Peu d’artistes peuvent se vanter de produire des disques écoutables à l’aube de leurs 80 ans. Barbara Cook fait partie de ce cercle très restreint. Et encore, on ne lui fera pas l’injure de qualifier d’«écoutable» son dernier album, No one is alone. Car ce serait faire une description très éloignée de la réalité. Sur cet album qui emprunte son titre à une chanson de Stephen Sondheim (extraite de Into the Woods) Barbara Cook y fait ce qu’elle sait faire de mieux : interpréter des chansons répertoire du théâtre musical américain, piochées ici chez Rodgers & Hammerstein, Jule Styne (le compositeur de Gypsy et Funny Girl), Leonard Bernstein et Sondheim, évidemment. Et elle le fait, comme toujours, avec classe et modestie. Classe, parce que depuis trente ans qu’elle a abandonné les planches de Broadway pour devenir chanteuse solo, elle ne cesse de démontrer ses immenses capacités d’interprète qui infuse d’émotion chaque phrase chantée ; modestie parce que contrairement à d’autres, elle ne cherche pas à pousser sa voix comme si elle avait toujours 20 ans. Cela ne l’empêche de chanter à nouveau, 50 ans après sa création le finale de Candide, de Leonard Bernstein, le magnifique «Make Our Garden Grow». C’est le rôle de Cunégonde dans cette production qui avait définitivement lancé sa carrière sur Broadway. «Callas tuerait pour tes mi bémol !», lui avait même lancé Leonard Bernstein le soir de la première, à laquelle la diva assistait. Un demi-siècle plus tard, les mi-bémol se sont peut-être envolés, mais la voix de Barbara Cook force toujours autant l’admiration.