Opérette en trois actes et quatre tableaux, 1923 de Reynaldo Hahn
Livret de Robert de Flers et Francis de Croisset.
Direction d’orchestre : Laurence Equilbey
Mise en scène : Michel Fau
Orchestre symphonique de l’Opéra de Toulon
Ciboulette, Julie Fuchs
Duparquet, Jean-François Lapointe
Antonin, Julien Behr
Zénobie, Eva Ganizate
Roger, Ronan Debois
Madame Pingret, Bernadette Lafont
La Comtesse de Castiglione, Michel Fau
Destinées à opposer aux comédies musicales américaines la saveur de l’opérette parisienne, Ciboulette est la première partition légère qu’écrivit Reynaldo Hahn. On y suit les tribulations de la jolie maraîchère Ciboulette, décidée à se forger un destin brillant sans sacrifier ses sentiments. Sa quête du bonheur l’amène à croiser toute une galerie de personnages typiques du Paris de la Belle Époque, des plus modestes aux plus distingués. Ciboulette fut créée aux Variétés par Edmée Favart et Jean Périer, deux artistes formés à l’Opéra Comique.
Notre avis : L’intrigue, issue des efforts conjugués de Robert de Flers et Francis de Croisset, tient sur un timbre poste… Dans le Paris de 1867 la bourgeoisie s’encanaille aux Halles. Les demi mondaines font courir les godelureaux, à l’instar du benêt Antonin de Mourmelon que Zénobie mène par le bout du nez. Lorsqu’il découvre qu’elle le trompe avec le nouveau capitaine des hussards, il la livre à son rival, elle et les factures de ses dépenses somptuaires. Cet univers grisouille (et un peu long, au regard de ce qui suivra), choix de mise en scène oblige, se colore et s’avive dès que la ravissante Ciboulette, maraîchère peu farouche, déboule, sa carriole remplie de choux. Va-t-elle, malgré ses huit prétendants, tomber amoureuse d’Antonin ? Nous n’aurons point l’outrecuidance de le dévoiler ici. Un seul indice : Ciboulette délaissera les champs pour le chant puisque, sous le gracieux nom de Conchita Ciboulero, elle enchantera le tout Paris de ces airs à consonances plus ou moins espagnoles, le tout sous l’égide de sa « nouvelle » mère, la poissonnière Mme Pingret.
Ciboule/Ciboulette – opéra/opérette… Parce que cette opérette amusante, rythmée a été mise en scène avec malice par Michel Fau, qui s’octroie le rôle de la comtesse de Castiglione, aïeule au caractère bien trempé de l’héroïne de son Récital emphatique. Les décorateurs misent sur des agrandissements photographiques saisissants, restituant un Paris et une campagne fin 19ème fantasmés, en noir et blanc. Les notes de couleur qu’apportent les irrésistibles costumes de David Belugou acidulent, si besoin était, la partition alerte dirigée d’une main de maître par Laurence Equilbey. Les musiciens de Toulon ne déméritent pas durant les deux heures vingt de spectacle. La distribution est au diapason : les artistes ont franchement l’air de s’amuser sur scène. Que ce soit Julie Fuchs dans le rôle titre ou Julien Behr qui campe un Antonin plus bêta que nature, ces très bons chanteurs se lâchent pour donner tout son piquant à la farce. Jean-François Lapointe tire parfaitement son épingle du jeu dans le rôle du mentor Duparquet, le contrôleur des Halles qui, au milieu de cet univers loufoque, sait émouvoir la salle en évoquant un amour défunt. Mais, une fois encore, l’ensemble de la distribution est à saluer. Jusqu’à Bernadette Laffont, idéale en poissonnière-voyante non chantante. En prime le public est invité à interpréter deux airs. Pour cela rendez-vous à 19h afin d’être coaché vocalement par Christophe Grapperon (un habitué de la troupe des Brigands, bonne référence s’il en est !). Effet garanti. En un mot : une réussite.