraie vie. Le rapport aux morts et aux ancêtres est une réalité pour beaucoup de gens. Mitterrand, avant de nous quitter, évoquait “la force de l’esprit”.
Dans la vie, vous sentez-vous plutôt trapéziste ou promoteur ?
Sans hésitation : trapéziste. Je me sens complètement saltimbanque. Je ne mène pas une carrière mais j’aime profiter des opportunités qui se présentent. Je fais toujours le choix du spectacle qui me touche le plus, plutôt que celui de la popularité ou, pour être plus explicite, de la notoriété.
En matière de comédie musicale, que pensez-vous de la scène parisienne et quel rôle vous tenterait ?
Désormais, les spectacles à Paris sont très extrêmement variés, c’est une bonne chose… Mais le public n’est malheureusement pas extensible. Personnellement, je me sens plus proche de l’esprit Stage [NDLR : Stage Entertainement] qui produit “à la mode de Broadway” ou de plus modestes créations françaises, plutôt que des grands shows comme Dracula, que l’on pourrait qualifier de spectacles de variétés. Mais je ne ferme la porte à aucun genre. J’ai quand-même une œuvre fétiche que j’écoute dans quinze versions différentes : L’Opéra de quat’sous, donc je ne refuserais certainement pas de jouer Mackie Messer si l’occasion se présentait. Le Don Quichotte dans L’Homme de la Mancha me tenterait également… d’autant que je commence à avoir l’âge !
NDLR : on peut voir L’Hôtel des Roches Noires au Vingtième Théâtre jusqu’au 4 mars 2012