Doryan Ben, vous êtes jeune et encore peu connu, pouvez-vous nous en dire plus sur votre parcours?
J’ai vingt ans, je suis originaire de la région parisienne. Après un bac Arts appliqués à l’école Boulle, je suis actuellement en troisième et dernière année de formation à l’ECM de Paris.
Pourquoi avoir choisi cette formation ?
C’était une suite assez logique. Après avoir pensé être scénographe – je faisais beaucoup de graphisme, de dessin, de design – je suis entré à l’ECM car je cherchais la pluridisciplinarité : chant, danse, théâtre. Le chant est ma passion depuis une décennie. Pendant huit ans, j’ai été membre des chœurs Sotto Vocce, dirigés par Scott Alan Prouty, au Théâtre du Châtelet ; d’abord le chœur d’enfants, puis celui des « jeunes ». Cet ensemble vocal possède un avantage : le Châtelet fait appel à lui quand il a besoin d’enfants. Cela m’a notamment permis, à onze ans, de participer à Carmen, ou plus tard, à Miniwanka à l’Opéra Bastille. J’ai aussi pu chanter dans des opéras et des spectacles en Franche-Comté avec des jeunes de la Maitrise de Paris. Cette expérience de chœur m’a appris le professionnalisme et la rigueur de la scène, mais surtout j’ai pu, grâce au Châtelet, découvrir de nombreux spectacles, assister à des créations, et me dire : c’est là que je veux être! En plus de son savoir, Scott Alan Prouty m’a transmis sa passion.
Qu’apprenez-vous à l’ECM?
C’est très varié : chant, danse, théâtre, expression scénique, clown, mime, cours de polyphonie, danse classique, chant lyrique. Nos professeurs ne sont pas des théoriciens mais des pros, qui nous enseignent ce qu’eux-mêmes ressentent sur scène. On est au vif du travail. Après mon expérience d’ensemble, j’ai découvert le fait d’être soliste. J’ai accroché tout de suite. On peut vraiment défendre une personnalité, une voix, une façon de se mouvoir, de jouer. Créer un personnage, attraper le regard du public, c’était pour moi quelque chose de complètement nouveau. Avec l’ECM, j’ai pu avoir mes vrais premiers rôles, dans Legally Blonde, Edward aux mains d’argent, et cette année, dans Oliver Twist lors des hivernales de l’école. Avec une autre élève, Marine Llado, (actuellement à l’affiche de Raiponce), nous formions un vrai duo comique de spectacle.
Comment vous êtes vous retrouvé dans l’aventure de La Revanche du Capitaine Crochet ?
En suivant les annonces de castings sur Internet, j’ai vu ce projet. Peter Pan est un personnage qui me tient à cœur, qui m’a toujours parlé. J’ai donc répondu. Après un premier tour de casting, Ned Grujic et Igor de Chaillé nous ont demandé de réinterpréter notre chanson en nous mettant dans la peau de nos personnages et selon diverses intentions. J’avais choisi « Rien qu’un jour », du Bossu de Notre-Dame et j’ai été sélectionné. En juillet 2015, pour commencer les répétitions, nous avons passé deux semaines avec Ned à travailler le personnage de Peter. Tout ce chemin pour arriver au rôle, le découvrir, l’apprivoiser, m’intéresse particulièrement. Nous avons aussi appris à nous connaitre avec la troupe, à cerner les rôles, avant de monter sur le plateau. Puis ce furent trois semaines d’entrainements d’escrime avec un maître d’armes pour apprendre les bases et les chorégraphies des combats. Les représentations ont démarré en octobre.
En quoi vous sentez-vous proche de Peter Pan?
J’aime sa façon d’être. Il me ressemble, dans son côté d’enfant éternel, (je ne suis pas loin de mon enfance!), j’ai ma voix haut perché (ténor, voire contre –ténor), mon physique… D’ailleurs, on m’a souvent comparé à lui. J’aime aussi son côté espiègle, ne respectant pas les règles, dirigiste. Dans ce spectacle, il a un peu vieilli, il est comme moi, entre le jeune homme et l’enfant. Mais il est bien plus colérique et râleur que moi ! Ce fut très agréable de chercher sa façon à lui d’être en colère. Je pense que Peter Pan est un peu plus profond que ce qu’on peut croire. C’est presque une métaphore. Chaque adulte peut se retrouver dans un Peter Pan.
Comment abordez-vous le fait de chanter devant un jeune public?
Mon intention est surtout de ne pas infantiliser encore plus les enfants et de ne pas incarner un Peter Pan qui leur parlerait bêtement. C’est très important de rester fidèle au personnage, sans s’abaisser. Même devant les enfants, il donne des ordres, peut parler méchamment, se mettre en colère. Et les enfants sont super-réactifs ! C’est extra de jouer avec eux. Les rencontrer après le spectacle est magique. Ce public sincère ne cache pas ses sentiments, et pose un tas de questions : comment fait-on pour voler ? Peut-on leur donner de la poussière de fée ? C’est adorable !
Quels sont les spectacles qui vous nourrissent ?
A Londres, la comédie musicale qui m’a beaucoup marqué c’est Book of Mormon. Je suis resté scotché par la force de l’humour, dans un jeu incroyable, théâtrale sur tout le long et par le pouvoir de ces comédiens qui savent aussi bien danser, chanter, jouer. Encore plus dans Memphis, cette force comique sur des scénographies bluffantes était incroyable. Plus récemment, j’ai vu Singin’ In The Rain, au Châtelet. Là encore, j’ai trouvé cela formidable.
Quel est le rôle de vos rêves?
Je n’aurai jamais la possibilité de le jouer, car j’ai malheureusement dépassé l’âge, mais ce rôle c’est Billy Elliot. Je m’en suis senti très proche. Savoir s’imposer, convaincre sa famille… Je pense un peu à mon père que j’ai dû rassurer en lui expliquant que les métiers du spectacle sont des vrais métiers ! Comme tous les parents, par sécurité pour son enfant, il voulait être sûr que j’allais m’épanouir. Aujourd’hui, ma famille est très fière de moi. Billy Elliot est intouchable comme spectacle, sur tous les points ! Le tableau où les danseuses classiques sont confondues avec les mineurs, avec leurs deux intentions, est l’un de mes préférés, avec « Angry Dance ».
Cette année, vous avez également enregistré un titre sur l’album des Funambules…
Stéphane Corbin [NDLR : initiateur du projet] fut mon professeur de technique vocale. On est devenu ami. Lorsqu’il préparait l’album, il m’a demandé si j’étais intéressé pour participer à un chœur pour l’une des chansons « La lumière », avant de me proposer ce superbe duo entre une mère et son fils. J’ai accroché tout de suite avec sa chanson et avec l’autre interprète, Sonia Alvarez. C’était très important de s’engager sur ce projet, surtout que l’on me donnait la chance de le faire ! Depuis, ce furent les concerts, l’enregistrement des clips…
Quel est votre programme pour les prochains mois?
Je poursuis La Revanche du Capitaine Crochet jusqu’en mars. Nous aurons ensuite plusieurs dates en région parisienne. Le spectacle reviendra de nouveau la saison prochaine à Paris. D’ici là, nous allons présenter fin juin avec l’ECM Un Violon sur le toit au Théâtre des Variétés avec un orchestre. Je m’investis pleinement et ce n’est que du bonheur!
Retrouvez notre critique du spectacle: La revanche du Capitaine Crochet