Création polyglotte — fragments d’un opéra disparu
création musicale et composition des chants : Sylvain Freyermuth
dramaturgie & mise en scène : Renaud Lescuyer
jeu : Vincent Bady, Yolanda MPelé, Muhaned Alhadi, Nathalie Souvras, Sylvain Freyermuth -
lumières : Jérôme Allaire – scénographie Clément Peretjatko.
Production Persona. Avec le soutien de la Région Rhône-Alpes.
De la mort de son père à la sienne, en quelques jours à peine, Hamlet traverse toutes les épreuves de la condition humaine : la scène est un tombeau ouvert. Acteurs et spectateurs descendent dans la fosse pour y partager l’expérience des mortels. Avant d’embarquer sur ce plateau ivre, Hamlet réclame de réunir une troupe d’acteurs polyglotte et décidée… Tentative d’abordage… Hamlet s’avance avec TOUT le théâtre entre ses dents.
Notre avis :
On évoque souvent « la langue de Shakespeare ». Avec ce Hamlet mis en scène par Renaud Lescuyer, cette expression semble ne plus connaître de limites, le texte original s’adaptant au profil des interprètes. Claudius, le roi assassin, parle arabe. La reine Gertrude, mère d’Hamlet, s’exprime régulièrement en anglais. Ophélie, l’amour d’Hamlet, utilise quant à elle principalement la langue des signes. Cette approche est originale, quoique parfois déstabilisante. Les dialogues ont parfois lieu dans deux langues différentes mais les enchaînements permettent de retrouver le sens global de certains propos.
Une autre forme de langage a été utilisée pour cette adaptation. Sylvain Freyermuth a composé de belles partitions parcourant différents univers musicaux, de l’opéra au cabaret. Il les joue en direct au clavier, tout en interprétant plusieurs rôles. Les interprètes féminines se distinguent particulièrement lors des séquences chantées, notamment avec la belle surprise de la découverte de la voix de Nathalie Souvras après plusieurs scènes jouées dans la langue des signes. Yolanda MPelé interprète plusieurs chansons en anglais qui ne sont pas sans évoquer agréablement le registre des « musicals » anglo-saxons.
Cette adaptation de Hamlet est jouée sur une scène de dimension réduite avec cinq comédiens « seulement ». Des éléments de décors simples et mobiles ainsi que les costumes permettent de se resituer sans difficultés dans le royaume du Danemark. Il est sans doute préférable de connaître déjà l’œuvre pour mieux apprécier l’approche de certains personnages s’exprimant dans une autre langue dans cette version. Elle peut toutefois être une belle opportunité de rendre accessible à un large public cette œuvre phare de William Shakespeare.