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Carousel — Tournez manège !

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Jan Clayton et John Raitt dans Carousel en 1945 ©DR
Jan Clay­ton et John Raitt dans Carousel en 1945 ©DR

Une comédie musi­cale de Richard Rodgers (musiques) et Oscar Ham­mer­stein II (paroles et livret) créée à Broad­way le 19 avril 1945.

Pro­duc­tion orig­i­nale (890 représen­ta­tions) : mise en scène de Rouben Mamou­lian, choré­gra­phie : Agnes de Mille. Avec : Jan Clay­ton (Julie), John Raitt (Bil­ly), Jean Dar­ling (Car­rie), Eric Matt­son (Enoch), Chris­tine John­son (Net­tie).

Prin­ci­pales chansons 
Waltz Suite,You’re a Queer One, Julie Jor­dan / Mis­ter Snow, If I Loved You, June is Bustin’ Out All Over, When The Chil­dren Are Asleep, Blow High, Blow Low, Solil­o­quy, A Real Nice Clam­bake, You’ll Nev­er Walk Alone.

Syn­op­sis
Sur la côte est des Etats-Unis en 1873, une jeune ouvrière, Julie Jor­dan, tombe éper­du­ment amoureuse d’un forain, Bil­ly Bigelow, bon­i­menteur dans un manège forain. Ils se mari­ent mais Bil­ly, désor­mais au chô­mage, se com­porte de plus en plus en plus mal avec sa femme. Quand quand elle se retrou­ve enceinte, cepen­dant, il songe à la vie qu’il pour­rait don­ner à son futur enfant s’il était plus riche. Il se laisse entraîn­er à com­met­tre un braquage qui tourne mal et il se sui­cide plutôt que d’être arrêté. Quinze ans plus tard, Bil­ly quitte le pur­ga­toire où il expi­ait ses pêchés pour revenir sur terre une seule journée et répar­er le mal qu’il a fait. Il y ren­con­tre sa fille Louise et, com­prenant finale­ment que Julie lui a par­don­né, peut les quit­ter pour tou­jours, désor­mais soulagé.

Le thème
La vie du petit peu­ple améri­cain, un thème proche de celui traité dans le pre­mier spec­ta­cle de Rodgers et Ham­mer­stein, Okla­homa ! Jusqu’à eux, la comédie musi­cale traitait surtout de la vie des gens rich­es et célèbres et le monde ouvri­er prê­tait plutôt à rire… ou à faire peur. Le regard ten­dre et respectueux de Rodgers et Ham­mer­stein pour les pau­vres et les exclus prélude à celui qu’ils porteront ensuite sur les autres peu­ples et races (South Pacif­ic en 1949 et Le roi et moi en 1951). Mais Carousel est aus­si une grande his­toire d’amour où s’af­firme le pou­voir cathar­tique du par­don. C’est en effet la bon­té de Julie, affir­mée jusqu’au bout par cette femme qu’on aurait pu croire effacée, qui sauve lit­térale­ment Bil­ly de l’en­fer. Chez Rodgers et Ham­mer­stein, les femmes sont tou­jours large­ment supérieures aux hommes.

L’his­toire der­rière l’histoire 
Richard Rodgers et Oscar Ham­mer­stein II, le duo appelé à devenir le plus célèbre de l’his­toire de Broad­way, avait rem­porté un suc­cès his­torique avec Okla­homa ! en 1943. Ils décidèrent de réu­nir la même équipe créa­tive pour leur pro­jet suiv­ant, une adap­ta­tion de Lil­iom, une pièce hon­groise de Fer­enc Mol­nar qu’In­grid Bergman, fraîche­ment débar­quée d’Eu­rope, venait d’in­ter­préter sur les planch­es. Mais l’ « améri­caneïté » d’Okla­homa ! leur ayant si bien réus­si, ils déci­dent de trans­porter le lieu de l’ac­tion de la Hon­grie en Nou­velle-Angleterre, dotée d’in­nom­brables foires et parcs d’at­trac­tions. Pour l’ou­ver­ture, au lieu de la tra­di­tion­nelle com­pi­la­tion des mélodies du spec­ta­cle, Rodgers écriv­it une valse déroulant sa mélodie au rythme du manège qu’elle évoque. Con­tin­u­ant sans cesse à innover, lui et Ham­mer­stein ont don­né à l’ensem­ble de la pièce une tonal­ité qua­si opéra­tique et inédite à Broad­way par sa pro­fondeur psy­chologique : ain­si une chan­son de plus de huit min­utes, « Solil­o­quy », dans laque­lle Bil­ly envis­age les con­séquences sur sa vie de la nais­sance de son futur enfant. Quant à la chan­son « You’ll Nev­er Walk Alone (Tu ne seras plus seul) », elle est dev­enue l’hymne offi­cieux des march­es pour les droits civiques dans les années 60.

Carousel a été bril­lam­ment adap­té au ciné­ma en 1956 avec Shirley Jones et Gor­don MacRae et sa reprise en 1993 à Lon­dres, puis à Broad­way, a été le prélude à une redé­cou­verte com­plète de l’oeu­vre de Rodgers et Ham­mer­stein, plus de trente ans après la fin de leur col­lab­o­ra­tion. Ce n’est que jus­tice tant les spé­cial­istes s’ac­cor­dent pour trou­ver qu’il s’ag­it là de l’oeu­vre la plus aboutie de ces deux rois de Broadway.

Ver­sions de référence 
Carousel - enreg­istrement orig­i­nal du spec­ta­cle de Broad­way — 1945 — Broad­way Gold MCA Clas­sics. Avec Jan Clay­ton et John Raitt. Quelques soient les défauts des dis­ques d’a­vant l’ère de la stéréo, rien ne rem­place jamais l’é­mo­tion des enreg­istrements orig­in­aux. Ici, les restau­ra­teurs du CD l’ont trou­vé si court (une trentaine de min­utes), qu’ils ont rajouté plusieurs pistes alter­na­tives écartées de l’en­reg­istrement original.

Carousel - reprise du spec­ta­cle à Lon­dres — 1993 — RCA Vic­tor. Avec Joan­na Rid­ing et Michael Hay­den. L’a­van­tage des comédies musi­cales pour ceux qui les préfèrent à l’opéra, c’est la pos­si­bil­ité offerte de mod­erniser l’orches­tra­tion et l’in­ter­pé­ta­tion afin que ces oeu­vres restent tou­jours acces­si­bles au grand pub­lic. De ce point de vue, cette ver­sion somptueuse est une réus­site com­plète. Pro­duite par le grand pro­duc­teur bri­tan­nique Cameron Mack­in­tosh pour le Roy­al Nation­al The­atre, ce Carousel nous entraîne dans une valse de plaisir excellem­ment servie par les voix de ses interprètes.