Musique : Harry Warren.
Lyrics : Al Dubin.
Livret (D’après le roman de Bradford Ropes) : Michael Stewart & Mark Bramble.
Mise en scène & chorégraphie originales : Gower Champion.
Production originale à Broadway : David Merrick.
Adaptation musicale, arrangements & orchestrations supplémentaires : Donald Johnston.
Direction musicale : Gareth Valentine.
Mise en scène et chorégraphie : Stephen Mear.
Décors & costumes : Peter McKintosh.
Lumières : Chris Davey.
Avec : Alexander Hanson, Ria Jones, Monique Young, Dan Burton, Jennie Dale, Carl Sanderson, Emma Kate Nelson, Stephane Anelli, Matthew McKenna, Teddy Kempner, Chantel Bellew, Charlie Allen, Emily Goodenough, Jessica Keable, Barnaby Thompson & Scott Emerson.
Résumé : Bien que touché par la dépression économique, le producteur Julian Marsh est décidé à entreprendre les répétitions de sa nouvelle comédie musicale Pretty Lady, ce qui devrait lui permettre de retrouver une place éminente à Broadway. Mais la vedette féminine se blesse lors des répétitions. Le spectacle sera sauvé grâce au talent d’une jeune choriste de la troupe.
Notre avis : Pour son dernier musical avant une longue fermeture pour travaux, le Théâtre du Châtelet frappe fort. En proposant 42d Street — un musical sur les coulisses de la création… d’un musical — Jean-Luc Choplin, directeur du Châtelet, ne fait pas un choix anodin : cette œuvre est une véritable déclaration d’amour à Broadway et à la comédie musicale, mais plus largement aux auteurs, aux artistes, aux techniciens, aux musiciens, à toutes les personnes, dans l’ombre ou la lumière, qui permettent à un spectacle d’exister et de faire rêver des spectateurs. Basé sur le film éponyme de 1933, 42d Street dont l’action se situe durant la Grande Dépression, fut créé à Broadway en 1980 et était à l’époque un des rares musicals à être adapté d’une œuvre cinématographique. Jouant ouvertement la carte de la nostalgie, misant sur des numéros de claquettes à foison, 42d Street fut un triomphe et tint l’affiche pendant près de neuf ans.
On sait que M. Choplin ne lésine jamais sur les moyens. Le Châtelet était ces dernières années une des rares maisons où l’on pouvait encore entendre des œuvres du répertoire jouées par des orchestres symphoniques (tandis qu’à Broadway, le nombre de musiciens se réduit comme une peau de chagrin). Cette dernière production n’échappe pas à la règle : un superbe orchestre (sous la baguette d’un des plus prestigieux directeurs musicaux du West End, Gareth Valentine), un vertige de costumes somptueux, un nombre conséquent d’interprètes sur scène (46), tout est fait pour que l’on en prenne plein les yeux et les oreilles. Pourtant, les yeux et les oreilles ne sont pas les premiers à être emportés. Dès l’ouverture partielle — et mythique — du rideau, c’est définitivement le cœur qui est satisfait. De la danse, du chant, de l’énergie, de la sincérité, de la fraîcheur, de la précision, de la beauté : dès la première minute, le spectacle parle directement aux amoureux de la comédie musicale. Tous les ingrédients qui font que l’on aime ce genre sont réunis, avec maestria.
Et la suite ne déçoit pas, dans les magnifiques mise en scène et chorégraphie de Stephen Mear (chorégraphe, entre autres, de Mary Poppins, ou de Singin’ In The Rain au Châtelet), la talentueuse troupe enchante, et particulièrement dans les époustouflants numéros de claquettes. Mais si les tableaux d’ensemble sont inoubliables, les rôles principaux offrent également de brillantes performances. Alexander Hanson (A Little Night Music, Stephen Ward) joue un metteur en scène charismatique, avec une présence indéniable. Ria Jones (qui reçut beaucoup d’éloges récemment en tant que stand-by de Glenn Close dans Sunset Boulevard) incarne une diva over-the-top et touchante à la fois. Dan Burton, vu au Châtelet dans Singin’ In The Rain dans le rôle de Don Lockwood, et plus récemment en Tulsa dans le Gypsy avec Imelda Staunton, fascine tant par ses qualités de danseur que par sa voix. Enfin, dans le rôle de la jeune inconnue qui devient une star : une inconnue qui deviendra peut-être une star, du moins, elle en a tous les atouts. Monique Young, véritable triple threat, joue, chante et danse à merveille.
Coup de maître, donc, pour ce dernier spectacle de l’ère Choplin. Et malgré son livret basique, 42nd Street, sous ses allures de old-fashioned-feel-good-musical, interroge gentiment sur les rapports entre l’artiste et le public. Si parfois on a l’impression aujourd’hui, de traverser nous mêmes une grande dépression, 42nd Street est là pour nous rappeler et nous prouver que l’art sait définitivement mettre du baume aux cœurs.