Quel rôle tenez-vous dans Nonnesens ?
Je joue le rôle de la Soeur Marie Hubert, la seconde de la Mère Supérieure qui rêve de prendre sa place. Elle gère déjà tout ce petit monde parce que la Mère Supérieure fait un peu n’importe quoi.
Comment définiriez-vous le spectacle ?
Nonnesens se rapproche beaucoup du boulevard américain. C’est un show interactif avec un côté très « cabaret ». Il y a un jeu avec le public. Les personnages vont dans la salle pour s’adresser directement aux spectateurs et leur raconter des blagues. En même temps, on est en plein Broadway grâce à la musique et aux personnages qui chantent, dansent et jouent la comédie en même temps.
Qu’est-ce qui, selon vous, est le plus susceptible, dans ce spectacle, d’attirer un public français ?
Je crois que les gens en ont un peu marre des grosses productions du Palais des Congrès. Alors c’est vrai que le côté Broadway peut paraître moins accessible mais l’occasion leur est offerte de découvrir un spectacle musical plus petit, plus intimiste. On est cinq sur scène et on fait tout « pour de vrai » avec des musiciens en live. Et puis, voir cinq bonnes soeurs entrer dans un pur délire, ça devrait attirer beaucoup de monde. Je l’espère du fond du coeur.
Vous jouez, vous chantez, vous dansez. Par quoi avez-vous commencé ?
J’ai d’abord une formation de danseuse. J’ai pris plus tard des cours de chant. Quant au théâtre, je l’ai appris sur le tas. Au départ, je préparais le professorat d’éducation physique — ce qui n’avait absolument rien à voir — et puis j’ai rencontré Viviane Van De Maele, une très grande danseuse, également chorégraphe, et j’ai travaillé avec elle. Quand elle est partie aux Etats-Unis, je l’ai suivie. C’était hors saison scolaire, ce qui me permettait de continuer la préparation de mon diplôme en France. Je suis donc allée deux ans de suite à Los Angeles. A mon retour à Paris, j’ai joué dans Kiss Me Kate, mis en scène par Alain Marcel.
C’était votre premier engagement professionnel ?
J’avais déjà fait de petites choses mais là, c’était mon premier gros spectacle. Viviane en était la chorégraphe. Elle m’avait engagée, dans un premier temps, comme assistante parce que je travaillais tout le temps avec elle. La veille des auditions, j’ai vu qu’ils cherchaient dix filles et dix garçons, excellents danseurs et chanteurs. J’avais vingt-deux ans et je préférais être sur scène que faire de l’assistanat. J’en ai parlé à Viviane qui m’a dit qu’il fallait vraiment savoir chanter. Effectivement, je n’avais jamais travaillé le chant mais je lui ai proposé un deal. Je l’assistais pour les auditions mais elle me trouvait un rendez-vous auprès d’Alain Marcel dans un délai suffisamment long pour que j’aie le temps de préparer quelque chose. J’ai donc été assistante pour le casting de danse puis j’ai passé une audition de chant et j’ai été prise. Alain Marcel m’a donné ma chance. C’est un souvenir formidable. On a joué au Grand Théâtre de Genève puis à Paris au théâtre Mogador.
Qu’est-ce qui vous plaisait dans Kiss Me Kate ?
C’est une vraie comédie musicale dans le pur esprit de Broadway et Alain en avait particulièrement bien réussi l’adaptation. Le seul regret que j’ai, c’est de ne pas l’avoir jouée autant que j’aurai voulu. Le spectacle n’a pas rencontré le succès qu’on espérait.
Qu’avez-vous fait ensuite ?
Pendant les trois saisons qui ont suivi, j’ai participé à la production de Barnum, mis en scène par Jean-Paul Lucet. Les deux premières années, le spectacle avait lieu au Théâtre des Célestins à Lyon. La troisième fois, on est venu à Paris au Théâtre de la Mutualité. Ce fut une expérience étonnante car, en plus de la danse et du chant, il y avait du cirque. On a donc tous été préparés par des entraîneurs de la production américaine du spectacle qui supervisaient toutes les nouvelles réalisations. On a appris à jongler, à faire des acrobaties. La dernière chanson, qui durait dix minutes, était un vrai numéro de cirque sur une scène de théâtre. On chantait, on dansait, et, d’un seul coup, on se retrouvait sur un trapèze à sept mètres de hauteur. Cela dit, c’est après Barnum que j’ai arrêté de danser parce que je me suis fait trop mal. J’en suis sortie un peu abîmée physiquement. Aujourd’hui, si j’ai besoin de travailler quelque chose pour un spectacle, j’y vais, mais c’est tout.
Vous avez aussi travaillé avec Roger Louret.
Effectivement, j’ai fait un bref passage dans la compagnie Roger Louret pour Les Années Twist, aux Folies Bergère puis en tournée. C’était très sympa mais c’est un univers complètement différent. Avec Alain Marcel, on est vraiment dans le monde du théâtre. Avec Roger, on fait de la télé, de la variété, du spectacle tout court, enfin quelque chose de complètement opposé. Je me suis bien amusée mais c’est quelque chose que je n’aurais plus envie de faire. J’aime vraiment le théâtre musical même si c’est difficile à faire passer en France parce que ce n’est pas notre culture. J’ai eu ensuite l’occasion de participer à Nine, encore aux Folies Bergère, qui correspond plus à ce que j’aime. Je jouais une des quatorze femmes de la vie de Guido, qu’incarnait Jerôme Pradon. Saverio Marconi a mis en scène le spectacle et c’était vraiment magnifique.
Votre collaboration avec Saverio Marconi s’est poursuivie après Nine.
J’ai retrouvé Saverio et les Folies Bergère avec Sept filles pour sept garçons. Pour cette production, j’ai aussi été un peu assistante. Initialement on devait monter Chantons sous la pluie et puis ça ne s’est pas fait et on a choisi ce spectacle-là. C’est un souvenir excellent d’un point de vue artistique mais frustrant car, comme pour Kiss Me Kate et Nine, on ne l’a pas joué longtemps.
Vous avez enchaîné les comédies musicales pendant plusieurs années. Avez-vous travaillé dans d’autres domaines ?
J’ai participé à des spectacles pour enfants en Suisse, notamment pour une nouvelle version de Barbe Bleue. Il s’agissait là vraiment de théâtre même s’il y avait quelques chansons. J’ai signé plusieurs chorégraphies. J’ai travaillé avec le metteur en scène Jean-Luc Revol sur une production de La Tempête avec Jean Marais. J’ai fait pas mal de théâtre de rue en tant que chorégraphe et puis j’ai tourné pendant deux ans avec mon propre tour de chant. Il y a eu un moment un peu difficile pour les artistes de comédies musicales quand sont arrivés Notre Dame de Paris ou Les Dix Commandements. Là, il faut d’abord envoyer une maquette avant de passer l’audition. Il faut être sélectionné pour auditionner ! Ca me semble absolument aberrant. J’ai tenté le coup une fois ou deux, mais je n’ai pas été choisie. Dans ce milieu, le théâtre musical comme je le pratique, c’est un peu ringard. Et puis, je ne me suis pas non plus présentée avec le dernier tube de Céline Dion. Mais je n’ai aucun regret à ce sujet.
Jeanne Deschaux, votre metteur en scène, est également la chorégraphe du spectacle et a débuté comme danseuse. Auriez-vous, vous aussi, envie de passer à la mise en scène ?
J’ai mis en scène, en décembre dernier, une production amateur de Annie. J’ai monté ça avec une cinquantaine d’enfants et de comédiens amateurs que j’ai fait chanter sur scène. C’était génial. On va le reprendre, cette année, en Angleterre, dans le cadre d’un échange culturel entre deux villes jumelées. Oui, la mise en scène, ça me fait vraiment envie.
Et en tant qu’interprète, de quelle comédie musicale rêvez-vous ?
J’aime beaucoup Sweet Charity et les comédies musicales de Bob Fosse en général. Mais mon rêve à moi, ça va paraître un peu prétentieux mais, bon, je me lance, c’est de jouer Funny Girl !!!