David Alexis, comment vous sentez-vous à ce stade des représentations ?
Depuis le 16 octobre, on est dans un état encore un peu euphorique. On a eu la chance de travailler deux mois avec Polanski : on est encore rempli de ces richesses, cette passion qui nous ont été transmises. Aujourd’hui, on vit au rythme des réactions du public, qui sont bonnes, et c’est formidable de voir ça. On est aussi porté par l’œuvre qui n’est pas forcément facile. Le film date de 67, il a un peu vieilli et on n’a pas forcément le décalage qu’il y avait dans le film. Là, c’est très chanté.
En tout cas, on est encore très concentré car rien n’est acquis. C’est un spectacle très dangereux techniquement, donc la moindre inattention peut être fatale. Mais on est heureux, on est une bonne équipe, tous solidaires.
Pouvez-vous nous parler de votre personnage ?
Le Professeur Abronsius n’est pas si loin de moi. A la dernière audition, Polanski m’avait demandé de travailler plus avec mon corps. C’est un travail de composition qui n’est pas facile, physiquement, vocalement, mais il est proche de moi dans la rapidité, dans les zygomatiques, dans la manière d’avoir des réactions avec les autres. Après, pour parler de son caractère, c’est un personnage qui est resté un enfant, il est un peu tyrannique, parfois antipathique mais je pense qu’il est généreux et qu’il est tendre avec les futurs scientifiques qui vont suivre ses traces. C’est un personnage formidable à jouer et tous les soirs je prends mon pied… et mon pieu !
Comment avez-vous abordé la préparation de ce rôle ?
Quand j’ai été choisi, j’ai été heureux mais aussi inquiet car je savais que je n’avais pas l’âge du rôle et je me demandais pourquoi ils ne choisissaient pas quelqu’un de plus proche en âge, mais apparemment, ils souhaitaient quelqu’un de plus jeune car le rôle est physique. Physiquement, j’ai donc travaillé en direct avec Polanski durant les répétitions. Je pars du principe que le corps de l’acteur doit être le premier engagement. Je me suis donc mis à l’écoute de mon corps et Polanski m’a aiguillé.
Vocalement, j’ai abordé ce travail avec ma prof Amy Lavietes, j’ai peaufiné des choses. J’ai aussi la chance d’avoir commencé en tant que marionnettiste, et j’ai très vite donné du fil à retordre à mon larynx, comme dans Avenue Q. Ca ne me semblait pas très compliqué en soi, mais il faut maintenir cette position pendant deux heures, vocalement et physiquement.
Comment Polanski vous a‑t-il dirigé ?
C’est impressionnant de travailler avec Roman, surtout quand on sait tout ce qu’il a fait, tout ce qu’il est. Dans le travail physique, il accompagne beaucoup. Il est derrière sa table, il nous regarde travailler, puis il nous arrête, nous dit de bouger une épaule, on sent qu’il travaille beaucoup au cinéma : il est dans une précision absolue. Mais parfois, il a tendance à oublier qu’on est sur scène et que ce n’est pas toujours facile de reproduire au centimètre près la position d’une épaule ou d’un œil. On s’amusait beaucoup de ça ! C’est un homme incroyable, il n’y a pas beaucoup de metteurs en scène qui montent sur le plateau et s’engagent autant physiquement.
Vous avez revu le film durant votre processus de travail ?
J’avais vu le film il y a très longtemps et je l’ai revu pour les auditions, pour mieux cerner le côté décalé. C’est là que j’ai vu qu’on était à la fois dans de l’absurde et du réalisme. En revanche, à la demande de Polanski, je n’ai rien visionné sur Youtube de la production scénique, car il voulait vraiment créer de nouvelles choses ici. Mais le film est sur ma table de chevet, comme un grigri, car Le Bal des Vampires est une chance inouïe et une aventure humaine inoubliable.
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