Made in Patchwork, déjà présenté au Théâtre du Tambour Royal cet été, est donc devenu La Fourchette de Pétula. Pouvez-vous nous en dire plus sur le spectacle ?
La fourchette de Pétula est, à la base, un projet musical de Michel Frantz, Cécile Jacquillat et Mark Marian, avec qui je partage le rôle du chanteur. Ils ont demandé à David Alexis (Cabaret, Je t’aime, tu es parfait, change !) de s’occuper de la mise en scène de cette répétition de concert classique qui dérape pour finir en véritable farce.
Le spectacle a en effet été joué au Tambour Royal l’été dernier sous le nom de Made in Patchwork. Ce n’est pas une comédie musicale à proprement parler mais il s’agit réellement de théâtre musical car chaque chanson ou air de musique « classique » est mis en scène avec toute la culture théâtrale du metteur en scène. A aucun moment, le spectateur n’assiste à un récital des trois artistes car chaque morceau est prétexte à une situation tantôt loufoque, tantôt poétique. Je pense par exemple à la « Danse Macabre » de Camille Saint-Saëns qui devient une sorte de ballet pour boulettes en papier ou au « Clair de Lune » de Claude Debussy où le chanteur doit remplacer la violoniste et se prête ainsi à l’exercice du mime teinté de jeu clownesque. C’est aussi l’occasion de mélanger de manière inattendue des genres musicaux complètement opposés, en faisant cohabiter le chanteur pop Mika avec des compositeurs mythiques comme Kurt Weill ou Michel Legrand. Plus la répétition avance, plus les protagonistes sont entraînés malgré eux dans un tourbillon de folie où les manies des uns vont agacer les autres. La violoniste aux attitudes snobinardes s’avère être une adepte des sites de rencontres, le chanteur profite de chaque instant pour s’adonner à sa passion pour l’origami et le pianiste, en directeur musical psycho-rigide, lutte pour garder son calme…
Ce spectacle est aussi l’occasion de (re)découvrir des airs magnifiques, des morceaux dits classiques si riches que certains ont inspiré des chanteurs modernes, comme la « Czardas » de Vittorio Monti, samplée par Lady Gaga dans son titre « Alejandro ». Quant à cette intrigante fourchette de la non moins énigmatique Pétula, peut-être est-ce là l’objet du délit, le grain de sable qui a fait dérailler la machine… Je trouve par ailleurs le changement de titre du spectacle judicieux car il attise la curiosité ! Et la clé de ce mystère ne sera dévoilée qu’à la fin du spectacle…
Quels sont les changements apportés depuis la première version ?
Par rapport à la dernière version, nous avons tous retravaillé chacune des scènes. David Alexis, assisté par Noémie Delavennat avec qui il partage la scène actuellement sur la tournée de La vie Parisienne, a affiné sa mise en scène. J’avoue avoir été complètement conquis et motivé par son intelligence, sa sensibilité, sa poésie. Le rythme du spectacle a été ré-équilibré, les caractères des personnages aiguisés. Certains airs ont été supprimés pour gagner en efficacité et le final pourrait en surprendre plus d’un mais je ne peux pas en dire plus ! En ce qui concerne le personnage du chanteur que nous interprétons en alternance avec Mark Marian, David a eu cette idée d’en faire un maniaque du pliage de papier et ça a été très amusant de s’entraîner à cette discipline. Nous avons tous les deux fait des recherches pour trouver les pliages à la fois les plus simples et les plus visuels ! Nous sommes maintenant des as des pliages des bateaux et des avions ! Pour finir, David Alexis et Michel Frantz ont laissé beaucoup de place à l’interprétation et à l’instinct de chacun des interprètes. Mark et moi avons une vision sensiblement différente de ce chanteur décalé, sorte d’ovni dans ce cadre très classique porté par Michel Frantz et Cécile Jacquillat, tous deux musiciens virtuoses issus, notamment, de la Comédie Française.
Comment êtes-vous arrivé sur ce projet?
C’est à la fin de l’été dernier que Mark Marian et Michel Frantz m’ont contacté car Mark avait besoin d’un alternant pour cette reprise. Je n’avais pas pu voir le spectacle car je jouais dans Coups de Foudre aux mêmes horaires à la même période. Mais j’ai instantanément accepté car je leur faisais entièrement confiance. J’avais également très envie de mieux connaître le travail de David Alexis que je tenais déjà en grande estime. Par ailleurs, cela faisait longtemps que Mark et moi désirions collaborer. Si nous ne partageons toujours pas le plateau sur ce projet, nous avons beaucoup travaillé le rôle en tandem lors des répétitions.
Vous avez déjà travaillé plusieurs fois avec Michel Frantz, parlez-nous de votre collaboration.
Michel et moi nous sommes rencontrés en 2007, après une représentation du Prince et le Pauvre. Peu de temps après, il m’a proposé de participer à la présentation d’Orphéo Song qui était en compétition pour le Festival des Musicals 2008. Puis, l’an dernier, il a refait appel à moi pour l’enregistrement de la maquette de son dernier projet, Hello Mister Shakespeare, pour lequel j’ai prêté ma voix à Richard III. C’est à cette occasion que j’ai fait la connaissance de David Alexis. Michel est une personne assez incroyable, d’un talent égal à son humilité ! Quel parcours, quelle générosité… C’est un fou de musique, un accro à la création ! C’est quelqu’un que j’aime profondément, qui inspire un respect immédiat. C’est une personnalité déroutante car, malgré son parcours ahurissant et tous les prix qui lui ont été accordés par la profession (par exemple, le fameux Prix Maurice Yvain décerné en 2008 pour l’ensemble de ses compositions), ce grand homme redevient souvent un petit garçon timide, manquant de confiance, en proie au doute, toujours modeste, en recherche permanente d’excellence… Il est à mes yeux le descendant d’Offenbach ! Et surtout, pour parler plus précisément de son rôle dans La fourchette de Pétula, c’est un artiste qui ne se prend pas au sérieux et qui n’a pas peur de se prêter aux clowneries subtiles suggérées par David Alexis ; c’est un véritable plaisir de jouer à ses côtés. C’est définitivement un grand artiste, un grand Monsieur.
Vous allez créer Sauna au Théâtre Clavel. Avez-vous eu l’occasion de voir la version anglophone du spectacle ?
En effet, Sauna, le musical Chaud ouvre ses portes le 11 janvier au Théâtre Clavel. L’avant-première donnée au Vingtième Théâtre, avec la bienveillance et le soutien de Pascal Martinet, a reçu un accueil si chaleureux que nous sommes impatients de présenter la version intégrale du show. Nous avons eu l’occasion de voir une captation du spectacle tel qu’il avait été monté à Tampa en Floride sous la direction musicale de Tim Evanicki, un des co-auteurs compositeurs de la pièce originale. Notre vision du projet, qui est vraiment différente de celle de cette captation, a néanmoins séduit Tim lors de sa venue à Paris en septembre dernier. Je pense qu’il a redécouvert son œuvre. Tout est réinventé, de la mise en scène de Nicolas Guilleminot (assistant réalisateur du film Un poison violent) à la scénographie de Guillaume Deviercy (accessoiriste sur Des Dieux et Des Hommes) en passant par les chorégraphies de Johan Nus (Un violon sur le toit, Le prince et le Pauvre) ou les arrangements vocaux dont je me suis occupé. La version française de Bathhouse: the musical! promet d’être singulière !
Quels sont vos autres projets ?
Outre Sauna et La Fourchette de Pétula, je continue la tournée de Jonas, la comédie musicale d’Etienne et Jocelyne Tarneaud dans les rôles, entre autres, de l’Ange Gabriel et du Roi de Ninive. J’ai d’ailleurs eu la chance de collaborer aux nouveaux arrangements vocaux de cette saison. Je serai également à l’affiche de la version oratorio d’Exodus 47 de Gérard Layani dans la peau du Rabbin Hankel (les 20, 22 et 23 janvier prochain à l’Espace Rachi), un très beau projet sur un drame humanitaire survenu au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale. Je vais intégrer le spectacle Le Temps des Copains au Casino de Trouville. J’y jouerai le personnage de Jeff. Nous préparons actuellement le retour de Coups de Foudre, certainement pour le Festival d’Avignon 2011. Enfin, je continue de travailler sur mes propres chansons que vous pouvez écouter sur ma page Myspace (http://www.myspace.com/francoisborand), en collaboration avec d’autres artistes comme By-RC ou Julien Salvia.