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City of Angels — Hollywood stories

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City of Angels, l

Musique : Cy Coleman
Lyrics : David Zippel
Livret : Lar­ry Gelbart
Mise en scène orig­i­nale : Harold Prince

Créa­tion
A Broad­way, le 11 décem­bre 1989 (après 24 pre­views) au Vir­ginia The­atre (879 représentations).
A Lon­dres, le 30 mars 1993 au Prince of Wales Theatre.

Les chan­sons »
« Dou­ble Talk », « What You Don’t Know About Women », Ya Got­ta Look Out For Your­self », « The Bud­dy Sys­tem », « With Every Breath I Take », « The Ten­nis Song », « Ev’ry­body’s Got­ta Be Some­where », « Lost and Found », « All Ya Have To Do Is Wait », « You’re Noth­ing With­out Me », « Stay With Me », « You Can Always Count On Me », « It Needs Work », « L.A Blues », « Fun­ny », ‘I’m Noth­ing With­out You ».

Syn­op­sis
Stine est auteur à Hol­ly­wood. Il rédi­ge actuelle­ment le scé­nario d’un film noir inti­t­ulé « La cité des anges » pour le compte de Bud­dy Fidler, un puis­sant pro­duc­teur. L’ac­tion prend place dans le monde où évolue Stine et dans celui qu’il imagine.
Nous voici, donc, dans un hôpi­tal de Los Ange­les au milieu des années 40. On y apporte le corps inan­imé de Stone, un détec­tive privé. Com­ment celui-ci en est-il arrivé là ? Un flash back nous ramène une semaine plus tôt. Alors qu’il tra­vaille dans son bureau, Stone reçoit la vis­ite de l’ex­trav­a­gante Alau­ra Kings­ley, l’épouse d’un célèbre mil­liar­daire. La jeune femme est éplorée. Sa belle fille a dis­paru et elle attend de Stone qu’il la retrou­ve. Motivé par un chèque de 100 dol­lars, le détec­tive accepte même si cette his­toire lui paraît très louche. L’ac­tion s’in­ter­rompt, alors, brusquement.
Nous décou­vrons main­tenant Stine dans son bureau. Il vient d’être stop­pé dans son élan par un coup de fil de Fidler. Le pro­duc­teur n’aime pas l’ou­ver­ture à l’hôpi­tal et demande à Stine de l’en­lever. Ayant con­science de l’ar­gent que lui rap­porte ce scé­nario, Stine accepte de couper la séquence et se remet au travail.
Stone envoie sa secré­taire, Oolie, à la banque pour encaiss­er le chèque. De son côté, Stine est con­fron­tée à son épouse, Gab­by. La jeune femme est éditrice et part à New York dans le cadre de son tra­vail. Elle sup­porte mal de voir son mari céder à tous les caprices de Fidler et lui reproche de man­quer d’in­tégrité. De plus, elle sus­pecte Stine de ne pas être insen­si­ble aux charmes des petites star­lettes qui peu­plent Hollywood.
A la recherche de Mal­lo­ry, Stone entre dans un motel. Il y est bien­tôt rejoint par deux gros bras qui le tabassent sévère­ment. Bud­dy Fidler adore cette scène mais pense qu’il y a trop de mots dedans. Il est impor­tant que Stine y remédie.
Pen­dant ce temps, le bureau de Stone est investi par des policiers. Leur lieu­tenant, Murnoz, est un ancien col­lègue de Stone, à l’époque où celui-ci était encore sim­ple flic. Murnoz est per­suadé que si Stone a des ennuis, c’est, comme à chaque fois, à cause d’une femme. Cette réflex­ion nous con­duit des années aupar­a­vant. Stone était alors fou amoureux d’une chanteuse de cabaret nom­mée Bob­bi Edwards et voulait l’épouser. Mais Bob­bi pen­sait surtout à sa car­rière et à la gloire que pou­vait lui apporter sa ren­con­tre avec le pro­duc­teur Irwin S.Irving. Mais Irv­ing a une autre vision du spec­ta­cle que Bob­bi et lance la jeune femme dans un numéro dépravé. Stone appa­raît pen­dant la représen­ta­tion et abat Irv­ing de plusieurs balles.
Fidler n’ap­pré­cie pas que le per­son­nage d’Irv­ing meure. Sa secré­taire, Don­na, tente de con­va­in­cre Stine de mod­i­fi­er cet aspect du scé­nario. Stine s’in­ter­roge. Est-ce que Fidler s’i­den­ti­fie à Irv­ing ? Est-ce que Don­na s’i­den­ti­fie à Oolie ? Don­na lui assure que non et lui annonce qu’elle est libre pour aller souper.
Retour au scé­nario. Stone se présente à une récep­tion organ­isée par les Kings­ley. Il veut démis­sion­ner. Mais le mil­liar­daire lui pro­pose un chèque de dix mille dol­lars pour retrou­ver sa fille. Stone pour­suit alors ses recherch­es dans les bas-quartiers de la ville puis ren­tre chez lui. Il a alors la sur­prise de décou­vrir Mal­lo­ry éten­due sur son lit. Celle-ci se lance dans un numéro de séduc­tion et lui dégrafe le pantalon.
De son côté, Don­na dégrafe le pan­talon de Stine. Mais si celui-ci se laisse faire, Stone, en revanche, exige des expli­ca­tions. Mal­lo­ry entame, alors, un abra­cadabrant réc­it de chan­tage qui plonge le détec­tive dans de loin­tains sou­venirs. Le corps d’Irv­ing amené à la morgue, on avait décou­vert que le pro­duc­teur n’é­tait pas mort sous le coup des balles, mais d’une attaque car­diaque. Stone avait donc été libéré. Murnoz, qui est mex­i­cain, s’é­tait juré de faire arrêter son col­lègue qui, selon lui, serait resté en prison s’il n’avait pas été blanc.
Des con­no­ta­tions sociales et raciales dans un film hol­ly­woo­d­i­en ? C’est plus que Fidler ne peut en sup­port­er. Et, défini­tive­ment, Irv­ing ne doit pas mourir. La scène de con­fronta­tion entre Stone et Murnoz doit être déplacé après une autre mort, celle du Dr Man­drill et l’ob­jet du lit­ige entre les deux hommes ne doit plus être, désor­mais, d’or­dre racial mais sen­ti­men­tal. Murnoz sera égale­ment épris de Bobbi.
Mais Stone trou­ve ces change­ments com­plète­ment ridicules et s’adresse directe­ment à Stine! Celui-ci fait savoir qu’il est tou­jours l’au­teur et bal­ance un coup de poing à son per­son­nage par l’in­ter­mé­di­aire de Murnoz.
Sus­pec­té d’avoir tué Man­drill, Stone est main­tenant en prison. Oolie lui promet de faire le néces­saire pour trou­ver le vrai coupable. Stine quand à lui, se réveille auprès de Don­na qui lui explique à quel point tous les change­ments apportés à son scé­nario amélioreront le film. Stine se rend à une soirée organ­isée par Fidler et tente de join­dre Gab­by. Mais celle-ci, voulant par­ler à son époux, est tombée sur Don­na et a com­pris la situation.
Stone sort de prison après que sa cau­tion ait été payée par les deux gros bras du début qui souhait­ent à nou­veau l’in­ter­roger. Le détec­tive se rend chez Alau­ra et demande des expli­ca­tions. Alau­ra lui explique qu’il s’ag­it d’une machi­na­tion organ­isée par Mal­lo­ry et son frère Peter et qu’il est le din­don de la farce. Elle ajoute qu’elle a les moyens de le sor­tir de ce traquenard.
Stine décide, lui, de quit­ter Hol­ly­wood pour rejoin­dre Gab­by à New York mais celle-ci refuse d’en­ten­dre ses explications.
Après avoir fait l’amour avec Alau­ra, Stone part à la recherche de la mys­térieuse pros­ti­tuée avec qui Peter a une liai­son secrète et décou­vre qu’il s’ag­it de Bob­bi. Oolie, quant à elle, a d’é­ton­nantes révéla­tions à faire à son patron.
Quelques années aupar­a­vant, une cer­taine Mme Drex­el, anci­enne infir­mière ayant épousé un mil­liar­daire malade dans le but d’hérit­er de sa for­tune, avait du ren­dre son héritage aux enfants de son défunt mari pour éviter d’être pour­suiv­ie après qu’une autop­sie a révélé que Drex­el avait été empoi­son­né. Aujour­d’hui, Mme Drex­el, dev­enue maMme Kings­ley, compte bien ne pas refaire la même erreur et a tout organ­isé pour faire dis­paraître Peter, Mal­lo­ry, et Man­drill, le doc­teur de son mari, puis faire porter le cha­peau à Stone. Une bagarre éclate entre Stone et Alau­ra, qui veu­lent tous les deux récupér­er le pis­to­let de Mme Kings­ley, devant Mal­lo­ry et Peter. Des coups de feu écla­tent. Les deux com­bat­tants s’écroulent. Tout est fini.
Mais tout n’est pas fini comme Stine le voulait. Que vient faire Mal­lo­ry, la jolie ingénue, dans cette dernière scène ? Fidler, avec l’aide de Don­na, a trans­for­mé le script pen­dant que son auteur était à New York. Le coup de grâce est porté quand Stine réalise que Stone sera inter­prété par un croon­er à la mode bien loin de l’im­age ténébreuse et bur­inée qu’il s’en était fait jusque là.
En plein tour­nage, Stine provoque un scan­dale et rend le script au pro­duc­teur. Il est rejoint par son épouse et par Stone, tel que lui l’avait imag­iné, et tous les trois se lan­cent dans un grand numéro final par­faite­ment hollywoodien.

Le thème
City of Angels pro­pose une alter­na­tive orig­i­nale au con­cept du show dans le show exploité dans de nom­breux musi­caux de Kiss Me Kate à The Pro­duc­ers. Il s’ag­it ici d’un film dans le spec­ta­cle ce qui donne lieu à une satire amu­sante et très intéres­sante du Hol­ly­wood des années 40–50 (époque ou le McCarthysme fait rage d’où la dif­fi­culté d’évo­quer les prob­lèmes soci­aux et raci­aux au ciné­ma) et à une réflex­ion sur l’in­spi­ra­tion et les affres de la créa­tion. Cha­cun des per­son­nages imag­iné par Stine trou­ve son con­tre­point dans la réal­ité. Il en est une vision romanesque et idéal­isée. Ain­si, l’épouse de Stine, austère et intè­gre, devient la maîtresse de Stone, glam­our et dépravée ; l’odieux et vénal pro­duc­teur Irv­ing est inspiré par Fidler qui ne cesse de mod­i­fi­er le scé­nario. Stone, lui même, est une vision de ce que Stine aimerait être. Pour accentuer ce par­al­lèle entre la réal­ité et la fic­tion, chaque per­son­nage et son con­tre­point fic­tion­nel sont sys­té­ma­tique­ment inter­prétés par la même per­son­ne. Seul Stone appa­raît sous les traits d’un acteur dif­férent, ce qui révèle le manque d’as­sur­ance de Stine.
En out­re, le scé­nario imag­iné par Stine dans City of Angels s’in­spire ouverte­ment des polars à la Ray­mond Chan­dler. Cette idée va impos­er un choix visuel intéres­sant. Toutes les par­ties de l’his­toire situées dans le film qu’écrit Stine seront représen­tées en noir et blanc comme dans les films de Bog­a­rt et Bacall tan­dis que la réal­ité hol­ly­woo­d­i­enne appa­raî­tra dans un Tech­ni­col­or clin­quant. Si ce procédé a le mérite de ren­dre immé­di­ate­ment clair la con­struc­tion du spec­ta­cle, il lui offre, en plus, un look con­trasté, orig­i­nal et très effi­cace à l’im­age du livret par­ti­c­ulière­ment sophis­tiqué de cette comédie musicale.

L’his­toire der­rière l’histoire
Con­sid­éré comme l’une des meilleures comédies musi­cales du com­pos­i­teur Cy Cole­man, City of Angels s’ap­puie sur une par­ti­tion forte­ment influ­encée par les rythmes jazz. Il ne s’ag­it pas là d’une nou­veauté, le jazz a tou­jours fait par­tie inté­grante de Broad­way. Les pre­mières comédies musi­cales noires con­te­naient déjà des élé­ments de jazz et de rag­time et des artistes de jazz renom­més ont par­ticipé très tôt aux shows de Broad­way. La fin des années trente vit appa­raître toute une série de spec­ta­cles jazz de Swing it à The Swing Mika­do (adap­ta­tion réorchestrée de l’oeu­vre de Gilbert et Sul­li­van, The Hot Mika­do). Swing­ing The Dream était une ver­sion musi­cale jazzy du Songe d’une nuit d’été de Shake­speare avec Louis Arm­strong dans l’un des rôles prin­ci­paux. A la fin des années 50 fut créé The Ner­vous Set dont la par­ti­tion jazz était écrite par Fran Lan­des­man et Tom­my Wolf. Mais le show n’eut, à l’époque, que peu d’im­pact. Doc­tor Jazz (1975) et Jel­ly’s last Jam (1992) sont, encore, deux exem­ples de spec­ta­cles mêlant effi­cace­ment le jazz aux codes de Broadway.
Auteur de par­ti­tions dans le plus pur style du Broad­way tra­di­tion­nel (Wild­cat, Lit­tle Me), Cy Cole­man avait déjà inté­gré des rythmes jazz avec suc­cès dans Sweet Char­i­ty, cer­tains des titres de ce spec­ta­cle, tel « Big Spender », étant devenus des stan­dards. Pour City of Angels, il fait la somme de toutes ces expéri­ences pour aboutir à une par­ti­tion dans le style des années 30–40 tout en appor­tant une touche mélodique dra­ma­tique plus pro­pre aux années qua­tre-vingt (la chan­son « Fun­ny » en est un par­fait exem­ple). Le style jazz est ici large­ment soutenu par les orches­tra­tions swingantes de Bil­ly Byers et les arrange­ments vocaux de Yaron Ger­shovsky et Cole­man lui-même.
Créée à Broad­way en 1989, City of Angels était la pre­mière comédie musi­cale de Michael Blake­more (qui allait par la suite sign­er la superbe mise en scène du revival de Kiss Me Kate avec Marin Mazz­ie et Bri­an Stokes Mitchell). Le spec­ta­cle a obtenu plusieurs Tony Awards en 1990 dont celui du meilleur spec­ta­cle musi­cal et du meilleur sec­ond rôle féminin pour Randy Graff (créa­trice du rôle de Fan­tine dans Les Mis­érables à Broad­way) qui incar­nait Oolie/Donna. A la créa­tion, le rôle de Stine était tenu par Gregg Edel­man qui sor­tait juste du revival de Cabaret mis en scène par Harold Prince et celui de Stone par James Naughton, futur Bil­ly Fly­nn du revival de Chica­go avec Ann Reink­ing. L’ex­cel­lente Rachel York (Vic­tor Vic­to­ria, Kiss Me Kate) appa­rais­sait dans le rôle de Mal­lo­ry Kingsley.

Ver­sions de référence
City of Angels — Orig­i­nal Broad­way Cast
Avec James Naughton, Gregg Edel­man, Randy Graff, Dee Hot­ty, Rachel York.

City of Angels — Orig­i­nal Lon­don Cast
Avec Roger Allam, Mar­tin Smith, Haydn Gwynne, Susan­nah Fel­lows, Sarah Jane, Hassell.

Béné­fi­ciant tous deux d’une dis­tri­b­u­tion mag­nifique, ces enreg­istrements méri­tent très large­ment le détour. La ver­sion anglaise, inté­grant quelques lignes de dia­logue pen­dant les chan­sons, favorise d’a­van­tage l’aspect dra­ma­tique du spec­ta­cle tan­dis que la ver­sion améri­caine joue à fond la carte du big band jazz.