Vous avez un parcours un peu atypique. Pouvez-vous nous décrire vos débuts ?
Ce qui m’arrive est un joli conte de fées. Par passion, je fais depuis longtemps du chant, des claquettes, du théâtre… Avant de m’aventurer dans ce métier, j’étais acheteuse d’art dans une agence de publicité. Un jour, il y a cinq ans, j’ai eu un déclic ; j’ai réalisé que je ne pourrais vraiment pas exercer cette profession pendant 40 ans. Il m’est apparu clairement que, si je ne me lançais pas aussitôt, je le regretterais un jour. Mais il fallait surtout prendre le risque de changer de vie. Mes parents m’ont soutenue ; ça a été une vraie chance. Je me suis donc inscrite au cours de théâtre Périmony, pendant 3 ans, tout en continuant mes cours de chant au conservatoire d’Asnières avec Danièle Dinant.
Parallèlement, vous avez vécu vos premières expériences professionnelles ?
C’est Danièle Dinant qui m’a poussée à passer des auditions. Elle m’a fait rencontrer une compagnie d’opérettes, Art Com, dirigée par Jean-Marc Biskup, dans laquelle j’ai fait mes premiers pas en tant que choriste, il y a un peu plus d’un an. Régulièrement, je rejoignais la compagnie pour des représentations de Violettes impériales, Rêve de valse, La veuve joyeuse… Mon tout premier cachet fut sur La vie parisienne… j’ai bien cru que ce serait le dernier. J’étais ravie d’avoir des crinolines, le genre de costumes dont j’ai rêvé quand j’étais gamine. Le problème, c’est que, n’ayant pas l’habitude de porter ce genre de robe, je me suis pris les pieds dedans et j’ai failli tomber en emportant le décor. L’aventure aurait pu s’arrêter là mais les directeurs de la compagnie ont fait preuve d’indulgence et, depuis, je gère mieux les crinolines. En tout cas, je les remercie de m’avoir donné ma chance car ces expériences ont été très formatrices. La suite des événements fut également une question de rencontres.
Comment passe-t-on de l’opérette à la comédie musicale ?
Pendant ma formation chez Périmony, j’ai passé une audition — ma toute première — pour Tintin à Charleroi. On ne m’a pas retenue mais, lorsque la production est venue à Paris, j’ai été recontactée pour une nouvelle audition. J’ai été engagée malgré un trac fou et la peur de ne pas être à la hauteur… jusqu’au jour où l’on nous a appris que Tintin ne se monterait pas. Mais cette déception a constitué le début de l’aventure car j’y ai rencontré les gens qui ont fait que je suis là aujourd’hui. Grâce à Raphaël Sanchez, j’ai obtenu une audition pour Parce que je vous aime, qui a été joué à la Nouvelle Eve. Cela a été une très jolie histoire. En termes de rencontres, j’ai pu travailler avec des gens d’une simplicité et d’un professionnalisme à toute épreuve. Le spectacle en lui-même était aussi très agréable : de belles chansons, un thème fédérateur et un personnage très attachant à défendre, un peu en décalage.
Dracula, Les 7 pêchés capitaux, la troupe de théâtre Magic Mushrooms… Vous vous retrouvez très souvent dans des spectacles qui démarrent. Est-ce un hasard ?
En débutant dans ce métier, je me suis dit que je serais de tous les projets qui voudraient bien de moi. Dans ce métier, on vit beaucoup par le désir des autres. Mon intérêt est d’aller partout, d’apprendre de tout et de tous. Chaque expérience est utile. Même les erreurs sont formatrices. Quand on me propose de participer à un spectacle, c’est un cadeau. Je ne fais les choses que par coup de coeur humain ou coup de coeur artistique. Et puis, en effet, j’adore être au début des histoires, des projets : on n’est pas forcément payé mais, de fait, tout le monde y met tout son coeur et généralement ce sont de belles aventures humaines. C’est un plaisir de défendre un personnage et un projet, au sein d’une troupe… Pour le moment, j’ai retiré du positif de tout.
Comment arrive-t-on dans l’aventure Nonnesens ?
A l’occasion d’un stage de comédie musicale, cet été, j’ai rencontré Pierre-Yves Duchesne qui m’a contactée pour venir passer les auditions de Nonnesens. C’était la première fois que je passais une audition où tout le monde était ensemble, tout le temps. Dans la vie, j’ai horreur du concours, de la rivalité. Je ne me sentais pas à la hauteur. Du coup, j’ai utilisé cette panique, ce manque d’assurance, au cours des improvisations. Je n’ai quasiment pas parlé et j’ai joué la fille un peu dépassée par les événements… ce qui était vraiment le cas. En utilisant mon état du moment, j’ai proposé un personnage un peu décalé par rapport au groupe.
Pouvez-vous décrire Soeur Amnésie ?
Soeur Amnésie est une brave fille, sans aucun sens péjoratif. Elle est généreuse et enthousiaste. Elle a perdu la mémoire mais profite vraiment de la vie. Elle suit strictement les règles, n’aime pas sortir du lot. Pourtant, elle commet de nombreuses maladresses qui la rendent malheureuse. Puis, elle oublie qu’elle est malheureuse et enchaîne avec de nouvelles maladresses.
C’est un personnage formidable à défendre parce que, au-delà de son côté « bonne pâte », il y a une rupture qui la rend attachante. Amnésie recherche ses origines. Tant qu’elle ne sait pas où elle est, on ressent une vraie douleur. Et, paradoxalement, quand elle l’apprend, elle ne regrette rien. Elle comprend alors qu’elle est là où elle devait être. Des cinq soeurs, c’est peut-être, en fin de compte, la plus sereine.
Comment se passe la vie dans une troupe de filles ?
Etre dans une atmosphère 100 % féminine, c’était l’une de mes principales angoisses. En fait, tout se passe extrêmement bien. Les cinq artistes avec lesquelles je travaille sont de vraies professionnelles. Elles représentent des exemples à suivre, avec des carrières et des expériences impressionnantes. Léo et moi, on est très admiratives et on apprend énormément d’elles. Il y a une réelle harmonie : je pense qu’elle résulte du fait que chacune d’entre nous a sa place, aussi bien sur scène que dans les loges. Il y a, depuis le début, un respect mutuel. Nous avons six fortes personnalités et, même s’il y a forcément des moments de tension, nous avons appris à nous connaître et à vivre ensemble. C’est une expérience très enrichissante.
Que peut-on vous souhaiter pour la suite ? Avez-vous un modèle de carrière ?
Pour le moment, Nonnesens est prolongé jusqu’à la fin du mois d’avril, pour notre plus grand plaisir. J’espère que ce spectacle ira encore plus loin. Par ailleurs, en règle générale, on peut me souhaiter de travailler encore et toujours et de continuer sur cette jolie lancée. Quant à mes modèles, pour copier Soeur Hubert, j’avoue que je suis une grande fan de Barbra Streisand. Mais j’ai un autre modèle dans les artistes qui m’entourent : Andy Cocq. J’admire l’artiste, ses choix, son parcours et j’espère, comme lui, continuer tracer ma route doucement, mais sûrement.