Grégori Baquet, vous revoilà dans une comédie musicale. Comment êtes-vous arrivé sur Zazou ?
C’est un coup de bol. Peu avant les fêtes, j’ai pris des nouvelles de mon camarade Serge Le Borgne (le poète dans Roméo et Juliette) qui jouait dans Zazou. Il me dit « Ca tombe bien que tu m’appelles, Alexandre Bonstein s’en va.» Evidemment, ce rôle m’intéressait, d’autant que j’avais déjà passé les auditions pour Zazou il y a 13 ans, à l’époque c’était Chris Campion qui avait eu le rôle. Je lui demande de parler de moi à l’assistant de Savary que je connais. Quand il a entendu mon nom, il m’a appelé tout de suite. Il m’a demandé de passer, j’ai pris une partition et un bout de texte. Je suis revenu le lendemain, j’ai vu Savary deux secondes, il m’a dit « C’est bon, vas‑y, tu le fais. »
Avec Jérôme Savary, vous vous connaissiez déjà ?
Nos chemins se sont croisés plusieurs fois mais rien ne s’est jamais concrétisé. Déjà, il ne m’a pas retenu pour la première création de Zazou alors qu’il m’avait dit qu’il m’avait trouvé formidable lors de l’audition. Ensuite il a fait ce spectacle sur Trenet, Y’a de la joie et de l’amour, pour lequel il m’avait retenu. On a eu une mésentente car il m’avait demandé de venir faire une photo à moitié dénudé pour une affiche. Je lui ai dit que je ne la faisais pas tant que je n’avais pas un contrat d’engagement. On s’est engueulé et il m’a dit de partir. Il a vu mes parents lors d’un festival et il leur a dit « Grégori, je le trouve super, il a beaucoup de talent, mais alors quand il sera un peu moins fier de lui, je l’engagerai !» Du coup, là, comme c’est moi qui ai appelé et qui ai demandé à travailler avec lui, ça l’a sans doute rassuré, il n’y a pas eu de problème.
Vous êtes le seul nouveau pour la reprise du spectacle aux Folies Bergère. N’est-ce pas difficile d’intégrer une troupe qui joue déjà ensemble depuis plusieurs mois ?
Beaucoup me connaissaient déjà, j’avais déjà joué avec certains d’entre eux. Je ne me sens pas en terrain inconnu, je me sens plutôt bien. J’ai de très bons partenaires. Nina Savary a une personnalité étonnante. J’avais un peu peur parce que c’était » la fille de « , mais elle est adorable. D’ailleurs, son père aussi m’épate, il mène vraiment bien sa barque.
Vous reprenez le rôle qu’interprétait Alexandre Bonstein lors des représentations à l’Opéra Comique…
Ca ne me dérange pas de reprendre un rôle, ça m’amuse. Ca m’arrange même, moi qui n’aime pas répéter pendant deux mois. Là, je n’ai pas eu le temps de m’ennuyer, j’ai répété quatre fois et c’est parti ! J’ai vu Alexandre dans le rôle. J’ai repéré les moments où j’allais lui piquer des choses et ceux où j’allais faire différemment. J’aurais bien aimé qu’il soit là pour m’aider mais il était en répétition pour sa comédie musicale, Créatures. C’est un grand moment pour lui, je ne peux pas lui en vouloir. On s’est croisés très rapidement, on a parlé cinq minutes. Pour l’anecdote, c’est très drôle, quand je suis rentré dans la compagnie Roger Louret aux Folies Bergère, en 1995, c’était déjà son rôle que j’ai repris dans Les Années Twist ! Il faut que je fasse attention à ce qu’il fait car c’est peut-être ça que je vais faire après… Je vais peut-être reprendre un rôle dans Créatures !
Zazou, est-ce un spectacle qui vous correspond ?
J’adore ce spectacle. Ca se passe dans les années 40. C’est l’histoire d’un jeune homme qui fait partie d’un groupe de Zazous, ces fameux dandys parisiens qui mettaient de grandes vestes à carreaux, se laissaient pousser les cheveux et écoutaient du jazz américain. Il va tomber amoureux d’une jeune fille à qui il va faire un enfant. Ils ne vont s’aimer qu’une nuit. La fille va être envoyée par son père à la campagne parce que c’est la guerre. Lui va être envoyé en Allemagne au STO. Je n’en dis pas plus. C’est une vraie belle histoire que Savary a très bien écrite sur fond de musique zazou avec tous les grands standards de l’époque. Je suis sensible à ce répertoire. L’époque musicale était géniale : le swing, le be bop, ça avait la pêche… Et puis c’est l’arrivée des caves, de Saint Germain-des-Près, de Boris Vian qui a créé ses premiers clubs…
On est assez loin de Roméo et Juliette version Gérard Presgurvic…
Bien sûr, ça n’a rien à voir, ce sont deux styles très différents. Et puis surtout dans Zazou, il y a douze musiciens dans la fosse dirigés par Gérard Daguerre, c’est génial, ça change tout quand même ! Mais je ne regrette pas du tout d’avoir fait Roméo et Juliette. J’en garde un très bon souvenir. Ca m’a apporté une popularité que je ne peux pas dénigrer. C’est aussi pour ça qu’on m’engage plus facilement.
Savary n’est pas très tendre avec ce genre de spectacles musicaux…
Oui, à la fin de chaque représentation il fait un petit speech dans lequel il dit qu’il est fier de faire un vrai spectacle live, qu’il n’y a pas de bande comme dans tous ces spectacles play-back et karaoké. C’est un peu démago, un peu exagéré, mais il n’a pas tort sur le fond, finalement. Quitte à faire un spectacle musical autant qu’il soit joué en live avec des comédiens qui dansent et qui chantent. C’est marrant, quand Savary m’a envoyé la cassette vidéo du spectacle, il avait coupé ce speech pour que je ne le voie pas !
Juste avant Zazou, vous avez joué dans la pièce de théâtre La belle mémoire. Qu’avez-vous retiré de cette expérience ?
Je me suis éclaté dans cette pièce magnifique. Nous avons tous été un peu déçus de ne pas avoir rencontré plus le succès public que tout le monde semblait nous promettre. On ne s’est jamais démoralisés une seule fois. La grande Geneviève Casile a été un bon professeur pour moi, elle m’en a fait baver, elle m’a appris plein de choses, elle m’a soutenu, on s’est soutenus. Claire Borotra a également été adorable, extrêmement talentueuse, sans prétention et d’une gentillesse incroyable. Et puis bien sûr j’ai rencontré Alain Sachs, je suis fan total de sa façon de travailler.
En dehors de Zazou, comment s’annonce l’année 2004 pour vous ?
On m’a proposé le premier rôle dans une pièce de théâtre écrite par Michaël Cohen, qui est aussi comédien. C’est une très jolie pièce qui a pour titre Le soleil est rare. On fait des lectures fin janvier au Théâtre de l’Oeuvre pour trouver des producteurs. Cet été, je serai à Montreux, en Suisse, pour jouer dans une comédie musicale, plutôt opéra rock, écrite par Antoine Herbez et Jakob Vinge, un compositeur allemand dont les harmonies me font penser un peu à du Kurt Weill. Ca s’appelle Pizza, pierre et poésie et ce sera mis en scène par Pierre-Loup Rajot. On commence les répétitions le 15 juillet et on joue une dizaine de fois à partir de fin août. Côté cinéma, le film Grande Ecole de Robert Salis, que j’ai tourné il y a un an et demi, sort enfin le 4 février. De mon côté, j’écris le scénario d’un long métrage que j’aimerais bien réaliser. Je voudrais bien proposer le premier rôle à Jean Rochefort. Vous voyez, je n’ai pas le temps de m’ennuyer !