Comédie musicale rock de : Gérôme RAGNI et James RADO
Musique : Galt Mac DERMOT
Adaptation française : Sylvain MEYNIAC
Avec : Fabian RICHARD, Liza PASTOR, Laurent BAN, MELUSINE, Antoine LELANDAIS, Marc BEAUJOUR, Tiphanie DOUCET, Billy TRAN, Magali BONFILS, Yoni AMAR, Daniel DELYON, Julia GIAMETTE, Yvana VERBECQ, Caroline BAL
Mise en scène : Ned GRUJIC
Chorégraphie : Raphaël KANEY-DUVERGER
Assistantes : Sonia SARIEL et Laurence PEREZ
Direction musicale : Andrés VILLANI et Alberto CENTOFANTI
Direction artistique : Marco DAVERIO
Décors : Giuliano SPINELLI
Costumes : Sara BIANCHI
Lumières : Danilo LAROSA
Direction vocale et choeurs : Emanuele FRIELLO
« Pour » : Assurément, cette nouvelle production de Hair use de l’ambiguïté du lieu, de la langue et de l’époque comme moteur d’universalité. Les costumes et les coiffures sont trop sophistiqués pour évoquer les beatniks et pas assez pour le techno-beat ; les personnages mentionnent des éléments de notre quotidien, mais leur comportement n’est pas de notre temps et leur culture pas vraiment la nôtre. Si ce parti pris de l’ambiguïté risque de rebuter les esprits cartésiens et les puristes, il ravira les âmes impressionnistes pas trop à cheval sur les canons de l’oeuvre. Les tableaux s’enchaînent sans nécessairement beaucoup de logique mais lèvent progressivement une part de mystère — à défaut d’intrigue — avec originalité. De même, le conflit en arrière-plan, le Vietnam dans la version originale, est théorisé mais jamais prononcé. Ce n’est plus tel ou tel conflit qui est stigmatisé, c’est l’idée même de la guerre, omniprésente et larvée, telle que nous la connaissons aujourd’hui. Le résultat de tout cela est que le spectateur ne comprend que partiellement ce qui se déroule sur scène, comme s’il avait lui-même mangé des champignons hallucinogènes. Il faut espérer que c’était bien là l’effet recherché par la mise en scène ! Il reste à mentionner la performance vocale de la troupe, importante dans un spectacle qui laisse peu de place aux dialogues, et les chorégraphies pas toujours très fines ou pleines de sens mais exécutées scrupuleusement. Globalement donc, Hair, 1969–2009 est une version planante, divertissante et spectaculaire au sens littéral du terme. Elle laisse bien dans la bouche ce mélange de douceur et d’amertume qui rappelle à tous notre besoin d’épanouissement et notre part de sacrifice. En ce sens, la leçon du Hair original n’est pas trahie de l’épaisseur d’un cheveu ! (Thomas Schmidt)
« Contre » : Reprendre Hair, c’est se confronter à la question de l’intemporalité d’une oeuvre totalement ancrée dans une époque de par son propos et l’histoire même de sa création. Faut-il conserver les références d’origine et partir du principe que les thèmes d’hier sont toujours présents aujourd’hui ? Faut-il, au contraire, transposer une période révolue pour qu’elle puisse faire écho à l’actualité ? Le problème de l’adaptation Hair, 1969–2009 réside dans l’absence de réponse et de parti pris vis-à-vis de cette problématique. Là où les beatniks étaient marginaux, contestataires et révoltés, les personnages de la production actuelle tentent d’exister avec des textes mi-actualisés, mi-originels, des arrangements musicaux hasardeux, des chansons tantôt en français, tantôt en anglais, parfois dans les deux langues (est-ce d’ailleurs la nouvelle mode des adaptations en France que de masquer les incapacités de traduction en ne transposant qu’une partie des morceaux ?). Les costumes, les coiffures et les chorégraphies s’inspirent inégalement des seventies ou du 21e siècle, au fil de tableaux hétérogènes. En n’assumant aucun choix et en mélangeant des éléments incohérents, les messages délivrés et les personnages sont vidés de leur sens et plongent vraisemblablement la majorité des spectateurs dans la perplexité la plus totale. Si certains artistes ? les deux rôles principaux en particulier ? ont du talent et de l’énergie à revendre, ils ne parviennent pas à sauver un spectacle confus où les malencontreuses références à la tecktonic, à Facebook ou à Obama ne réussissent pas à évoquer les conflits ou les difficiles choix de vie de notre temps. (Alexia Guarinos)