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Alexandre Bonstein : Bons Baisers de Sibérie #4 et fin

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Alexandre Bonstein
Alexan­dre Bonstein

Voici, pour les lecteurs de Regard en Coulisse, mon regard sur les couliss­es du Théâtre Musi­cal d’Irkoutsk (Sibérie Ori­en­tale), où je monte Bon­nie & Clyde en comédie musi­cale (il ne s’agit pas de la ver­sion de Raphaël Ban­cou qui s’est jouée à Avi­gnon et à l’Alhambra, mais d’un spec­ta­cle inédit de Bernard Poli) avec la troupe russe du théâtre.

Dans le dernier épisode, je vous ai lais­sé sur une note de pes­simisme…  et à qua­tre jours de la pre­mière, ça n’était plus une note, c’était une symphonie !

Jacques Verzi­er est arrivé en décou­vrant que les tis­sus achetés pour les cos­tumes ne cor­re­spondaient sou­vent pas à ceux qu’il avait demandés, et que seule­ment un tiers des (+ de 100) cos­tumes avaient été réalisés.
Les chaus­sures achetées à Paris et envoyés par Col­is­si­mo quelques semaines aupar­a­vant n’arrivaient pas (elles ne sont pas encore arrivées…).
Le nom­bre de micros (emprun­tés à un autre théâtre) était insuff­isant pour le nom­bre de solistes.
La Ford V8 de Bon­nie et Clyde était « bleu élec­trique »… et les lumières évo­quaient plus « Hol­i­day On Ice » que l’ambiance Hitch­cock que j’avais demandée.
L’orchestre ne jouait pas dans le même tem­po que le groupe rock (placé en couliss­es, et unique­ment en con­tact avec le chef d’orchestre par moni­teur vidéo), ce qui créait une soupe cacoph­o­nique que ni les chanteurs ni les danseurs ne pou­vaient suivre.
La mise en place sur scène devait se faire en trois jours, à rai­son de deux ser­vices de trois heures, avec un filage par dis­tri­b­u­tion par jour, et aucun temps prévu pour faire des rac­cords ou la mise en place de scènes que je n’avais pas pu mon­ter sans le décor.
Et impos­si­ble de répéter au delà de 21h à cause du manque de trans­ports publics pour les artistes…
En plus je dés­espérais de voir les cho­ristes s’investir émo­tion­nelle­ment en chantant …

Bonnie & Clyde à Irkoutsk
Bon­nie & Clyde à Irkoutsk

Et tout à coup, les Dieux du Grand Nord sont inter­venus ! enfin, pas qu’eux…

D’abord, l’investissement des cho­ristes a com­plète­ment changé après que l’une des chanteuses m’a expliqué que pour par­ler de mis­ère, il valait mieux que je me réfère à la Sibérie qu’à l’Amérique (sym­bole de richesse), puisque ici la crise économique , c’était une constante.

Et puis Jacques a fait des mir­a­cles, et les cou­turières de même !
Dès qu’elles ont com­pris ce qu’il voulait et adhéré à son (bon) goût, elles se sont démenées et ont tout réal­isé en deux jours. Et ça a de la gueule !

Pour les micros, on a mis en place des cho­ristes en couliss­es (avec micros à main) pour soutenir ceux qui sont sur scène, et du coup on s’en sort.

Grâce à sa bonne volon­té, deux heures de tra­vail avec l’éclairagiste ont suf­fi pour chang­er la plu­part des effets, et le scéno­graphe a fini par faire repein­dre la voiture en noir l’après-midi de la première.

Bernard Poli (l’auteur com­pos­i­teur du spec­ta­cle) est arrivé le 4 mars de Thaï­lande (env­i­ron 60° de dif­férence avec Irk­out­sk) et a réus­si à retra­vailler le dynamisme des orches­tra­tions avec le chef d’orchestre et les faire jouer ensem­ble avec le groupe rock (en fait il remar­quait que les musi­ciens rock, grisés par leurs riffs, ne regar­daient pas du tout le moniteur !…)

En bref, tout s’est mis en place au dernier moment !

Et… la pre­mière s’est super bien passée ! (même s’il a man­qué un bruitage de coup de feu, et qu’un des per­son­nages n’a pas été tué, et qu’il a fait un peu de « danse  con­tem­po­raine » en atten­dant que sa pour­suite le lâche).

Bonnie & Clyde à Irkoutsk
Bon­nie & Clyde à Irkoutsk

Avec Bernard et Jacques, on a finale­ment assisté à un spec­ta­cle tel qu’on le rêvait, et on est bien fiers !

La direc­tion du théâtre est con­tente, et l’Alliance Française, qui a porté le pro­jet, aussi.

Et puis les soix­ante artistes (pre­mière et sec­onde dis­tri­b­u­tion) ont l’air d’être heureux de défendre le spec­ta­cle et se don­nent à fond.

Alors main­tenant on fête ça !

Bonnie & Clyde à Irkoutsk
Bon­nie & Clyde à Irkoutsk

Moi qui n’avais bu qu’une bière en deux mois, j’ai dû boire plus d’un litre de vod­ka hier, entre une bal­lade au lac Baïkal (où on buvait pour se réchauf­fer) et une fête de « deux­ième » où on a passé notre temps s’embrasser et à se faire des déc­la­ra­tions solennelles.

J’ai hâte de retrou­ver Paris ! Mais ça va être bien dur de partir !

Bonnie & Clyde à Irkoutsk
Bon­nie & Clyde à Irkoutsk

Pho­tos : Jacques Verzier