Quasiment un mois avant la première parisienne, la presse a été conviée à visiter les coulisses de la production sans doute la plus chère de cette rentrée : celle du Fantôme de l’Opéra. Le timing semble parfait puisque Andrew Lloyd Webber fêtera à Paris les 30 ans de ce musical, toujours à l’affiche dans le West End ainsi qu’à Broadway.
Nicolas Engel, talentueux réalisateur de films musicaux, s’est frotté à l’adaptation. Amoureux de cette œuvre, il a postulé et son travail a été retenu… Le voilà donc plongé dans les affres de l’adaptation, qu’il explique avoir faite quasiment à quatre mains, avec Charles Hart, co-auteur des lyrics originels et francophile, et en puisant dans l’œuvre de Gaston Leroux. Cela permet de retrouver une langue originale, en adéquation totale avec l’esprit que doit avoir le spectacle et s’éloigner ainsi d’une traduction littérale, sans âme.
Dominique Trottein, le chef d’orchestre, sera à la tête de quatorze musiciens. C’est la formation orchestrale la plus « petite » autorisée pour jouer la partition. Pour l’heure il répète avec un quatuor à cordes, qui découvre la partition. Avoir un mois pour mettre en place la partie musicale entre les musiciens et les chanteurs représente un laps de temps très confortable, lui qui est habitué aux tempi un rien plus rapides des opéras. Séduit par toutes les nuances de la partition : de la partie pop jusqu’aux sonorités dissonantes empruntées aux répertoires contemporains, sans parler des clins d’oeil à Verdi, Puccini et consorts, il confie prendre un réel plaisir à diriger l’œuvre. Son dynamisme doublé d’une bonne humeur ne masquent pas les exigences musicales très fortes. Il veut le meilleur pour les spectateurs.
Dans son « atelier volant », situé dans le bar du premier étage que les spectateurs pourront fréquenter dès les avant-premières du spectacle (à partir du 4 octobre), Corinne Page est à la tête d’une quinzaine de petites mains chargées de redonner forme aux costumes qui proviennent de productions (russes et allemandes) afin qu’ils puissent rutiler sous les projecteurs. Un travail titanesque puisque 600 costumes environ sont revus, 270 étant sur scène à chaque représentation… Passionnée par son métier, Corinne Page explique qu’il s’agit d’un travail digne de la haute couture. En effet tout, ou presque, se fait à la main. Il suffit de détailler quelques costumes emblématiques pour imaginer les heures de travail nécessaires. Travailler sur des costumes déjà portés, ayant un vécu, touche particulièrement celle qui se transformera en chef costumière. « Le changement de costume le plus rapide est de… 14 secondes ! Il inclut changement de robe, de chaussures et de perruque ». Autant dire qu’un second spectacle se déroule en coulisse et que Corinne ainsi que toute sa troupe sera émue de « récolter une toute petite part des applaudissements ».
C’est à Gardar Thor Cortes que reviendra le privilège d’endosser le rôle titre du spectacle. Comédien chanteur aguerri, ce nouveau défi l’enthousiasme particulièrement et il rend volontiers hommage à Odile, chargée de lui faire parler le français. S’il connait bien l’œuvre, qu’il a découverte comme spectateur en 1999, se mesurer à ce personnage emblématique a de quoi intimider. Mais c’est une énergie qui anime le jeune homme qui a assurément hâte de se retrouver sur scène. Des heures de maquillage l’attendent pour chaque représentation pour un rôle très physique.
En attendant, les répétitions se succèdent sous le regard du metteur en scène et bras droit d’Andrew Lloyd Webber et de Harold Prince (le metteur en scène original). La troupe de 35 chanteurs, danseurs, à l’écoute des directions de jeu, en anglais, qui permettront à cette production d’avoir sa propre identité, tout en restant très fidèle à la mise en scène originale. Spet représentations par semaine, des heures et des heures d’entrainement pour que tout soit au point. Notons que la complexité de cette mise en scène rend toute improvisation impossible, voire dangereuse. En effet, si un comédien ne se trouve pas au bon endroit sur la scène, il est fort probable qu’il tombe dans une des trappes qui pullulent sur le plateau. Une attention soutenue, donc, est nécessaire. Se réapproprier un rôle appris dans le confort d’une salle de répétition sans danger, sur une scène où auront lieu de multiples effets spéciaux, voilà ce qui attend la distribution.
Ce n’est qu’à partir du mardi 20 septembre que tout le cast se retrouvera à répéter sur cette scène où chaque millimètre est utilisé. Que ce soit sur le plateau, dans les coulisses, dans les airs ou dans les sous bassements… En effet, la scénographie magique du spectacle nécessite des aménagements colossaux. Eric Loustau-Carrère, producteur exécutif, indique ainsi qu’il fallut casser la scène du théâtre pour accueillir cette production. Il précise également que c’est en raison du manque d’espace (surtout en hauteur) que Le Fantôme ne pourra point hanter les Zénith français… Il déplore que la France n’ait point de charte concernant les salles, contrairement à d’autres pays européens bien mieux équipés et qui peuvent accueillir sans problème des spectacles aussi lourds que celui-ci. Il précise également que les marges de manœuvre concernant l’adaptation de l’œuvre sont réduites, indiquant que les droits des auteurs anglo saxons ne concernent pas, comme en France, uniquement les travaux des librettistes ou compositeurs, mais aussi celui des éclairagistes, des scénographes, etc…
Le Théâtre Mogador ne se situe qu’à quelques encablures de l’Opéra Garnier, où l’action se déroule. Si le lac, existant, est bien moins romantique que dans le roman, la loge numéro 5 conserve toujours son mystère… Une comédie musicale spectaculaire, romantique amenée à séduire les spectateurs français.
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