Un spectacle de Pascal Bolantin.
Metteur en scène : Ned Grujic.
Avec : Pascal Bolantin, Nelly Célérine, Anandha Seethanen, Haykel Skouri & Marianne Viguès.
Direction musicale et piano : Raphaël Sanchez
Accordéon et percussions : Stéphane Puc
2068, un général est au pouvoir, la police musicale fait régner la censure mais la résistance musicale s’organise.
Mai 2068, Paris, capitale des Etats-Unis d’Europe. Un général est au pouvoir et la police musicale veille au respect des lois qui interdisent d’écouter, de chanter et d’écrire des chansons qui véhiculeraient d’autres valeurs que l’ordre, l’obéissance et le travail.
La chanteuse Ginger crée le groupuscule Ginger Circus avec deux siamoises et un poète idéaliste pour tenter de sauver la création musicale… Y parviendra-t-elle ?
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Notre avis :
Paris sous la dictature en 2068, tout juste un siècle après mai 68, cinq personnages pittoresques se débattent et font de petits arrangements avec leur triste époque. L’art et la création sont au service du Régime, mais on sent gronder la “résistance musicale”. Ce contexte historique parfaitement imaginaire, conçu comme un reflet de notre propre monde via d’innombrables passerelles à peine voilées, dénonce les dérives conservatrices et uniformisatrices dont nos contemporains ne se lassent pas. Au-delà de la musique, c’est la liberté de pensée et la diversité culturelle qui sont louées. Cela fait toujours du bien de l’entendre.
Bien qu’engagé, le spectacle reste avant tout une sorte de farce musicale. Tous les protagonistes ont, au fond, un grain de folie plus développé que leurs idéaux. D’ailleurs le livret de Pascal Bolantin est truffé de jeux de mots sans complexe, de références anachroniques et de dialogues volontairement absurdes. La mise en scène de Ned Grujic illustre ce texte déjanté par une multitude de bizarreries, de situations improbables et crée avec des moyens limités une ambiance à mi-chemin entre Brazil et Delicatessen, qui ne sont pas les moindres des références !
Après une lecture et quelques dates en 2011/12, le spectacle est encore jeune. Mais il est mené par une troupe dont on sent l’adhésion forte au projet. Nelly Célérine et Marianne Viguès, notamment, forment deux drôlissimes sœurs siamoises parfaitement synchrones dans les gestes et dans la parole ; elles ne peuvent laisser insensibles, sorties tout droit d’un Side Show futuriste. Anandha Seethanen est toujours aussi puissante vocalement et exécute un jeu intelligent, même en blonde. Haykel Skouri campe un vrai-faux méchant tout à fait crédible. Quant à Pascal Bolantin, il s’est concocté un rôle sur-mesure de poète à la fois maudit et raté, tout en autodérision et, avec sa barbe de 30 jours, poilant.
Malgré des problèmes de son, comme souvent dans les salles parisiennes, on apprécie les chansons pleines d’esprit et de surprises. Dans la plus pure tradition de la comédie musicale, on y raconte des histoires tout en s’amusant. Seul bémol, on regrette un dénouement un peu abrupt qui laisse peu de temps à l’évolution des personnages. Peut-être manque-t-il une ou deux chansons ? Le spectacle n’est pas si long et pourrait largement se le permettre.