Une revue de textes de Noel Coward et de chansons de Cole Porter interprétés et accompagnés au piano par Irina Borisienko et Nigel Hollidge.
« I Love Paris » and Paris loves Porter !
Ils ont, chacun d’un côté de l’Atlantique et parfois ensemble à Venise ou sur la French Riviera, synthétisé l’esprit de l’après-Première guerre mondiale. C’était un temps où le monde était encore partagé entre les prolétaires ivres de révolution et la jet-set cosmopolite qui préférait, elle, le champagne. Si la réputation de Cole Porter, musicien prolifique hors-pair, n’est plus à faire (Anything Goes, Kiss Me Kate, Can-can et des centaines de chansons à succès), Noel Coward est bien moins connu en France. Disons pour simplifier qu’il est un peu le Sacha Guitry anglais, un mélange d’intelligence brillante et de misanthropie rampante.
En France depuis dix ans, Nigel Hollidge a eu maintes occasions de faire découvrir au public parisien des pièces anglaises et américaines en version originale. Il a choisi ici de passer d’une langue à l’autre librement en entrecoupant les chansons de courts sketches (écrits par Pascal Crantelle à la manière) de Noel Coward. Son léger vibrato de ténor évoque les voix des vieux phonos à pavillon dont Gatsby ferait tourner la manivelle pour Daisy. Face à lui, au piano, Irina Borisienko défend un point de vue féminin souvent malmené par le misogyne Coward (qui aimait beaucoup moins les femmes que Sacha Guitry…).
Dans le cadre intime du Théâtre du Tambour Royal, on passe une heure agréable à condition sans doute d’être déjà familier au moins avec l’oeuvre de Cole Porter à défaut de l’être avec celle de Noel Coward. Citoyen du monde comme on savait l’être alors, Porter fuyait l’ennui comme la peste et affichait un dilettantisme sans faille en toutes circonstances malgré une santé perpétuellement chancelante. C’est peut-être là la clef d’une oeuvre marquée par une frénésie de pétillement que ce spectacle ne rend qu’en partie.